Intervention de Émilie Bonnivard

Séance en hémicycle du lundi 17 décembre 2018 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2019 — Article 13 (appelé par priorité)

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉmilie Bonnivard :

Créé en 2008 sous l'égide des pouvoirs publics français, après validation de la Commission européenne, Exeltium est un consortium dont l'objectif est de maintenir en France les cent usines de ses vingt-sept actionnaires et clients, tous industriels électro-intensifs. Pour assurer un prix de l'électricité compétitif, ces derniers ont investi près de 2 milliards d'euros dans le cadre d'un contrat avec EDF financé essentiellement par de la dette.

Mais l'article 13 vient déstabiliser ce dispositif vertueux, alors même qu'Exeltium ne peut pas pratiquer l'évasion fiscale que ses dispositions cherchent à combattre. Leur application coûterait au consortium 40 millions d'euros pendant la durée du contrat avec EDF mais, surtout, 30 millions sur les exercices 2019 à 2023, soit plus de trois fois ses fonds propres actuels. Cela revient à pratiquer un taux d'imposition réel stratosphérique, situé entre 95 % et 110 %.

Répercutée sur les clients, actionnaires électro-intensifs d'Exeltium, cette mesure correspond à une augmentation du coût du mégawatt de 1,5 euro. Or elle résulte d'une surtransposition de la directive, dite ATAD – anti-tax avoidance directive –, établissant des règles pour lutter contre les pratiques d'évasion fiscale qui ont une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur. L'article 13 limite en effet la déductibilité, pour une entreprise non-membre d'un groupe, à 3 millions ou 30 % de son bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement – EBITDA – , alors que la directive permet d'exclure de son champ d'application les emprunts contractés avant 2016. Pour éviter cette situation absurde, l'amendement tend donc à saisir cette possibilité offerte aux États membre, dont ne pourront bénéficier que les sociétés ayant emprunté massivement – plus de 100 millions d'euros – avant 2016 sans avoir d'actifs. À notre connaissance, aucune société n'est dans ce cas en dehors de celles qui participent à Exeltium.

Je tiens vraiment à appeler votre attention sur ce sujet, car ce qui est en jeu, c'est l'avenir de notre industrie électro-intensive. Soumise à une concurrence internationale très forte, elle représente 60 000 emplois en France, dont 28 000 emplois directs, mais est très sensible au prix du mégawatt.

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