Depuis tout à l'heure, j'entends « obstruction » à la place de « démocratie » et « paralysie » à la place de « débat parlementaire ». Au moment où nous discutons du règlement de notre assemblée, il est important de rappeler notre conception du débat et de la démocratie au sein du Parlement.
L'article 91 du Règlement dispose : « La discussion en séance, en première lecture, d'un projet ou d'une proposition de loi ne peut intervenir avant l'expiration d'un délai de six semaines à compter de son dépôt ou de quatre semaines à compter de sa transmission. Ces délais ne s'appliquent pas [… ] si la procédure accélérée a été engagée. » Le présent amendement vise à supprimer l'exception, qui est aujourd'hui finalement devenue la règle.
Il s'agit simplement de respecter le temps du travail parlementaire et de refuser la précipitation permanente. Tout à l'heure, nous discutions des causes et des conséquences du recours à la procédure accélérée. Toujours est-il que cette précipitation est aujourd'hui banalisée, qu'elle est source d'inflation législative et qu'elle contribue à la mauvaise qualité de la loi. Présentée comme exceptionnelle, la procédure accélérée est aujourd'hui utilisée de façon abusive, en particulier sur les textes les plus controversés. J'avoue donc ne pas voir la pertinence de cette procédure, sauf pour corseter les débats. Par ailleurs, le débat parlementaire est perçu par l'exécutif comme une perte de temps : sa clôture rapide permet également de minimiser les réactions de l'opinion publique. Si vous n'en avez pas peur, prenez le temps de convaincre !
Cette dérive est malheureusement prévisible et très inquiétante pour notre démocratie, et ce ne sont pas les mots « paralysie » et « obstruction » que nous avons entendus ce soir, même prononcés avec humour par M. Lassalle, qui vont nous rassurer. L'amendement no 64 vise à éviter toute précipitation et à garantir la discussion des textes législatifs dans des délais somme toute raisonnables.