Le débat reflète la tension constatée aux États généraux de l'alimentation entre la dimension qualitative, environnementale et sanitaire de la production agricole, à laquelle les agriculteurs sont attachés, et sa dimension économique. On ne peut mettre en tension permanente le prix des produits – qui constitue la base de la rémunération et donc du revenu des agriculteurs – et leur qualité. L'agriculture française est caractérisée par des productions de qualité encadrées par des normes qui en garantissent la sécurité. Ces normes constituent un filet qui évite des crises, mais quand elles se font trop contraignantes, il en résulte une perte de compétitivité. La proposition de loi vise à établir un équilibre entre prix et contraintes de qualité. M. Alain Bruneel dit exprimer le point de vue du consommateur ; mais l'on fait erreur si l'on pense qu'en matière alimentaire les acheteurs ne se préoccupent que du prix. Ils s'intéressent aussi, et probablement de plus en plus, à la qualité, à la provenance et à la traçabilité de ce qu'ils trouveront dans leur assiette. Le prix est bien entendu l'un des paramètres qui interviennent dans la décision d'achat, mais ce n'est pas le seul.
Lors des auditions, il nous a été dit par des intervenants qui s'appuyaient sur des chiffres précis que la situation des filières et des agriculteurs s'améliorerait considérablement si le panier alimentaire hebdomadaire moyen des consommateurs augmentait de seulement quelques centimes – je dis bien quelques centimes. Il est donc indispensable, pour tenir compte du revenu de ceux qui sont à l'origine de la production, les agriculteurs, de se pencher sur la formation des prix.
Quant au principe de précaution, dont traite un des articles de la proposition de loi, son application stricte et surtout précipitée dans le domaine agroalimentaire conduit à des aberrations. Nous avons tous en tête des exemples d'abattages massifs dont les conséquences, en France mais aussi à l'étranger, donnent à réfléchir.
Les départements d'outre-mer (DOM) qui appliquent déjà une dérogation au code des marchés publics pour l'alimentation des services de restauration collective font mieux qu'en métropole, où la question de l'approvisionnement local reste posée. Lors de la précédente législature, un autre groupe politique avait déposé une proposition de loi à ce sujet, dans des termes à peu près identiques à ceux qui sont repris dans le présent texte, et je l'avais votée. Enfin, je me rappelle qu'en juin 2005, un rapport d'information de M. Joël Beaugendre a traité de l'utilisation du chlordécone et des autres pesticides dans l'agriculture martiniquaise et guadeloupéenne entre 1981 et 1993, date depuis laquelle son utilisation a été interdite aux Antilles.