Voici donc, monsieur le Président de la République, votre budget de la honte. Voici votre budget de la colère.
Ce fut, l'année dernière, votre geste inaugural, votre entrée en matière : pour vos amis millionnaires, vous avez supprimé l'impôt de solidarité sur la fortune. C'était une promesse de campagne – pour la financer, justement, votre campagne ! J'en ai recueilli le témoignage : que garantissiez-vous à vos généreux mécènes, à tout bout de champ, d'un dîner lucratif au suivant ? La fin de l'ISF. En échange, les financiers vous signaient à tire-larigot des chèques de 7 500 euros. Dès votre entrée à l'Élysée, vous teniez cet engagement et assuriez à vos donateurs un retour sur investissement. Avec la suppression de l'ISF, mais pas seulement : également avec la flat tax, avec l'effacement de la taxe sur les hauts salaires, avec une ristourne « spéciale Brexit » pour les banquiers, avec une baisse de l'impôt sur les sociétés. À vos copains et coquins, vous avez distribué des milliards, les yeux fermés, sans compter.
Et en même temps, dès qu'on vous parle de l'hôpital abandonné, des EHPAD sous-dotés, des élèves handicapés, des tribunaux engorgés, des commissariats délabrés, dès qu'on plaide pour la santé, l'éducation, la police et la justice, vous répondez « déficit public ». Vous brandissez ce spectre terrifiant : « Quelle dette allons-nous laisser à nos enfants ? » Hypocrite que vous êtes ! Charlatan de l'endettement ! Elles sont bien sélectives, vos pudeurs de père-la-rigueur !
En même temps, surtout, pour enrichir les riches, comment avez-vous procédé ? Vous avez appauvri les pauvres ou les modestes. Vous avez gratté 5 euros sur l'APL des locataires, vous avez éliminé 240 000 contrats aidés, vous avez relevé la CSG des retraités. Il fallait oser ! À ce point, il fallait oser ! Une injustice aussi évidente, aussi criante, il fallait oser ! Mais vous osez tout, et c'est à ça qu'on vous reconnaît.