Intervention de Fabrice Brun

Réunion du mercredi 4 octobre 2017 à 16h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFabrice Brun, rapporteur :

Mes chers collègues, j'observe que l'examen de ce texte dont l'objet est très circonscrit nous conduit rapidement à évoquer l'ensemble de la politique de l'eau. Ce débat est fort intéressant, mais nous aurons, je suppose, d'autres occasions de réfléchir à cette question. Pour le moment, nous devons nous recentrer sur l'enjeu de la proposition de loi, car les élus de terrain attendent que nous apportions cette correction à la loi NOTRe.

Je sais gré à Olivier Dussopt d'avoir rappelé le mécanisme de représentation-substitution. Son exposé a été d'une grande clarté sur un sujet pourtant complexe. Le constat d'échec que nous dressons est celui, non pas de la loi NOTRe dans son ensemble, mais de certaines de ses dispositions. Il faut respecter le principe de réalité, et il a eu raison de souligner combien il était urgent de résoudre les problèmes rencontrés sur le terrain.

Monsieur Balanant, j'ai apprécié votre analyse chiffrée, mais une analyse qualitative m'intéresse davantage qu'une approche quantitative. Certes, on nous a informés qu'un groupe de travail serait chargé de réfléchir à l'application de la loi NOTRe mais, encore une fois, j'appelle votre attention sur l'urgence du problème. Par ailleurs, ce n'est pas parce que l'on change de gouvernance que l'on va modifier la localisation des stations d'épuration. De manière générale, il faut se méfier des analyses « macro » et statistiques sur ce sujet qui nécessite que l'on soit au plus près des territoires.

La mutualisation, Jean-Pierre Vigier l'a rappelé, existe déjà. Il faut bien comprendre que cette proposition de loi n'a pas pour objectif de défendre l'organisation communale de la gestion de l'eau. Dans mon bassin-versant, au cours des dernières décennies, nombre de syndicats des eaux se sont organisés, et c'est heureux ! Mais, parfois, le périmètre de certains bassins-versants ne correspond absolument pas à celui de l'organisation administrative. Le maillage actuel est satisfaisant, même si l'on peut estimer, par ailleurs, que les opérateurs sont trop nombreux.

Je remercie Mme Battistel pour son témoignage concernant la belle montagne iséroise. Encore une fois, la mutualisation est une bonne idée, mais, elle a eu raison de le rappeler, elle se heurte parfois au principe de réalité. La confiance dans les élus et la nécessité de leur laisser le libre choix, sur lesquelles elle a insisté, sont au coeur de ce texte. Par ailleurs, peut-être ne l'ai-je pas suffisamment souligné mais, je suis d'accord avec elle, les dispositions de la loi NOTRe risquent de peser sur le coût de l'eau. Je la remercie également d'avoir rappelé que, dans beaucoup de communes rurales qui ne disposent pas de personnels administratifs, ce sont les élus eux-mêmes qui s'occupent de la gestion de l'eau. Je connais nombre d'adjoints qui sont en fait des fontainiers. On a dit qu'ils étaient indemnisés et que cela représentait un coût, mais 90 % d'entre eux sont bénévoles. J'ajoute que les mêmes règles de contrôle et d'analyse s'appliquent à ces petites communes, et que ce système fonctionne.

Madame Chalas, les chiffres que vous avez cités sont intéressants. Vous avez indiqué que 22 % des communautés de communes et d'agglomération exerçaient déjà la compétence « eau potable » et que 38 % d'entre elles exerçaient la compétence « assainissement collectif ». Toutefois, je rappelle que certains de ces transferts sont intervenus avant le vote de la loi NOTRe, même si celle-ci a accéléré le processus. De plus, ce sont les transferts les plus faciles, et non ceux qui correspondent aux situations complexes dont nous discutons, qui ont été réalisés. En tout état de cause, nous proposons, non pas un détricotage, mais une correction de la loi NOTRe car, en matière d'eau et d'assainissement, il est particulièrement important de prendre en compte les caractéristiques du terrain. Comme l'a indiqué Guillaume Larrivé, toutes vos propositions sont évidemment les bienvenues : le propre du débat législatif n'est-il pas d'amender un texte ?

Monsieur Molac, vous avez raison, tout est possible, mais les choses sont souvent complexes. Votre propos illustre, du reste, la grande diversité à laquelle nous sommes confrontés, car je ne suis pas certain que, dans le Morbihan, la situation soit la même que dans la Haute-Loire ou le Lot, ne serait-ce que du point de vue de la mobilisation de la ressource en eau.

Monsieur Boudié, les élections sénatoriales sont terminées. Si je reprends à mon compte la proposition de loi adoptée par le Sénat, c'est parce que 75 maires de ma circonscription demandent que le transfert des compétences « eau » et « assainissement » reste optionnel. Vous avez évoqué l'amendement du Gouvernement qui est à l'origine de ces dispositions. Permettez-moi de rappeler que cet amendement est arrivé tard dans la nuit, sans être accompagné d'une étude d'impact et sans avoir été examiné par la commission, alors qu'il portait sur un sujet très important et qu'il a eu des conséquences extraordinaires sur le terrain, comme nous pouvons le constater aujourd'hui.

M. Bernalicis a estimé que le texte allait dans le bon sens ; je me félicite qu'on puisse examiner cette proposition de loi sans prisme idéologique, en s'en tenant au principe de réalité. J'appelle néanmoins son attention sur le fait que si l'on étend trop le champ de la proposition de loi, on réduit ses chances d'aboutir. De fait, elle n'a pas vocation à régler tous les problèmes liés à l'eau, et ils sont nombreux : à l'échelle mondiale, plus de 2 milliards d'individus n'ont actuellement pas accès à l'eau potable. Si nous voulons être efficaces, il faut nous en tenir à l'objet de la proposition de loi et à ses quatre articles.

M. Schellenberger nous a fait part de son expérience d'élu local chargé de ces questions. Il est important qu'il ait souligné l'urgence de cette mesure et rappelé, même si ce n'est pas l'objet de la proposition de loi, la complexité de la GEMAPI alors que l'échéance est fixée au 1er janvier 2018. Aujourd'hui, en effet, les élus disent qu'ils ne savent pas faire et qu'ils ne savent pas comment financer. Le principe de subsidiarité, sur lequel il a insisté, est au coeur de notre démarche.

Monsieur Warsmann, vous avez raison, les seuls élus légitimes en la matière sont ceux qui sont sur le terrain. Et il est vrai que je ne peux m'empêcher de voir, derrière cette volonté affichée d'assurer la stabilité juridique, l'intervention d'une technostructure qui, sur cette question, devrait prendre un peu de recul et laisser les acteurs de terrain travailler.

Monsieur Rebeyrotte, vous faites partie de ceux qui veulent maintenir la loi NOTRe à tout prix. Or, il me semble que le législateur peut s'autoriser à apporter des correctifs à une loi lorsqu'il le juge nécessaire. Encore une fois, il ne s'agit pas de remettre en cause la loi NOTRe mais de la corriger. Notre mission, faut-il le rappeler, consiste également à évaluer les politiques publiques. Or, la loi a été promulguée il y a deux ans et, s'agissant des compétences « eau » et « assainissement », les problèmes restent entiers sur le terrain. Vous invoquez des principes, c'est votre droit ; pour ma part, je m'en tiens au principe de réalité.

Madame Pires Beaune, je vous remercie pour votre bon sens paysan – et, dans ma bouche, c'est un compliment. Vous posez la bonne question : pourquoi détruire ce qui marche bien ? Ou pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? Par ailleurs, vous avez rappelé un élément très important. J'ai entendu des orateurs de tous les groupes insister sur la nécessité de maintenir des investissements importants en faveur de la qualité de l'eau et du traitement des eaux usées. Or, vous avez raison, je ne suis pas certain que le meilleur moyen d'y parvenir soit de ponctionner 400 millions d'euros sur le budget des agences de l'eau car, n'en doutez pas, cette mesure aura un impact important sur le financement des investissements au coeur des territoires, qu'ils soient réalisés par les communautés de communes ou par les communes.

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