J'en viens à l'état des lieux proprement dit. Comme le disait mon collègue co-rapporteur, nos armées ont d'ores et déjà développé des capacités spatiales complètes et crédibles, dont il nous faut souligner une spécificité : la France, peut-être davantage que d'autres puissances spatiales, a trouvé une organisation duale particulièrement efficiente.
Ces capacités spatiales, quelles sont-elles ? Commençons par nos satellites. Les armées en opèrent onze et ont accès à des capacités allemandes et italiennes d'imagerie par radar dans le cadre de partenariats, ainsi qu'au GPS et à des contrats commerciaux de télécommunications pour des applications non-critiques.
Il faut aussi penser l'accès à l'espace comme une capacité présentant un sérieux enjeu de souveraineté. À cet égard, les programmes Ariane et la possession du centre spatial guyanais, à Kourou, sont la garantie d'un accès autonome à l'espace.
Il faut enfin souligner que nos capacités spatiales ne seraient pas complètes sans un système de surveillance de l'espace. Il s'agit, pour faire simple, de repérer les mouvements en orbite, de les « caractériser », c'est-à-dire de les comprendre, afin de pouvoir prendre des mesures efficaces le cas échéant. C'est cette capacité qui a permis de détecter les manoeuvres du satellite butineur Luch-Olymp autour de notre satellite Athena-Fidus. Pour les orbites géostationnaires, la surveillance repose sur un réseau de télescopes, c'est-à-dire sur un droit de tirage du CNES sur les télescopes TAROT du CNRS et sur l'achat de données produites par les télescopes GeoTracker d'Ariane Group. Pour les orbites basses, la France utilise les données d'un catalogue publié par les États-Unis mais on ne peut pas s'y fier totalement : il omet certains appareils américains et certaines données orbitales sont particulièrement floues… C'est pourquoi la France a développé le système de radar GRAVES. Signe de l'importance cruciale de cette capacité : jusqu'à l'entrée en service de GRAVES, les Américains rendaient public ce qui concernait nos satellites militaires ; avec GRAVES, la France étant en position de faire de même pour les satellites américains, les États-Unis ont cessé ces publications.
La LPM a d'ailleurs prévu le renouvellement de ces capacités, mais nous avons eu l'occasion d'en discuter longuement au printemps dernier, je n'y reviens donc pas.