Intervention de Sébastien Chenu

Séance en hémicycle du lundi 26 novembre 2018 à 16h05
Projet de loi de finances rectificative pour 2018 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Chenu :

… les Français vous adressent un message clair : « occupez-vous de nous, protégez-nous, protégez notre économie, notre pouvoir d'achat, notre mode de vie, notre capacité à nous projeter dans l'avenir, à nous déplacer, à vivre dignement de notre travail » ! C'est le peuple des sans-grade, des oubliés, des méprisés et des snobés qui vous adresse ce message, mais vous leur répondez bilans comptables, tableurs Excel, comités Théodule, mépris de classe, leçons de morale et leçons d'économie.

Avec votre politique d'austérité, la croissance sera de 1,5 %. Je vous rappelle que la prévision de croissance moyenne pour les pays de la zone euro et de l'ordre de 2,1 %. Nous assistons donc à un réel décrochement économique de la France. En même temps, piètres économistes que vous êtes, vous faites progresser la dette publique : après une hausse de 20 milliards en 2018, elle progressera d'environ 25 milliards en 2019, comme l'annonçait le président de la commission des finances.

L'augmentation ininterrompue du déficit structurel et de la dette, maladroitement masquée par la vente de participations de l'État aux capitaux de diverses sociétés ne soulage pas fiscalement les ménages. Avec un taux de prélèvement obligatoire de 45,3 % du PIB en 2017, la France est au deuxième rang mondial. Le matraquage fiscal s'accélère toujours. Hausse de la CSG, contrôle technique, limitation de la vitesse à 80 kilomètres à l'heure, hausse des carburants, baisse de l'aide personnalisée au logement, fin des contrats aidés, carte grise pour les vélos à venir : l'État ne parvient plus à cacher son appétit fiscal au service de quelques-uns. Les Français du monde du travail, actifs ou retraités, sont pris pour des machines à cash. Le Gouvernement se sert de l'argument de l'écologie pour justifier sa politique fiscale.

Il promet une baisse de 6 milliards d'euros de la fiscalité des ménages, mais les Français ne sont pas dupes de ce jeu de bonneteau. On donne d'un côté pour reprendre de l'autre avec la hausse des taxes sur les carburants, le fameux impôt du quotidien. La réalité du budget, c'est la baisse des prestations sociales, le quasi-gel des retraites et la baisse des prestations familiales. En 2018 et en 2019, les 0,1 % de nos compatriotes les plus riches verront leur revenu disponible augmenter en moyenne de 86 000 euros par an. Les Français qui fument des clopes, qui roulent au diesel et qui ne vont pas dans les restaurants parisiens à 200 euros sont matraqués fiscalement, alors que les plus privilégiés, désormais exemptés de l'impôt de solidarité sur la fortune, font marcher à plein la machine à optimisation et à évasion fiscales.

Selon une enquête publiée par Mediapart en 2017, le groupe français Kering, propriété de la famille Pinault, aurait fait échapper aux services fiscaux français et italiens 2,5 milliards d'euros. Ce groupe aurait transféré artificiellement 70 % de ses bénéfices en Suisse par l'intermédiaire de sa filiale logistique Luxury Goods International – LGI. En novembre 2017, une enquête fiscale a été ouverte en Italie ; en France, rien, nous ne voyons rien venir. Il est vrai qu'il est plus facile de taxer lourdement les retraités ou les automobilistes français que les puissants groupes financiers qui sont vos amis.

J'ajoute que projet de loi de finances pour 2019 prévoit une hausse de 11 millions d'euros des crédits alloués à l'aide médicale d'État, l'AME. Cette aide a pour objet le versement de prestations sociales à des individus qui n'ont pas la nationalité française et qui sont présents illégalement sur notre territoire.

Afin de réduire la pression fiscale toujours plus dense et toujours plus intense sur les automobilistes, en ce qui nous concerne, nous proposons un moratoire sur les taxes sur les carburants. Les 60 % de taxes actuelles se répercutent à la pompe, et nos compatriotes en paient directement le prix. En supprimant cette aberration fiscale, l'État aurait la possibilité de faire baisser les prix à la pompe et donc d'alléger la facture des Français. Je crois qu'il s'agit du cliquet indispensable pour que les manifestations des gilets jaunes puissent s'arrêter.

Les taxes affectant les automobilistes sont toujours de plus en plus nombreuses. La plupart des recettes sont affectées au budget général de l'État ou à l'achat de nouveaux radars, comme nous l'avons vu dans le budget. Nous proposons qu'une majorité de ces recettes soit réaffectée à l'amélioration des infrastructures routières. En France il y a urgence : 17 % du réseau routier non concédé et 7 % des ponts sont concernés. La catastrophe du viaduc de Gênes devrait être prise au sérieux.

Oui, chers collègues, il est possible de mener une autre politique qui allie transition écologique et pouvoir d'achat ; sécurité des Français à l'intérieur de nos frontières et intérêts économiques de ces derniers. Aujourd'hui, 26 novembre, dans ma circonscription de Denain, cela fait déjà dix jours que c'est la fin du mois. Ici, nous construisons la loi. Nous faisons du droit parce que nous manquons de courage et de charité, écrivait André Comte-Sponville ; tâchons de le faire mentir en refusant ce PLFR !

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