Le projet de loi que nous examinons cet après-midi, qui vient approuver une décision du Conseil du 13 juillet 2018 modifiant l'acte portant élection des membres du Parlement européen au suffrage universel direct, ne change pas grand-chose au droit électoral français ni aux procédures selon lesquelles les prochains députés européens français seront élus le 26 mai 2019. Nous en sommes tous convenus en commission des affaires étrangères et vous l'avez rappelé, madame la ministre comme madame la rapporteure.
Au-delà de ce texte aux contours assez formels, notre débat nous permet d'aborder de nouveau certains des enjeux de la prochaine campagne électorale européenne. S'agissant, tout d'abord, de la question de la circonscription nationale unique, je tiens à rappeler très clairement l'opposition ferme et résolue du groupe Les Républicains à ce retour au découpage électoral en vigueur en 1979. Il nous paraît, en effet, de nature à creuser davantage encore le fossé existant entre les électeurs français et leurs élus européens, en tournant le dos aux principes de proximité et de territorialité, alors même que, nous le voyons à l'heure actuelle, ces principes ont besoin d'être remis au coeur de la gouvernance démocratique française.
La remise en cause de notre système de démocratie représentative est aujourd'hui spectaculaire et fracassante. Nous assistons à des dénonciations répétées de la déconnexion qui frapperait tous ceux qui détiennent une parcelle de pouvoir à l'échelon national. Cette situation devrait nous amener à reconsidérer d'un oeil très critique cette renationalisation du découpage électoral européen.
À l'heure où le Gouvernement cherche à renouer de manière précipitée le dialogue avec le peuple français, en organisant un grand débat national dont les maires, qui sont les élus locaux par excellence, devraient être, sinon les protagonistes, du moins les organisateurs, c'est un paradoxe que de vouloir distendre le lien entre les électeurs français et les élus européens en revenant à la circonscription nationale unique.
De plus, comme nous l'avons déjà rappelé, mettre fin au scrutin régionalisé, alors même que les régions se sont vu confier la gestion de la quasi-totalité des fonds structurels européens, est illogique. Nous avons fait une contre-proposition à ce retour en arrière, qui n'a pas eu l'heur de plaire au Gouvernement ni à sa majorité. Nous le regrettons.
Nous avons également souhaité remettre en cause le principe, que vous voulez instaurer, de listes européennes transnationales, qui peut sembler séduisant au premier abord, alors qu'il s'agit, à nos yeux, du type même de la fausse bonne idée. Croyez-moi, le système institutionnel européen ne manque pas d'experts bruxellois vivant dans la Brussels bubble, la bulle bruxelloise, complètement déconnectés des réalités du terrain, ne rencontrant plus les électeurs et les vrais gens et se contentant de colloques avec tel ou tel lobby ou telle ou telle fédération professionnelle. Quelle idée étrange que de vouloir créer de nouveaux experts de la bulle déconnectée, qui n'auraient plus l'obligation de rendre compte régulièrement, sur le terrain, aux électeurs, de l'accomplissement de leur mandat !
Je rappelle que le Conseil constitutionnel – ce n'est pas si fréquent que cela – a censuré la référence aux listes transnationales qui figurait dans la loi du 25 juin 2018.
C'est un paradoxe, de la part du Gouvernement et de la majorité parlementaire, que d'être favorables, de manière réitérée, aux listes transnationales européennes et, en même temps, tout à fait défavorables au principe de chef-de-filat européen – le système dit du Spitzenkandidat. Il est déconcertant et illogique de vouloir européaniser un débat tout en récusant une procédure qui nous semble être de nature à susciter un véritable débat démocratique européen.