Intervention de Agnès Buzyn

Séance en hémicycle du jeudi 29 novembre 2018 à 15h00
Prise en charge des cancers pédiatriques — Article 4

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

Cet amendement part d'un constat. Des familles ont vécu des expériences extrêmement traumatisantes, du fait d'une mauvaise prise en charge. En tant que parlementaires, vous vous faites l'écho du besoin ressenti sur le terrain, et je le comprends.

Cependant, je crains que la réponse que vous proposez soit inappropriée. Vous serez juges, bien évidemment.

Les trente-et-un centres autorisés à prendre en charge les cancers des enfants sont soumis à une autorisation, qui repose sur la formation des professionnels, les bonnes pratiques, les référentiels. Ils sont évalués par l'Institut national du cancer ou la Haute autorité de santé par l'intermédiaire des questionnaires de satisfaction remplis par les patients.

Les professionnels qui interviennent dans ces services sont déjà formés. Il est probable que les parents se soient trouvés confrontés à une incompréhension due au manque d'empathie ou d'écoute, de temps dédié. Vous voulez résoudre ce problème en imposant une formation à des professionnels qui sont déjà formés mais qui n'appliquent pas les recommandations qu'ils ont reçues.

Je m'interroge sur l'opportunité de renforcer cette obligation de formation par la loi, alors qu'elle existe déjà, du fait du processus de délivrance des autorisations. Malgré cette formation, le résultat n'est pas satisfaisant.

Je ne suis pas certaine que vous apportiez la bonne réponse à une problématique qui est réelle. Il faut sans doute instaurer des temps dédiés dans les discussions entre les professionnels lorsqu'ils prennent en charge un malade, au moment du diagnostic, de la rechute, de l'intervention. Il serait également nécessaire d'accentuer l'évaluation de ces services autour de la prise en charge de la douleur afin de faire évoluer les pratiques. Il faudra certainement vérifier que ces services disposent bel et bien d'un référentiel douleur connu de l'ensemble des professionnels.

Vous voulez imposer, par la loi, une formation à des professionnels qui, de facto, sont déjà formés, sinon ils n'auraient pas le droit d'exercer dans les centres où ils travaillent.

Je suis assez troublée. Qui plus est, cette proposition ne relève pas de la loi mais du règlement. Ainsi, quand un problème spécifique se pose dans les hôpitaux et qu'il nécessite une formation, la Direction générale de l'offre de soins adresse une circulaire à tous les établissements pour axer en priorité la formation sur un sujet particulier, par exemple la douleur.

De la même manière, le ministre, par décret, peut parfaitement inviter tous les établissements prenant en charge les enfants à porter une attention particulière au soulagement de la douleur.

Telle qu'il est rédigé, cet amendement ne permet pas de poser la bonne question, qui est celle du ton avec lequel les médecins s'adressent aux familles, de leur empathie.

Nous réformons les études de médecine pour diversifier les profils des professionnels, nous proposons des enseignements transversaux pour les internes, dont font partie le traitement de la douleur et les soins palliatifs. Nous voulons que les professionnels de santé que nous recrutons aient des moments de formation en commun autour des sujets de l'empathie et de l'écoute.

Votre amendement apporte une mauvaise réponse à une excellente question. Il ne règle rien d'un sujet qui relève du domaine réglementaire. Avis défavorable.

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