Intervention de Muriel Ressiguier

Séance en hémicycle du mardi 13 novembre 2018 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2019 — Recherche et enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMuriel Ressiguier :

Sans surprise, le budget 2019 poursuit une politique d'austérité générale qui met à genoux les plus fragiles, notamment, les retraités, les étudiants, les personnes en situation de handicap, autrement dit, les Français les plus modestes.

En tenant compte de l'inflation et de l'évolution démographique, le budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur » n'augmente que de 0,2 %. Pourtant, les besoins sont énormes et ces domaines contribuent à conférer à la France un rayonnement international. Mais, pour vous, peu importe.

Peu importe si les effets néfastes de l'autonomie des universités, qui doivent trouver des financements seules et se tournent vers le privé, commencent à se faire sentir, si la dotation que l'État leur attribue n'a pas suivi l'augmentation de leurs besoins. Peu importe si, d'après la Cour des comptes, une quinzaine d'universités est en difficulté financière. Peu importe si l'Université n'est plus accessible à tous. Peu importe si Parcoursup a remis en cause la démocratisation de l'enseignement supérieur en sélectionnant les étudiants. Peu importe si la qualité des enseignements se dégrade. Peu importe si le parc universitaire se délabre.

Le budget du programme « Formation supérieure et recherche universitaire » diminue de 63 millions d'euros malgré une forte augmentation du nombre d'étudiants. Le budget par étudiant a baissé de 10 % en cinq ans et vous continuez sur cette lancée ! Or, 10 %, c'est significatif : c'est un choix politique clair de désengagement, voire de désintérêt progressif de l'État pour la question universitaire.

Concernant la recherche, le Gouvernement ouvre les portes au privé et orchestre la fuite des investissements publics vers les entreprises alors qu'il faudrait renforcer les moyens humains et financiers du CNRS et des autres organismes publics de recherche. Il faudrait également donner les moyens aux doctorants et aux chercheurs de travailler dans des conditions optimales.

En effet, la recherche fondamentale, qui s'inscrit souvent dans le temps long, doit être préservée et non soumise aux logiques de rentabilité à court terme. Or, vous faites le choix aberrant d'intensifier les interactions de la recherche publique avec les entreprises, notamment via la création de start-up.

Dans son discours du 16 octobre 2018, le Président de la République a abordé la question de la transition écologique, dont il a estimé qu'elle devait être mise en oeuvre. Parallèlement, le budget du programme « Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durable » diminue de 36 millions d'euros ce qui, à l'heure de la transition écologique, est un non-sens – en effet, ce programme est un appui scientifique qui permet d'éclairer les décisions des pouvoirs publics dans des domaines caractérisés par des connaissances et des techniques sans cesse en évolution.

Vous le savez, nous combattons cette logique du tout privé et de la marchandisation du savoir.

Il serait judicieux au contraire de stopper l'hémorragie qui permet aux entreprises de bénéficier tous les ans de 6 milliards d'euros d'argent public via le crédit d'impôt recherche, le CIR, qui est bien souvent détourné et dont l'efficacité est difficile à estimer.

Il faudrait s'employer à rétablir aussi l'égalité entre les territoires et l'accès au savoir pour tous.

Les universités françaises doivent rester fidèles à leur mission de service public. Les objectifs ne doivent pas être uniquement l'employabilité et la rentabilité mais bien la formation de citoyens émancipés pourvus d'esprits critiques.

Enfin, nous estimons que nous avons besoin d'une recherche publique, indépendante, et libre. Dans un champ aussi fondamental pour la société que celui du savoir, votre politique d'austérité traduit votre inconscience. Il est inconcevable que presque la moitié des salariés de l'enseignement supérieur et de la recherche soit des précaires – comme c'est le cas aujourd'hui – , que les moyens actuels permettent au mieux de financer 30 % du fonctionnement des laboratoires publics ou, encore, que le nombre insuffisant de bourses accordées ou le manque de logements conduisent nos étudiants à s'endetter pour financer leurs études. Prenez garde : un pays qui sacrifie sa jeunesse sacrifie son avenir !

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