On est ici très loin des tests génétiques que l'on peut effectuer via des sites internet. S'agissant de kits livrés à domicile pour réaliser soi-même l'édition du génome, le contrôle me semble difficile. On pourrait en interdire la vente libre, mais de nombreux Français achètent à l'étranger des tests génétiques interdits en France. On pourrait réglementer au moins l'utilisation de cette technologie par les laboratoires de recherche. Pour le moment, j'ai du mal à imaginer un encadrement strict, à moins d'assimiler l'utilisation de la technologie CRISPR à ce qui se fait dans le domaine de l'atome et de la prolifération des produits nucléaires. Pour le moment, rien ne se fait. On est un peu dans l'anarchie. Tous les chercheurs qui ont recours à cette technologie s'y engouffrent car, pour publier, il faut démontrer qu'on en a la maîtrise, un peu comme lors de la mise sur le marché des premiers anticorps monoclonaux ou de l'analyse par amplification génique. Il y a un effet de mode et les choses deviennent incontrôlables.
Comme je l'ai suggéré, le législateur pourrait déjà demander que l'on ait une vision de ce qui se fait dans nos laboratoires publics et privés. Le prévoir au niveau européen serait déjà un pas important. Pour les OGM, on demandait à chaque laboratoire de déclarer chaque année ce qu'il utilisait. J'étais directeur de labo, nous trouvions cela rébarbatif, cela prenait beaucoup de temps, mais les gens prenaient conscience que les éléments qu'ils manipulaient n'étaient pas anodins. On pourrait le faire avec l'édition du génome en demandant chaque année aux chercheurs quels types de cellules ils ont modifié avec la technologie CRISPR, pour leur faire prendre conscience de l'impact de cette technologie.