La reconnaissance du rôle des proches aidants apparaît aujourd'hui comme une exigence majeure, de plus en plus cruciale à mesure que le phénomène de vieillissement de notre société s'amplifie.
Le contexte social mais également économique dans lequel nous évoluons est central. Tenant compte des dimensions démographique, économique et sociale, ce texte nous permet de nous interroger sur les réponses à apporter à la perte d'autonomie et sur les politiques publiques menées pour répondre aux besoins des personnes âgées et de leurs familles.
Bien sûr, il ne s'agit pas de s'intéresser uniquement aux personnes âgées elles-mêmes mais d'articuler au mieux l'intervention de la puissance publique et celle de la sphère familiale qui a toujours été, et aujourd'hui plus que jamais, le pivot de l'accompagnement des personnes âgées en perte d'autonomie.
C'est dans le cadre de cet équilibre que le congé de proche aidant doit permettre de s'occuper d'une personne handicapée ou faisant l'objet d'une perte d'autonomie d'une particulière gravité. L'intervention publique devient indispensable pour faire face à l'augmentation des besoins des familles.
La législation doit pouvoir intégrer la problématique de la reconnaissance du statut des personnes ayant décidé d'aider leurs proches les plus âgés, les personnes les plus dépendantes. En reconnaissant le statut des proches aidants, en leur accordant des droits à congés, l'État remplit ainsi l'une de ses missions essentielles, celle de garantir des droits économiques et sociaux à chacun dans notre société. Ce qui fait de la prise en charge des personnes âgées en perte d'autonomie un enjeu de politique publique, c'est le fait que les aidants potentiels sont de moins en moins disponibles pour assurer leurs tâches de soins. Il nous faut réfléchir ensemble à cette moindre disponibilité des aidants familiaux, qui est en partie liée à l'évolution de la société.
Dans le contexte que nous connaissons toutes et tous, nous ne pouvons supporter l'idée de faire peser le financement d'une indemnité de proche aidant sur une surcote de 1,7 % appliquée à l'ensemble des contrats d'assurance comme vous le proposez. Comme l'a affirmé le Premier ministre, la colère exprimée par le mouvement des gilets jaunes, « c'est la colère de la France qui travaille dur, et qui peine à joindre les deux bouts, la colère des Français qui sont le dos au mur, celles aussi des mères de famille qui élèvent seules leurs enfants. Cette colère prend sa source dans une profonde injustice. »
Mes chers collègues, dans le cadre si complexe des manifestations de colère de nos citoyens à l'égard de la fiscalité et des prélèvements obligatoires, le financement des congés pour les proches aidants ne saurait reposer sur plus d'imposition pour les Français ainsi que le texte le propose. Au contraire, pour éviter une nouvelle mesure fiscale grevant le pouvoir d'achat de nos compatriotes, nous faisons le choix d'une prise en charge par le biais de l'excédent de la branche famille de la sécurité sociale.
Nous voulons que la prise en charge de la dépendance relève de la solidarité nationale permettant ainsi la création de nouveaux droits indispensables pour faire face à l'augmentation des besoins en la matière.
Rappelons que tous les territoires ne sont pas touchés de la même manière par le vieillissement : la gérontocroissance affecte inégalement les zones les plus rurales, qui sont susceptibles à terme d'être les plus exposées à ce phénomène, et dans lesquelles nos concitoyens les plus âgés risquent donc d'être délaissés par les services publics.
Dans ce contexte, le rétablissement du rôle de la famille, en lieu et place de ce que Pierre Rosanvallon appelle l'État hygiéniste, et donc la reconnaissance du rôle de proche aidant, doit permettre de répondre à cette exigence. La future loi sur le financement de la dépendance, qui doit être présentée avant la fin de l'année 2019, sera l'occasion de trouver ensemble les solutions aux problèmes posés par le rôle des aidants familiaux dans nos territoires et par les inégalités face au vieillissement.
Enfin, les discussions actuelles doivent nous amener à réfléchir à la consécration à terme d'un cinquième risque de la sécurité sociale. La logique des quatre risques – maladie, vieillesse, accidents du travail, famille – ouvre la possibilité d'un nouveau champ de protection sociale, dit le cinquième risque, celui de la dépendance, en vertu duquel serait reconnu un droit universel à une compensation personnalisée pour l'autonomie. La dépendance des personnes âgées devenant un enjeu de santé publique et une question sociale toujours plus prégnante, il est indispensable de s'interroger sur la création d'une nouvelle branche et de caisses dédiées au financement des prestations couvrant ce cinquième risque.
Au vu de ce qui précède, les aidants familiaux, qui font partie de l'évolution de la société, nous posent plusieurs défis sociaux et économiques, qui nous obligent, devant les Français. Nous agirons, dès 2019, à travers la future loi relative au financement de la dépendance, que notre Président appelle de ses voeux.