Avec Mme Hakwik, nous n'interviendrons pas au nom de nos entreprises, mais du collectif LUCIOLE – acronyme de « L'union pour une consommation intelligente et optimisée de l'énergie » – que nous avons formé il y a un peu plus d'un an. Son objet est de faire connaître le « consommer mieux », qui a trait aux données, au stockage et à l'autoconsommation ; et le « consommer moins », qui a trait à la rénovation énergétique.
S'agissant de la consommation de l'énergie, force est de constater que nous sommes aujourd'hui très loin des objectifs que nous nous sommes fixés dans la PPE. Nous vous avons fait distribuer un document dans lequel nous détaillons les indicateurs dans un tableau. Vous ne trouverez nulle part ce tableau, car on ne compile nulle part l'ensemble des objectifs et leur niveau de réalisation. Je sais que ce sujet vous a été remonté lors des précédentes auditions, donc nous ne nous y attarderons pas, mais il y a un problème de pilotage des objectifs, et c'est peut-être le premier frein à la transition énergétique que l'on pourrait évoquer.
Nous distinguons quatre grandes catégories de freins : les freins réglementaires, les freins économiques, les freins sociologiques et les freins techniques.
Je commencerai par vous présenter les freins réglementaires, puis Mme Hakwik vous présentera les autres catégories.
Sans revenir sur ce qui a déjà été dit, il est possible de s'attarder sur la complexité pour passer à l'acte dans la rénovation énergétique. Une illustration que j'aime rappeler est qu'aujourd'hui, nous comptons six aides au niveau national, distribuées par six canaux différents : le CITE, distribué par Bercy ; les CEE, distribués par des entreprises privées ; l'éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ), distribué par des banques privées ; la TVA à 5,5 % distribuée, si je puis dire, par le professionnel qui vient faire les travaux ; le chèque énergie distribué par le ministère de la transition énergétique et les aides distribuées par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH). Ces six aides et six canaux de distribution s'appliquent à six formats d'éligibilité. Il n'y a pas forcément de cohérence dans ce qui est éligible à ces aides. On parle beaucoup des chaudières au fioul en ce moment : elles sont éligibles aux certificats d'économie d'énergie, mais plus au CITE depuis juillet.
Autre exemple des difficultés rencontrées par les ménages pour s'y retrouver, il faut passer par des processus et des guichets différents pour obtenir ces aides. Pour obtenir les CEE, il faut faire la demande avant d'avoir fait réaliser un devis par un professionnel. Pour les aides de l'ANAH, c'est après le devis et avant les travaux. Pour un CITE, c'est après les travaux… Selon l'étude de l'ADEME, 40 % des ménages ne savent pas qu'ils ont droit à des aides pour réaliser des travaux d'économies d'énergie. Aujourd'hui, articuler les différentes démarches représente un véritable enjeu, et nous avons une proposition très concrète à cette fin : à l'occasion de la transformation prochaine du CITE en une prime pour la transition énergétique, articuler cette aide avec les CEE. Une passerelle automatique pourrait être créée, de manière à ce qu'une personne qui demande le CITE de facto les CEE, ce qui permettra d'harmoniser l'instruction de ces aides et donnera de la lisibilité au consommateur.
Le deuxième frein réglementaire est le manque de lisibilité à long terme sur les dispositifs. Les objectifs sont fixés sur cinq ans par la PPE, mais la visibilité sur les dispositifs est d'un, de deux ou de trois ans. Trois ans pour les CEE, six mois pour les aides comme le CITE pour les fenêtres, puisque l'aide a été supprimée partiellement l'année dernière, puis totalement à partir de juillet, et qu'elle sera certainement réintroduite à partir du 1er janvier 2019… Une plus grande constance dans l'application des dispositifs est nécessaire.
Le troisième point est l'incomplétude de la réglementation, qui a été évoquée avec la question du décret tertiaire. Nous avons d'autres exemples tels que le carnet numérique du logement ou l'affichage déporté dans les logements pour les ménages en situation de précarité. Il y a là un enjeu d'efficacité des politiques publiques, qui nécessite que l'administration rende compte au Parlement de l'application des réglementations.