Avec Annick Girardin, nous avons souhaité faire de la couverture numérique un sujet essentiel des Assises de l'outre-mer : elle me dit qu'il s'agit d'un des premiers thèmes qui apparaissent lors de ses déplacements, en dehors bien sûr des situations de crise. Là-bas aussi, on est connecté à sa famille par les réseaux sociaux et on a envie d'acheter ou de vendre en ligne. Non seulement on paie trop cher, comme dans tous les domaines de l'économie, mais on subit aussi le sous-investissement et la sous-implication de certains opérateurs. Même s'il y a des exemples positifs, avec de la fibre optique ou un réseau de très grande qualité, globalement on n'est pas au niveau. Je m'impliquerai personnellement sur cette question et je me suis engagé à faire un déplacement avec la ministre des outre-mer. Je ne sais pas si ce sera en Guyane, mais on peut en discuter… Nous voulons profiter des assises pour développer une vraie compréhension du sujet. Si on a réussi avec les RIP dans les territoires les plus ruraux, on doit là aussi être capable d'inventer des solutions quand le marché ne répond pas tout seul à la demande.
La Commission européenne s'est saisie depuis longtemps de la question de la couverture mobile transfrontalière. Beaucoup de ceux qui travaillent à Bruxelles vivent d'ailleurs la problématique du déplacement transfrontalier. La solution retenue, qui aura un impact très positif, consiste à supprimer les frais de roaming, c'est-à-dire d'utilisation d'un réseau étranger, pour ceux qui ont un abonnement dans un pays de l'Union européenne. Dans un village français, on pourra ainsi se connecter automatiquement à un réseau étranger de meilleure qualité qui serait disponible, sans même le savoir et surtout sans payer plus cher car ce sera intégré au forfait. C'est une révolution pour les transfrontaliers comme pour les frontaliers. Nous voulons favoriser les déplacements transfrontaliers au sein de l'Union, afin de concrétiser le marché unique et des parcours de vie uniques sur l'ensemble du territoire européen. Le roaming doit permettre de répondre à ces enjeux. Si cela ne fonctionne pas, on entrera dans le cadre du processus d'identification des problèmes spécifiques que je mentionnais tout à l'heure : cela ne concerne que des zones très limitées.
Je n'ai pas d'annonce particulière à faire aujourd'hui sur le plan numérique à l'école, mais sachez que nous y travaillons avec le ministre de l'Éducation nationale. Il mettra en oeuvre, comme tous les autres ministres, un véritable plan de transformation numérique dans son secteur. Avec le Premier ministre et Gérald Darmanin, nous présenterons, dans les prochaines semaines, l'initiative « Action publique 2022 », qui se traduira par une analyse des modes d'action de chaque ministère et par des propositions de simplification. Vous avez raison : cela ne sert à rien, en effet, de numériser des procédures compliquées, car elles resteront compliquées. La simplification et la numérisation iront de pair. Oui, il y aura bien un « deuxième épisode », avec une véritable vision de ce que doit être l'Éducation nationale à l'ère du numérique et aussi de ce que doit être le numérique au sein de l'Éducation nationale - mais je laisserai à mon collègue la primeur des annonces. Nous y travaillons activement ensemble et ce travail, comme je le disais tout à l'heure, repose sur l'audit, la capacité d'analyse et le bilan. Nous aurons de la sorte un regard plus précis sur les projets à mener dans les prochains mois.
L'identifiant unique a été annoncé par le Premier ministre et c'est un sujet que je porte avec le ministre de l'intérieur. Nous pensons qu'il faut arriver à une identité numérique unique, mais cela ne signifie pas une base de données unique : c'est d'un authentifiant qu'il s'agit, pour permettre de se connecter simplement à tous les services publics. Notre vision est celle d'un compte « citoyen », où l'on retrouve tous les services publics. Il faut que ce soit particulièrement simple pour l'utilisateur, avec une architecture de communication absolument protectrice en matière de données personnelles. Le modèle est celui d'une authentification unique, avec des bases de données bien séparées, communiquant entre elles de manière sécurisée, et toujours avec un contrôle de l'utilisation grâce à l'information du citoyen. Dans les pays les plus en avance, comme la Finlande et l'Estonie, vous êtes informés quand les données sont communiquées d'un service à l'autre, dans votre intérêt. Lorsque vous donnez votre authentifiant unique dans un nouvel hôpital, par exemple, on vous demande si vous acceptez que tout votre historique médical soit transféré ; ailleurs, pour le calcul d'une prestation sociale, on vous proposera la reprise de toutes vos données fiscales des cinq dernières années.
Il a fallu du temps sous la précédente législature pour aboutir à une organisation intéressante sur les questions de cyber-déviance, de cyber-djihadisme et de contre-discours, mais il y a aujourd'hui un comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation, dont Muriel Domenach est la secrétaire générale. Elle travaille avec les ministères concernés, notamment ceux de l'Intérieur et de l'Éducation nationale, et elle entretient le lien avec les grandes plateformes pour s'assurer qu'elles font leur part du travail en matière de retrait des contenus, de contre-discours et d'orientation. Elle est au coeur d'un dispositif qui fonctionne plutôt bien. Sur ce sujet grave, tout le monde a su se mobiliser et marcher ensemble. Pour les discours de haine, en revanche, on n'est pas encore au niveau : cela fait partie des éléments sur lesquels on doit avancer.
Je note, madame Mörch, votre proposition d'utiliser le numérique comme un moyen de signalement : elle n'est pas dans les « tuyaux », mais je la trouve intéressante. Vous savez qu'il existe déjà une possibilité de pré-plainte numérique, dans presque tout le territoire : cela permet de signaler une situation avant même de se rendre au poste de police ; si on ne se présente pas, un suivi est néanmoins assuré. Cela pourrait être une des manières de procéder.