« Contre le cancer, nous devons non seulement rassembler toutes les énergies disponibles mais savoir les organiser, les articuler avec pertinence ». Ces mots ont été prononcés lors de la cérémonie de remise du prix fondation ARC, le 5 avril 2018. Ces mots, ce sont les vôtres, madame la ministre.
Alors que nous entamons l'examen de la proposition de loi de notre collègue Nathalie Elimas sur la prise en charge des cancers pédiatriques, je veux croire que ces mots prennent aujourd'hui une résonance toute particulière pour chacun et chacune d'entre nous, quelle que soit notre place dans l'hémicycle. Avec le débat que nous engageons sur cette question si douloureuse, si urgente, l'occasion nous est donnée de faire collectivement oeuvre utile et d'apporter des réponses concrètes pour donner les mêmes chances à tous, partout en France, pour guérir du cancer.
Pour le groupe Libertés et Territoires, l'excellence de notre système de santé ne peut se mesurer qu'à sa capacité à garantir un accès équitable à des soins de qualité et à l'innovation thérapeutique. Il s'agit, du reste, de la philosophie du plan cancer 2014-2019 dont la priorité est de réduire les inégalités et le préjudice de perte de chance, et de développer les médicaments innovants.
Comme vous tous ici, les membres de notre groupe ont une conscience aiguë de la gravité du sujet. Quelque 350 000 nouveaux cas de cancers sont déclarés chaque année, parmi lesquels 2 500 à 3 500 enfants sont concernés ; 400 à 500 meurent de cette terrible maladie, ce qui en fait la deuxième cause de mortalité pour les enfants de moins de quinze ans. Derrière ces chiffres, nous le savons, ce sont des vies qui basculent, en une seconde, dans la désespérance ; ce sont des familles accablées auxquelles des équipes médicales sont contraintes d'annoncer qu'il n'existe pas de traitement à la maladie de leur enfant ; ce sont des centaines d'enfants qui se battent avec dignité et courage pour vivre.
Nous en avons tous conscience, la maladie est toujours un drame, quel que soit l'âge auquel elle frappe. Nous savons aussi que ce drame suscite une émotion extraordinairement vive lorsqu'il touche des enfants. Vous le savez tout aussi parfaitement, madame la rapporteure, pour avoir longuement rencontré et écouté les représentants des associations de patients, comme Imagine for Margo, Wonder Augustine, l'Union nationale des associations de parents d'enfants atteints de cancer ou de leucémie, l'UNAPECLE, ainsi que l'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis, l'UNAPEI. Nous rencontrons, nous-mêmes, dans nos permanences, des personnes concernées – j'ai, à cet instant, une pensée pour Sandrine et pour l'association Timéo notre héros, Timéo, petit garçon parti rejoindre les étoiles à l'aube de ses sept ans.
Oui, voir un enfant partir avant ses parents est sans doute la plus grande de toutes les injustices, une injustice contre laquelle tout en nous s'élève et proteste. Pourtant, comme l'a montré l'intervention de notre collègue Nathalie Elimas, nous pouvons et nous devons de faire mieux dans la lutte contre les cancers pédiatriques, et plus particulièrement sur trois aspects.
Le premier est celui du financement des moyens alloués à la recherche en cancérologie pédiatrique, qui sont sans doute encore insuffisants, en dépit des avancées récentes réalisées lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2019. Il faut surtout poser la question de la coordination entre l'intervention des nombreux acteurs, publics ou privés, dans le financement de la recherche en cancérologie, pédiatrique ou générale. Cette question est cruciale puisque intrinsèquement liée à la capacité des différents acteurs à mutualiser les moyens, à réunir les meilleures expertises et à accélérer les recherches sur les cancers rares. C'est l'objet de l'article 1er du texte, qui permet l'élaboration d'un plan fixant les grandes orientations de la recherche en cancérologie, ce qui permettra de préciser les moyens consacrés à la recherche sur les cancers pédiatriques. Son pendant, l'article 2, entend faciliter la participation des enfants et des adolescents aux essais cliniques. Je tiens à vous remercier, madame la rapporteure, d'avoir répondu avec précision aux inquiétudes dont j'avais fait part en commission en la matière.
Le deuxième aspect sur lequel nous devons nous pencher avec attention est le rôle des proches et des professionnels de santé face à la maladie de l'enfant. Face au bouleversement profond que constitue le cancer d'un enfant dans la vie quotidienne de ses proches, les dispositifs existants, qui permettent aux parents d'obtenir de leur employeur un congé de présence parentale pour pouvoir être aux côtés de leur enfant malade et l'allocation journalière de présence parentale, ne constituent pas des réponses suffisantes. La durée du congé et de l'allocation, qui est actuellement de trois cent dix jours, n'est pas adaptée aux pathologies cancéreuses des enfants qui vivent de plus en plus longtemps avec leur maladie et leur traitement, parfois plusieurs années, de rechute en rechute. Il convient de l'allonger et notre groupe soutient cette mesure prévue par l'article 3.
Il faut, en outre, mieux former les professionnels de santé qui, malgré leur engagement, leurs compétences, leur humanité et leur écoute sont parfois démunis lorsqu'il s'agit d'annoncer un diagnostic, de prendre en charge la douleur des enfants, ou de réaliser leur suivi psychologique. En la matière, les inégalités territoriales sont frappantes, et il est, par conséquent, nécessaire d'aller vers une obligation de formation continue des personnels infirmiers et médicaux sur tout le territoire. L'article 4, qui prévoit un tel dispositif, a été supprimé en commission et notre groupe proposera naturellement son rétablissement.