M. Saint-Martin intervient fort à propos. Souvenez-vous qu'il avait déposé un amendement au projet de réforme constitutionnelle pour imposer un délai de quarante jours entre le dépôt du projet de loi et son examen en séance publique. Quarante jours contre vingt-et-une heures, et de fait zéro !
Les choses ne s'arrêtent pas là puisque, entre la fin de la réunion de la commission des finances et la séance publique, nous disposions de vingt-quatre heures, sachant que de nombreux autres textes étaient en cours d'examen.
Et votre collègue, monsieur le ministre, de nous expliquer combien cette nouvelle forme de projet de loi de finances rectificative était formidable, que nous n'avions jamais vu cela depuis 1985, tout simplement parce qu'il n'y a plus de décret d'avance ! De qui se moque-t-on ? Je suppose que le texte de la loi organique relative aux lois de finances figure en bonne place sur votre table de chevet. De mémoire, selon son article 13, les projets de décret d'avance sont soumis aux commissions des finances de l'Assemblée et du Sénat pour que nous rendions un avis. Et il ne s'agit pas d'un avis pour faire plaisir ! Souvenez-vous que nous avons réussi à faire modifier, sous l'ancienne majorité, le projet de décret sous le feu des protestations qu'avaient suscitées les mesures de réduction des crédits, jusque sur les bancs de la majorité de l'époque.
Par ailleurs, le décret d'avance est ratifié dans la loi de finances rectificative suivante. Prétendre que l'on renforce les droits du Parlement grâce à un projet de loi de finances rectificative qui évite tout décret d'avance, c'est se moquer du monde. Quiconque connaît la loi organique sait que l'argument ne peut valoir !
J'en viens à un point fondamental, monsieur le ministre. Vous avez empêché le Parlement de légiférer à un point tel que l'opposition, dans toute sa diversité, a décidé de saisir le Conseil constitutionnel. Notre groupe s'associera à ce recours pour qu'il soit répondu à cette question : peut-on réduire à néant le droit d'amendement du Parlement par des délais rendant impossible leur dépôt ? Voilà où vous nous avez conduits, sur tous les bancs.
Ne vous étonnez pas du sort qui sera réservé, en janvier, au projet de réforme constitutionnelle. Vous n'avez aucune majorité pour réformer la Constitution. Si vous voulez prendre une nouvelle claque, après celle de juillet, continuez ainsi. Je l'ai bien répété à M. le ministre : vous êtes certains de vous planter. La réforme constitutionnelle sera un échec car vous voulez limiter encore davantage le droit d'amendement, accréditant ainsi la thèse selon laquelle vous voudriez vous passer du Parlement. On voit où cela vous mène : un pays en ébullition qui se révolte, un Premier ministre qui refuse de bouger et un Président qui s'y résout. Depuis vingt-six ans que je suis député, j'en ai connu, de tels épisodes. Un Premier ministre « droit dans ses bottes », et un Président qui lui intime l'ordre de ne plus l'être.
Pour l'heure, nous attendons avec impatience l'amendement annoncé par le Président de la République, concernant la fiscalité pétrolière. Si j'ai bien compris, on nous demandera de déléguer notre pouvoir législatif en matière de fixation de la fiscalité pétrolière au Gouvernement.
Dans quelle République sommes-nous ? S'agit-il encore d'une République démocratique et parlementaire, dans laquelle les parlementaires peuvent jouer leur rôle ? J'espère que vous répondrez à cette délicate question. Une nouvelle fois, nous saisirons le Conseil constitutionnel de ce sujet.
Quant au fond, ce texte pose trois problèmes.