Parallèlement, par lassitude ou entraînés par un individualisme forcené, nombre de nos concitoyens ont abandonné l'engagement collectif. On ne croit plus en Dieu, ni au ciel, on ne s'engage ni dans un syndicat, ni dans un parti politique, on se réfugie dans sa famille, et encore, elle est souvent réduite à portion congrue, on chérit ses enfants mais on abandonne ses vieux parents. Nous avons laissé se déliter les liens sociaux et s'affaiblir tout ce qui pouvait nous rassembler. Nous sommes de plus en plus seuls.
Notre système bancal aurait pu encore longtemps faire illusion si nous n'avions été rattrapés par des crises économiques, sociales et environnementales d'une ampleur insoupçonnée. À coup d'endettement pharaonique, de création monétaire, de délocalisations d'entreprises et de concurrence déloyale, nous avons stimulé notre croissance, sans avoir, toutefois, jamais réussi à endiguer un chômage endémique. Certains économistes pensent d'ailleurs que le plein emploi est une illusion et le FMI explique qu'une autre crise, encore plus grave, s'annonce.
Parce que la plus grande puissance économique du monde, dans laquelle nous vivons, l'Europe, ne s'est pas transformée en puissance politique, comme le rêvaient nos pères, nous n'avons jamais rien régulé et les inégalités n'ont cessé de croître. Les grands groupes se délocalisent et deviennent insaisissables, les riches n'ont jamais été aussi riches, les pauvres aussi pauvres, et la Méditerranée, berceau de la civilisation, est devenue le tombeau des migrants qui s'y noient.