La manière dont le Sénat a profondément remanié l'article 45 du projet de loi témoigne de la divergence fondamentale qui existe entre sa conception de la politique pénale et celle du Gouvernement. En effet, je vous propose une nouvelle politique des peines, qui vise à sortir du systématisme de l'emprisonnement dès lors que celui-ci n'apparaît pas comme la sanction la mieux adaptée à la nature de l'infraction, à sa gravité, à son auteur et à la situation de ce dernier. Les sénateurs, quant à eux, s'en tiennent plutôt à l'emprisonnement, sans prendre en considération la meilleure manière de lutter contre la récidive et de permettre la réinsertion des détenus.
Le texte adopté par le Sénat a ainsi pour conséquence de permettre au tribunal d'écarter l'intervention du juge de l'application des peines pour toutes les peines inférieures à un an, y compris celles de moins de six mois. Il est donc de nature à augmenter de façon significative et, me semble-t-il, injustifiée le nombre des incarcérations.
C'est pourquoi je vous proposerai de rétablir un certain nombre des dispositions initiales de l'article 45, lesquelles instituent un dispositif à plusieurs paliers qui est à la fois progressif, cohérent et équilibré et qui permet de diminuer la durée des courtes peines d'emprisonnement. Par ailleurs, un certain nombre d'améliorations pourront être apportées au projet initial du Gouvernement.
L'amendement CL967 tend ainsi à supprimer les alinéas 1 et 2 de l'article 45, relatifs à la motivation des peines prononcées. En effet, il n'est pas souhaitable, en la matière, d'aller au-delà de la jurisprudence de la Cour de cassation. Non seulement les dispositions adoptées par le Sénat, d'une part, se traduiraient par un alourdissement de la charge de travail des juridictions qui ralentirait le déroulement de la justice, mais elles n'inciteraient pas ces dernières à prononcer des peines autres que les peines d'emprisonnement ferme et non aménagées, puisque ces peines devraient également faire l'objet d'une motivation.