Pour ma part, je m'en tiendrai ici à l'amendement no 54 . Il vise, comme vous l'avez expliqué, à permettre d'engager une action de groupe, sans que les personnes victimes du manquement en cause n'aient à apporter la preuve du préjudice qu'ils auraient subi. Une telle conception de l'action de groupe est contraire aux principes généraux de mise en jeu de la responsabilité civile ou administrative. En effet, la responsabilité civile ou administrative suppose un fait dommageable, c'est-à-dire un fait ayant porté préjudice. Le juge vérifie toujours la réalité et le caractère certain du préjudice invoqué.
Supprimer toute référence au préjudice rapprocherait l'action de groupe de la seule sanction qui, elle, relève du droit pénal, et non de la responsabilité civile ou administrative. Ainsi, on pourrait considérer que la suppression de la référence au préjudice tend à faire jouer à un groupe de personnes un rôle qui relève actuellement, en matière pénale, du seul ministère public.
Enfin, il convient de noter qu'une telle modification obligerait à préciser le mécanisme de ce nouveau type d'action de groupe, dans la mesure où elle ne pourrait plus se raccrocher aux dispositions générales de la loi no 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, mais également aux articles 826-2 et suivants du code de procédure civile et L. 77-10-10 à L. 77-10-14 du code de justice administrative, qui organise la réparation des préjudices autour des deux dispositifs, la procédure individuelle de réparation et la procédure collective de liquidation des préjudices.
Étant donné la complexité de ces questions, il ne nous semble pas souhaitable de légiférer rapidement, sans procéder d'abord à une analyse approfondie. Je suis donc, madame la députée, au regret de me dire défavorable à votre amendement.