Je me réjouis du grand nombre de députés présents à cette réunion. J'ai entendu avec plaisir l'expression de votre courage et de votre détermination, madame la ministre. Je n'en irai pas moins droit au but : je regrette que la présente délégation ne soit qu'une chambre d'enregistrement, et je le regrette profondément car nous avons tous lutté pour qu'elle ait une vraie capacité de proposition, à l'égal d'une commission permanente.
Vous avez prononcé des mots forts qui ont suscité mon admiration, en particulier quand vous avez affirmé qu'il ne fallait pas de traitement au rabais, que les Assises des outre-mer seraient inédites, allant même, et je vous rejoins, jusqu'à exiger l'application de l'article 349 du traité de Lisbonne – toujours négligé par Bruxelles et par une grande partie des responsables des États membres –, voilà un gros chantier.
Vous citez le « POSEI pêche », combat que nous avons mené pendant dix ans ; mais il faudrait que votre ministère détienne le vrai pouvoir, ce qui n'est pas tout à fait le cas.
Vous parlez de défiscalisation – dispositif qu'il est question de supprimer très bientôt – ; il s'agit là aussi d'un combat très important qu'il faut gagner. Nous vous soutiendrons mais je vous mets d'ores et déjà en garde car vous devrez faire face à Bercy.
Vous évoquez enfin la reconduction éventuelle de la loi de développement économique pour l'outre-mer (LODEOM) – un outil essentiel. On peut contester le dispositif de défiscalisation qu'elle contient, concernant l'investissement productif, mais il importe, j'y insiste, que la LODEOM soit reconduite, même sous une autre forme.
Plus encore, vous plaidez pour un nouveau modèle de développement, étant entendu que, et vous êtes bien placée pour le savoir – et nous le savons tous, qui vivons en outre-mer –, que la catastrophe sociale est source d'incidents. Êtes-vous dès lors disposée à instaurer des zones franches expérimentales dans chaque département et région d'outre-mer, afin que nous reprenions nous-mêmes en main les outils d'organisation de l'investissement pour assurer une économie de partage, transversale, et sortir du système actuel qui produit 20 à 30 % de chômage structurel, taux que nous ne sommes jamais parvenus à faire baisser.
On prie le bon Dieu pour ne pas tomber malade un samedi ou un dimanche en outre-mer – l'une des pires situations est en Guyane et en Martinique. La politique de santé publique est donc incroyablement déficiente.
Pour ce qui concerne la diplomatie territoriale, nous sommes éternellement étrangers à notre propre géographie. La proposition de loi que j'ai présentée et qui a été votée à l'unanimité ouvre une petite porte en la matière. Êtes-vous donc disposée à instaurer une vraie diplomatie économique territoriale de sorte que La Réunion puisse négocier avec l'Afrique du Sud, la Guyane avec le Brésil, sans être liée par le cordon d'une République unitaire, mais sans pour autant que l'indivisibilité de cette dernière soit remise en cause ?
Enfin, comment avoir une ambition telle que la vôtre alors que l'État abandonne des milliers de jeunes parce qu'il refuse de renouveler les contrats aidés ? Si vous décidez d'un moratoire, en outre-mer, concernant les emplois aidés, alors vous aurez Serge Letchimy avec vous et certainement de nombreux autres parlementaires.