Intervention de Jean-Paul Bonnefont

Réunion du jeudi 18 octobre 2018 à 10h30
Mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique

Jean-Paul Bonnefont, professeur de génétique à l'Université Paris-Descartes, Institut hospitalo-universitaire Imagine (unité mixte de recherche 1163), médecin praticien hospitalier et directeur de la Fédération de génétique médicale :

Nelly et moi-même avons connu les mêmes mésaventures que Samir Hamamah avec la Fondation Jérôme-Lejeune, qui nous a fait perdre à peu près deux ans. Disons que c'est la règle du jeu…

Il y a cependant dans le paysage sombre mais réaliste qui vient d'être décrit une bonne nouvelle, qui est l'appel d'offres de l'INSERM pour la recherche sur l'embryon – à ce petit bémol près, que le montant des crédits alloués n'est pas précisé : en fait, c'est en fonction du nombre de réponses obtenues qu'il sera décidé du financement des projets.

Je ne connais pas d'autres spécialités que la recherche sur l'embryon où ont cours de tels procédés, et je confirme que l'obtention de financements est un véritable cauchemar, comme sont un cauchemar les procédures d'autorisation. Cela explique pourquoi la France est très en retard, en matière non seulement de DPI, mais aussi de recherche sur l'embryon. Or c'est au niveau de l'embryon que vont se jouer, dans les années qui viennent, les progrès dans le traitement des maladies génétiques. Je ne nie pas la nécessité de poser des garde-fous mais, si l'on ne peut pas toucher aux embryons, nous ne ferons pas avancer le traitement des maladies génétiques et la France prendra du retard, non seulement au plan scientifique mais également au plan économique.

En ce qui concerne le dépistage néonatal, il est effectué sur les huit cent mille nouveau-nés qui naissent en France chaque année pour détecter des maladies rares qui sont la phénylcétonurie, l'hypothyroïdie, la mucoviscidose, le déficit en 21-hydroxylase et la drépanocytose. C'est très efficace, car cela permet de dépister et de traiter les enfants atteints avec un bénéfice colossal. Quant à savoir s'il serait pertinent d'élargir le dépistage néonatal à d'autres affections, le CCNE, dans son avis, a suggéré d'y placer les déficits immunitaires sévères, sans plus de précisions, au motif que cela serait susceptible d'en changer la prise en charge. En effet, quand ces déficits immunitaires sont détectés, il est souvent déjà trop tard pour agir de manière efficace. Je suis pour ma part en plein accord avec cette position du CCNE.

Pour les autres maladies, honnêtement, la liste des pathologies retenues dans les pays anglo-saxons ou certains pays européens ne me convainc pas. Au regard du rapport coûtbénéfice, il ne me semble pas que d'autres maladies puissent être des candidates pertinentes, tout simplement parce que l'on reste encore assez démunis en matière de traitement des maladies génétiques S'il y a beaucoup d'effets d'annonce, en particulier à l'hôpital Necker, concernant les thérapies géniques – qui sont de magnifiques prouesses –, il s'agit néanmoins de traitements qui nécessitent un investissement financier et humain colossal et qui ne peuvent pas pour l'instant servir de réponse à la plupart des maladies génétiques. Je reste donc sur l'avis du CCNE.

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