Monsieur le président, chacun prononce son intervention comme il croit devoir le faire. Celle-là est l'une des plus importantes de ma vie !
Chère France, j'ai chanté dans cette assemblée lorsqu'on voulait en finir avec les services publics ; j'ai jeûné jusqu'à entrouvrir les portes de la mort, alors que nous avions perdu 500 000 emplois dans nos entreprises en dix ans ; j'ai parcouru 6 000 kilomètres à pied en neuf mois quand j'ai senti que le lien social et humain, ce que nous avions de plus cher, disparaissait et que nous le perdions définitivement de vue, lorsque j'ai senti que la civilisation à laquelle notre pays a tant apporté retournait vers l'animalité dont nous sommes issus.
Oui, chère France, tu aspires à ce que l'homme retrouve l'homme. Tu n'as jamais accepté que l'on te torde ; tu n'as jamais accepté que l'on dise à ta place ce que tu voulais. Tu nous as désignés pour te représenter dans la maison du peuple, parce que tu es le peuple souverain. Tu as voulu être le pays de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Tu as ainsi gagné une universalité qui a tant de fois effaré le monde. Je le dis à nos voisins et amis : qu'ils ne se réjouissent pas trop, et qu'ils ne rient pas trop fort, car ils ne savent pas ce qui pourrait les attendre. Parce que le mal que tu dénonces, cher gilet jaune, dans tes jolis ronds-points, au bord de nos routes, est bien le même que celui qui mine l'Europe et le monde civilisé.