Je répondrai sur l'hydroélectricité, grande et petite, et sur la PPE.
La grande hydroélectricité manque de visibilité. Cela fait maintenant huit ans qu'on nous promet le renouvellement des concessions en concurrence, mais il y a toujours de bonnes raisons de ne pas le faire. On nous fait valoir qu'il ne faut pas brader la rente hydroélectrique de la nation à des opérateurs privés. Or, c'est exactement l'inverse dans la mesure où la concurrence est vive et où un système de redevance permet à la collectivité de récupérer l'avantage de la production hydroélectrique par rapport au reste du marché.
On nous oppose aussi le risque de « casse sociale » pour les employés des concessions hydroélectriques, ce qui est également faux puisqu'il est prévu de les reprendre sous le statut actuel.
On évoque également des problèmes de sûreté. Mais, comme le disait Jean-Louis Bal, nous sommes dans une situation où il ne se passe rien, où il n'y a plus aucun investissement parce que le concessionnaire sortant ne sait pas ce qu'il doit ni ce qu'il peut faire, ni comment il sera traité. Il faut renouveler d'urgence les concessions afin d'établir les cahiers des charges et les nouvelles règles de sûreté applicables aux futurs concessionnaires, qui pourront ainsi investir.
On nous parle enfin de confrontation entre les usages de l'eau. Cette question n'est pas propre à la petite hydroélectricité : elle vaut aussi pour la grande hydroélectricité. Remettre les concessions en concurrence permet de toiletter les cahiers des charges qui, pour certains d'entre eux, datent de plusieurs dizaines d'années, voire de plus d'un demi-siècle ! L'occasion est offerte de tout remettre à plat et d'établir les règles permettant de gérer les concessions de manière optimale pour la collectivité. Il est faux de prétendre que cela augmentera les tarifs réglementés de vente, car ils ne sont pas du tout construits sur cette base.
Bref, un tas de fausses vérités, voire de mensonges, sont énoncés autour du règlement des concessions hydroélectriques, ce qui est dommage, car on sait par ailleurs qu'il existe un vrai potentiel d'augmentation du productible de certaines concessions. Aussi, il nous paraît urgent de procéder à ce renouvellement, d'autant que les concessions hydroélectriques ont toujours été en France – c'est également vrai en Europe – une filière cruciale pour la sécurité d'approvisionnement, d'une part, et la sûreté du système, d'autre part, dans la mesure où il s'agit de moyens de production très flexibles, ce qui est d'autant plus important, dans le cadre de la transition énergétique, que nous aurons de moins en moins de moyens de production flexibles. J'ai évoqué précédemment l'importance des cycles combinés gaz, mais les concessions électriques resteront évidemment essentielles à l'équilibre du système électrique, de même que devront être développés d'autres éléments de flexibilité, notamment en aval.
En tout cas, une chose est certaine : les opérateurs, notamment Direct Énergie qui vise 15 % de parts de marché à l'horizon 2023, ne peuvent passer outre cette filière pour équilibrer leur portefeuille, et l'objectif précité mérite, tout autant que les autres consommateurs, de bénéficier de ces moyens de production extrêmement flexibles.
Sur cette question du renouvellement des concessions, le dernier argument opposé est celui de la sécurité d'approvisionnement et de la sûreté du système. De ce point de vue, nous sommes favorables à ce que l'on ajoute aux critères économique, environnemental et de productible envisagés, le quatrième critère qu'a proposé l'Autorité de la concurrence dans un avis de 2014, est qui est la stratégie de développement de l'acteur sur le marché français, tant dans le domaine de la production que de la commercialisation. C'est l'option retenue par la France pour la filière éolienne offshore : le critère de sélection des opérateurs était leur volonté de développer la filière sur le sol français. Il est logique d'attribuer les capacités de production indispensables à notre système électrique aux opérateurs qui cherchent à se développer sur notre marché. Qu'ils soient étrangers ou français, publics ou privés, n'est pas la question. La concurrence doit bénéficier in fine au consommateur.
Direct Énergie, via sa filiale Quadran, est également présent dans le secteur de la petite hydroélectricité. Nous comptons une dizaine d'installations qui représentent une dizaine de mégawatts ; cinq sont en cours de développement. Nous avons, par ailleurs, gagné deux appels d'offres lancés par Voies navigables de France (VNF) pour équiper les écluses de petits moyens de production. Mais ce développement est contrarié par les conflits entre les différents usages de l'eau, car l'on constate qu'en pareil cas le dernier intérêt à « arriver sur la pile » est celui qui a le moins de chance d'être retenu : il est bien plus facile, en France, de geler un projet que d'en lancer de nouveaux. Les intérêts préexistants ont en général plus de facilités acquises, notamment par la succession d'un grand nombre de contentieux qui ont fait jurisprudence et qui contribuent, sinon à arrêter les projets, en tout cas à les ralentir fortement. C'est bien dommage, car la transition énergétique n'a pas besoin d'être ralentie, mais au contraire accélérée.
En tant qu'acteur industriel, j'estime très important que la PPE distingue les filières les unes des autres – le photovoltaïque au sol du photovoltaïque en toiture, l'effacement diffus de l'effacement industriel – en leur fixant des objectifs et des trajectoires qui soient cohérents avec les enjeux de la transition énergétique et de la lutte contre le réchauffement climatique. Or, de ce point de vue, des inquiétudes persistent. L'un des exemples qui ont été cités est celui de la trajectoire d'autonomie de la production dans les zones insulaires, aujourd'hui très éloignée de l'objectif de 2030. S'il faut des objectifs ambitieux, il vaut aussi une mise en oeuvre qui corresponde aux trajectoires.