Madame Bellin, j'ai pris connaissance avec intérêt de votre curriculum vitae. Celui-ci est particulièrement riche de vos expériences professionnelles successives comme de vos travaux et publications. Je ne suis malheureusement ni médecin radiologue, ni spécialiste du nucléaire. Dès lors, ma réflexion portera sur le travail que vous souhaitez accomplir à la tête du conseil d'administration de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire – si votre nomination est confirmée. Je vais donc vous poser des questions en essayant de me cantonner aux domaines de compétence de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Je ne doute pas de la protection dont bénéficie au quotidien chaque citoyen grâce au travail accompli par l'ensemble des acteurs de la filière nucléaire – EDF, l'ASN et l'IRSN. Quel sera, à l'avenir, le rôle de l'IRSN pour ce qui est d'assurer notre protection au regard de l'énergie nucléaire, au regard de l'inquiétude que les nouveaux réacteurs en cours de construction ou d'élaboration peuvent susciter ? Les moyens financiers alloués à l'institut sont-ils suffisants pour mener ses missions au vu du développement en cours de l'énergie nucléaire à travers les réacteurs EPR, lesquels sont d'ailleurs onéreux dans leur élaboration, en espérant qu'ils soient un jour rentables dans leur exploitation et sûrs dans leur fonctionnement ?
L'IRSN apporte un soutien technologique et scientifique permanent à l'ASN, notamment du fait de l'indépendance des deux organismes : l'un est un établissement public industriel et commercial (EPIC), l'autre une autorité administrative indépendante. Si les missions de l'un et de l'autre sont clairement définies, comment envisagez-vous le travail de partenariat avec l'ASN sous votre mandat ?
Les modalités de gestion des déchets nucléaires évoluent depuis une vingtaine d'années. La technologie de l'enfouissement, envisagée à Bure, dans la Meuse, est présentée comme sûre, mais elle présente des incertitudes étant donné la durée de vie des déchets nucléaires. Les moyens alloués à l'IRSN lui permettent-ils de poursuivre de façon efficace dans le temps les travaux de recherche nécessaires à une gestion encore améliorée – voire totalement renouvelée – des déchets nucléaires ?
Enfin, je ferai une remarque destinée à embêter certains membres de la commission. L'énergie nucléaire permet à la France d'être l'un des pays les moins émetteurs de gaz à effet de serre au monde. Or la protection de notre santé ressortit de la compétence de l'IRSN, comme je l'ai dit. Toutefois, comme vous le savez, le souhait d'un certain nombre d'hommes et de femmes politiques est de sortir du nucléaire. Dès lors, quel serait le rôle de l'IRSN afin de protéger les populations du nucléaire, sans risquer de les exposer à des moyens de production d'électricité qui conduiraient à l'augmentation des émissions de CO2 et au réchauffement climatique, dans un contexte de réduction de la production d'électricité à travers l'énergie nucléaire ? Autrement dit, votre mission contribuera-t-elle à la promotion du développement durable, tout en nous assurant une vie tranquille au voisinage immédiat et permanent du nucléaire ?