Madame la ministre, madame la présidente, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui le projet de loi relatif à la création de l'AFB-ONCFS – qui pourrait bien s'appeler OFB –, modifiant les missions des fédérations des chasseurs et renforçant la police de l'environnement.
J'ai envie de dire : enfin ! Quel progrès de voir ce beau projet de rapprochement de l'AFB et de l'ONCFS concrétisé. Je souhaite en préambule témoigner de mon enthousiasme devant ce texte.
La loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages avait permis la création de l'Agence française pour la biodiversité, le 1er janvier 2017, par la fusion de quatre établissements publics. Cette création répondait à la nécessité criante de préservation et de restauration de la biodiversité. Il était indispensable d'enfin placer cette problématique sur le même plan que celle de la lutte contre les changements climatiques, qui constitue l'autre pilier de la politique environnementale.
L'ambition initiale de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages de créer une grande agence intégrant l'ONCFS, n'avait pu aboutir en 2016. Le dialogue avec le monde cynégétique n'a fort heureusement jamais cessé et le Gouvernement a déposé le projet de loi que nous examinons. Il convient de s'en réjouir.
La réunion de l'AFB et de l'ONCFS au sein d'une nouvelle agence interviendrait donc au 1er janvier 2020. Ce projet vise à accroître l'efficacité des politiques de l'eau et de la biodiversité par une meilleure connaissance, surveillance, préservation et gestion. Il permettra de renforcer la police de l'environnement sur le terrain, au plus près des besoins, et de l'adosser à une expertise scientifique et technique reconnue. Cet opérateur puissant comptera près de 3 000 agents répartis sur tout le territoire. L'AFB dispose, en 2018, d'un budget de près de 289 millions d'euros et réunit 1 227 personnels sous plafond dont 846 fonctionnaires, et près de 400 contractuels ; de son côté, l'ONCFS, créé en 1972, dispose en 2018 d'un budget de 117 millions d'euros et réunit 1 474 effectifs sous plafond d'emploi, dont 1 178 titulaires et près de 400 contractuels. Nous devrons particulièrement veiller à accompagner ces personnels.
Cette fusion, désormais rendue possible, trouve sa place dans le cadre des accords sur la chasse intervenus cet été. Ils ont prévu la fusion de l'ONCFS et de l'AFB, en parallèle de la baisse des redevances cynégétiques – prévue par le PLF pour 2019 – et de la mise en oeuvre de la gestion adaptative des espèces, qui consiste à ajuster les prélèvements de certaines espèces sauvages à l'état de conservation de leurs populations.
L'article 1er prévoit la création d'un nouvel établissement public. Sans revenir sur la présentation que vient de faire Mme la ministre du futur établissement, je tiens à rappeler que cette création résulte d'une fusion des deux opérateurs et non d'une intégration de l'ONCFS au sein de l'AFB.
D'une manière générale, l'article 1er a pour objectif légitime de limiter l'intervention du législateur à son strict domaine de compétence et d'avoir une loi claire et concise. Je souhaite également que le texte puisse manifester une ambition politique forte et une volonté claire pour la politique de la biodiversité dans son ensemble. Dans ce cadre, tout en mettant mieux en valeur les missions de l'ONCFS, il me semble important de conserver dans la loi certaines missions de l'AFB qui feront la richesse de l'intervention du futur établissement en matière de biodiversité, particulièrement dans les domaines suivants : restauration de la biodiversité ; lutte contre la biopiraterie ; suivi du dispositif d'accès aux ressources génétiques et au partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation – le fameux APA ; suivi de la compensation écologique – avec le principe éviter-réduire-compenser (ERC), et de la problématique de l'artificialisation des sols ; élaboration de la stratégie nationale pour la biodiversité et suivi de sa mise en oeuvre ; champ d'intervention du futur établissement outre-mer et la représentation des outre-mer, qui abritent plus de 80 % de la biodiversité ; possibilité de création d'agences régionales de la biodiversité (ARB) ou d'offices régionaux de la biodiversité (ORB).
Alors même que la biodiversité commence tout juste à être bien identifiée par les citoyens et l'ensemble des acteurs de terrain que nous souhaitons mobiliser, il convient d'être attentif à ne pas déstabiliser les dynamiques créées. Nous reviendrons aussi plus en détail sur les équilibres au sein du conseil d'administration dans le cadre de l'examen de l'article 1er.
L'article 2 renforce les pouvoirs des inspecteurs de l'environnement dans le cadre de leurs missions de police judiciaire. Ces évolutions concernent les agents du futur établissement mais aussi, plus largement, l'ensemble des inspecteurs de l'environnement. En dépit du renforcement de leurs pouvoirs, les inspecteurs de l'environnement demeurent encore contraints, dans l'exercice de leurs missions, de recourir à des officiers de police judiciaire (OPJ) pour des actes d'enquêtes considérés comme simples. C'est la raison pour laquelle cet article étend aux inspecteurs de l'environnement certaines prérogatives actuellement réservées aux OPJ : pouvoir de réquisition et mise en oeuvre des mesures alternatives aux poursuites sont les deux apports majeurs de ce texte. L'article 2 refond le cadre applicable à la remise dans leur milieu naturel des animaux et végétaux saisis par les inspecteurs lors d'une infraction ; il me paraît toutefois nécessaire de proposer quelques adaptations sur lesquelles nous reviendrons lors de l'examen de cet article.
L'article 3 prévoit plusieurs mesures relatives à la chasse en lien avec la création du nouvel organisme. Tout d'abord, il instaure une obligation, pour la Fédération nationale et les fédérations départementales des chasseurs, de mener des actions concourant à la protection de la biodiversité. Les actions importantes qu'elles conduisent doivent être reconnues et valorisées ; le projet de loi prévoit ainsi qu'elles y consacrent un montant minimum de cinq euros par chasseur ayant validé un permis de chasser. Le montant exact est fixé par voie réglementaire. Le projet de loi transfère également la mission de délivrance de l'autorisation de chasser accompagné aux présidents des fédérations des chasseurs. Parallèlement, il instaure une obligation de formation de l'accompagnateur. Par ailleurs, l'article 3 prévoit de transférer à la nouvelle structure la gestion du fichier central des permis délivrés, des validations et des autorisations de chasser, comme cela était le cas avant 2005, où la gestion était assurée par l'ONCFS.
Enfin, cet article créé pour les chasseurs une obligation de transmission des données de leurs prélèvements des espèces soumises à gestion adaptative. Ces données sont transmises aux fédérations départementales des chasseurs qui doivent les transmettre au fur et à mesure à l'OFB. La finalité de ce nouveau fichier est triple : mettre en oeuvre la gestion adaptative des espèces ; assurer son respect par la police de la chasse, en particulier le contrôle en temps réel du respect des quotas fixé par le ministère ; vérifier le respect de l'obligation de transmission des données de prélèvements par les chasseurs.
Suite à la création du nouvel office, l'article 4 transfère à titre gratuit l'ensemble des biens, droits et obligations de l'AFB et de l'ONCFS au futur établissement public.
L'article 5 assure le transfert des personnels des établissements fusionnés dans le nouvel établissement. Il traite de la situation statutaire ou contractuelle de certains personnels. Les personnels devront être accompagnés dans cette nouvelle transformation : c'est un point que je tiens à souligner puisque les personnels de l'AFB sont encore impliqués dans un processus de fusion qui dure, non seulement depuis deux ans, mais aussi depuis le début du processus législatif ayant conduit à la création de l'AFB. Les agents de l'ONCFS en charge de la police ont également été affectés ; je défendrai notamment un amendement demandant au Gouvernement d'examiner les possibilités de requalification d'ensemble des personnels de catégorie C en catégorie B et de progression des personnels d'encadrement vers la catégorie A. Ces évolutions sont indispensables au regard des responsabilités exercées, je peux en témoigner, comme bon nombre d'entre vous qui connaissent le travail de ces personnels.
L'article 6 prévoit les modalités de l'élection des représentants des personnels au conseil d'administration du futur établissement. L'élection devra intervenir au plus tard trois ans après la date d'entrée en vigueur de la présente loi.
L'article 7 prévoit les modalités de l'élection des représentants des personnels au comité technique et au comité d'hygiène.
L'article 8 opère les coordinations juridiques résultant de la création de cet établissement.
L'article 9 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance dans plusieurs domaines relatifs à la police administrative : procédures de contrôle administratif relatives à la police sanitaire ; cadre juridique relatif aux prélèvements d'échantillons ; modalités de recouvrement des amendes, astreintes et consignations administratives ; procédures de contravention de grande voirie affectant certains espaces naturels.
Enfin, l'article 10 prévoit les différentes dates d'entrée en vigueur des mesures contenues dans ce projet de loi.
Parallèlement, nous examinons, en discussion commune avec ce projet de loi, le projet de loi organique n° 1401 sur la nomination de la direction générale du futur établissement devant les commissions compétentes des deux assemblées parlementaires. Je me réjouis du choix effectué par le Gouvernement de faire entendre par les commissions du développement durable des deux assemblées le directeur général – ou la directrice générale – qui aura la charge d'assurer la mise en oeuvre concrète de la politique de l'établissement sur le terrain. Il me paraît donc nécessaire que la personne proposée pour cette fonction soit entendue par les parlementaires.