En dépit de ce que souhaiterait M. le rapporteur, je vais prendre le temps nécessaire pour le défendre. Nous sommes tous fatigués, je le sais, mais il lui faudra bien donner l'avis de la commission sur cet amendement ainsi que sur les six suivants, car ils ne sont pas identiques.
Avec plus de 51 milliards de dividendes versés en 2017, les grandes entreprises françaises sont celles d'Europe qui gavent le plus leurs actionnaires. Cette situation ne serait pas explosive si entre 2009 et 2016 elles n'avaient pas redistribué 67 % de leurs bénéfices aux actionnaires contre seulement 5 % aux salariés.
La rémunération des actionnaires étouffe de plus en plus les travailleurs, trop souvent payés à coups de lance-pierres alors que les détenteurs du capital sont choyés. Le rôle du législateur, justement, est de remédier à ces inégalités de traitement et il doit tenir tête à ceux qui accaparent la valeur afin de s'assurer d'une distribution équitable.
Pourtant, depuis le début de cette législature, vous n'avez de cesse de choyer les actionnaires et de supprimer les contraintes protégeant les salariés.
Par cet amendement, qui s'inscrit dans un contexte d'urgence économique et sociale, nous vous offrons la possibilité de voter une vraie mesure de justice sociale : il rend obligatoire le versement d'une prime exceptionnelle aux salariés dès lors que des dividendes sont versés aux actionnaires.
Si les dividendes sont la contrepartie d'une certaine fidélité dans l'apport en capital, la prime est, de son côté, la contrepartie du travail et, contrairement à l'apport en capital, le travail est un investissement corps et âme, une part de son temps et de soi que l'on apporte à l'entreprise.
La mesure que nous vous proposons est très modérée au regard du rééquilibrage qui serait nécessaire pour contrebalancer, en faveur des travailleurs, les effets des politiques menées au cours des années passées, mais c'est une mesure indispensable, réaliste et efficace qui, je n'en doute pas, retiendra votre attention.