Intervention de Mansour Kamardine

Réunion du mardi 26 septembre 2017 à 11h00
Délégation aux outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMansour Kamardine :

Madame la ministre, je partage votre ambition pour l'outre-mer. Je fais partie des rares députés de mon groupe qui ont accordé leur confiance au Gouvernement, mais elle n'est pas aveugle : c'est une confiance de principe. Aussi quand je vois ce qui se passe à Mayotte, avec la signature de la feuille de route tendant à faciliter la circulation des Comoriens vers notre île, feuille de route qui met le pays à feu, je dois vous avouer que je suis très préoccupé. Je vous avais dit que l'instauration d'un visa outre-mer n'était pas, s'agissant de Mayotte, une bonne idée. Or, en effet, si j'en crois les échos du terrain, les Mahorais ont essayé d'occuper la préfecture tant, pour eux, il ne s'agit plus de leur préfecture mais de celle des étrangers.

Vous nous avez conviés à suivre un certain nombre d'orientations. J'ai eu déjà l'occasion de vous signifier que nous, les Mahorais, ne sommes plus assis mais debout. Et puisque vous nous incitez à débattre et que notre culture est de tradition orale, nous allons continuer la palabre.

Reste que les Mahorais savent déjà ce qu'ils veulent : un développement durable. Or les orientations contenues dans la feuille de route visent à faire partager avec nos voisins la misère qui sévit à Mayotte… C'est que le développement durable doit passer en particulier par la réalisation des chantiers structurants, par le désenclavement routier, le désenclavement aérien, le désenclavement maritime, le désenclavement numérique, mais aussi, si je puis dire, par la construction du Mahorais à Mayotte – loin de nous l'idée, en effet, qu'on puisse construire Mayotte sans les Mahorais. Seulement, et vous le savez, madame la ministre, pour vous être rendue sur place, nous avons des classes surchargées, avec en moyenne, pour chacune, plus de trente enfants ; il nous faut organiser des rotations scolaires puisque plus de 600 écoles manquent ; en outre, nous devons compter avec trente naissances par jour soit l'équivalent de deux classes – ou trois si l'on adopte le critère de douze élèves par classe retenu par le Président de la République. Les communes de Mayotte n'ont pas les moyens financiers de répondre aux besoins très importants créés par cette situation.

Bref, vous pouvez constater que la réalité de Mayotte, surtout si l'on ferme les yeux sur l'immigration clandestine, est loin de permettre un développement durable, d'autant que dans la coulisse on justifie son impuissance par le nombre excessif d'immigrés et de clandestins ; aussi laisse-t-on les choses aller, quitte à faire porter le poids des difficultés à la jeunesse mahoraise et à compromettre son avenir au sein de la France.

Vous êtes revenue, madame la ministre, sur le développement des bassins maritimes, en particulier sur les politiques engagées au nom de l'État par l'AFD. Mayotte ne peut souscrire sans conditions à ces orientations : elle est le seul territoire qui fait l'objet de revendications territoriales internationales – or imaginer qu'on ne développe pas l'aéroport de Pamandzi parce qu'on s'appuiera sur la plate-forme de Moroni est un non-sens politique car le jour où les Comores seront en conflit avec nous, nous ne pourrons plus utiliser ladite plateforme. Nous souhaitons donc une coopération réciproque mais, tant que durera cette revendication territoriale, nous ne pouvons pas nous appuyer, en matière de développement maritime et de développement aérien, sur les infrastructures de Moroni.

Enfin, et ce ne sont pas mes collègues réunionnais qui me démentiront, nous avons un gros souci, madame la ministre, avec nos compatriotes mahorais qui, utilisant leur carte d'identité française, fuient la misère qu'on nous propose, je le répète, de partager avec nos voisins comoriens. C'est d'autant moins acceptable que les efforts faits pour accueillir ces Mahorais à la Réunion se révèlent vains. Aussi la stratégie mise en place au niveau de l'État pour éviter un décalage de développement entre Mayotte et les Comores est-elle un non-sens politique. Les Mahorais fuient ensuite de la Réunion vers la métropole où, du fait d'un décalage culturel important, ils sont mal accueillis, mal intégrés – et cette situation provoque des tensions au sein des familles, des ruptures même –, alors qu'ils perçoivent les dotations versées aux autres compatriotes, augmentant d'autant la dépense publique.

Je souhaite donc que tout soit mis en oeuvre à Mayotte pour développer les politiques sociales de façon à y fixer les populations, ce qui permettra notamment de lutter efficacement contre l'immigration clandestine.

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