Intervention de Bénédicte Peyrol

Séance en hémicycle du jeudi 20 décembre 2018 à 15h00
Mesures d'urgence économiques et sociales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBénédicte Peyrol :

Je souhaite donc revenir sur leur financement.

Tout d'abord, à mesures exceptionnelles, efforts exceptionnels – de la part de l'État, naturellement, mais aussi des acteurs économiques qui produisent le plus de richesses.

Plusieurs pistes ont été envisagées, notamment celle consistant à solliciter les plus grandes entreprises par le biais d'une contribution exceptionnelle ou un différé des charges patronales. Nous n'avons toutefois pas retenu ces choix que nous ne pensions pas être les bons, en ce qu'ils risquaient de pénaliser une activité économique déjà éprouvée par le contexte actuel, ou encore le coût du travail et donc la compétitivité et l'attractivité du pays. Le choix que nous faisons et qui nous semble être le plus juste est de demander un effort aux grandes sociétés qui réalisent plus de 250 millions d'euros de chiffre d'affaires. Pour elles, la diminution prévue du taux d'impôt sur les sociétés ne s'appliquera qu'en 2020.

Le Président de la République l'a rappelé : il est normal que les personnes qui s'enrichissent en France paient l'impôt en France. C'est la simple justice fiscale. Alors que notre pays dispose déjà d'un large arsenal juridique de lutte contre la fraude et l'évasion fiscale, il convient de rappeler que celui-ci a été amplement renforcé cette année avec la transposition de la directive anti-évasion fiscale – dite directive ATAD – , avec la loi relative à la lutte contre la fraude, dont la rapporteure a été Émilie Cariou, et l'assouplissement de la notion d'abus de droit. Nous veillerons à les faire appliquer correctement et à enrichir encore notre arsenal.

Pour augmenter nos recettes fiscales, il est toutefois essentiel d'aller chercher de nouvelles bases fiscales et donc de capter les nouvelles sources de création de valeur. L'instauration d'une taxe française sur les géants du numérique est, à cet égard, une bonne piste, que je préconisais comme plan B dans mon rapport de septembre. Nous devons néanmoins rester vigilants sur plusieurs points, sur lesquels nous aurons l'occasion de revenir, tels que, par exemple, le champ d'activité concerné – qui ne pourra pas reposer uniquement sur la publicité et l'activité en ligne, mais bien sur toutes les sources de création de richesses, comme les données qui nourrissent le modèle économique d'entreprises étrangères. Autre exemple, le choix de l'assiette, qui pourrait être différent d'un prélèvement sur le chiffre d'affaires tel que pensé initialement, afin que cette mesure ne soit pas que temporaire mais conforme au droit de l'Union européenne. Nous ne devons pas exclure de réfléchir à toutes les pistes potentielles pour moderniser notre modèle fiscal.

Enfin, je reviendrai sur l'impact de ces mesures sur nos équilibres budgétaires. Il est certes réel mais proportionnel aux moyens qu'engage l'État au nom de l'urgence économique et sociale. Les règles européennes ne sont pas un carcan, mais les conditions d'un débat démocratique sain et rigoureux. L'effort sur nos dépenses publiques ne peut pour autant être ménagé. Sur ce point, vous l'avez dit ce matin, madame Louwagie, et le président Woerth l'a rappelé : tout reste à faire. Le contexte nous l'impose et la volonté de notre majorité est réelle.

Le rapport « Cap 2022 » et l'approche nouvelle de recherche d'économies, non pas à partir de coups de rabot mais d'une stratégie claire par ministère, offrent l'occasion d'engager des transformations profondes de nos services publics. Je souhaite, à cet égard, remercier le Gouvernement, qui a entendu notre appel pour plus de justice mais aussi de vigilance sur nos deniers publics et accepté un travail en commun entre parlementaires et administration. Le futur projet de loi de finances rectificative et le prochain printemps de l'évaluation seront ainsi deux échéances importantes à suivre.

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