Nous tenons en revanche à insister sur le caractère très dual de notre secteur spatial de défense. C'est par souci d'efficience que l'organisation actuelle de ce secteur exploite au mieux les synergies entre les acteurs civils et les acteurs militaires de l'espace.
Ces synergies sont rendues possibles, d'abord, par la profonde dualité des technologies en jeu. Observer l'espace pour un opérateur civil ou militaire, du point de vue technologique, n'est pas vraiment différent. De même pour le lancement des satellites : les lanceurs sont les même, que les satellites mis en orbite soient civils ou militaires. De même, encore, pour les télécommunications satellitaires. Ainsi, la R&D et l'industrie sont largement duales et, de la même façon, certains satellites ont un usage dual : tel est le cas, aujourd'hui, de Pléiades, qui est utilisé à la fois par les armées et par Airbus, qui en commercialise certaines applications.
C'est surtout le rôle du CNES dans le secteur spatial de défense qui marque le caractère très dual de l'organisation française. En effet, le CNES concourt à la plupart des activités spatiales de défense. Ainsi, dans la conduite des programmes d'armement, soit il apporte à la DGA son expertise, soit il assure la maîtrise d'ouvrage des programmes par délégation de celle-ci ; il lui arrive aussi d'être le maître d'oeuvre de certains segments sensibles de certains programmes. Ce sont en outre les infrastructures du CNES qui servent au lancement des satellites militaires. Ses compétences sont aussi mobilisées pour la surveillance de l'espace : c'est son centre d'orbitographie opérationnelle qui traite les informations fournies par les États-Unis, et ce n'est pas une mince affaire, si l'on en juge par le nombre d'alertes de risques de collisions : 2,5 millions par an. De plus, la surveillance des orbites géostationnaires repose sur le droit de tirage que possède le CNES sur les télescopes du CNRS, basés notamment en métropole et au Chili. Et surtout, c'est le CNES qui exploite les satellites militaires en orbite basse, les plus complexes à piloter, en traitant pour le compte des armées les demandes d'acquisition de renseignement transmises par celles-ci. En somme, en s'appuyant largement sur le CNES, le secteur spatial de défense est organisé d'une façon duale, que nous trouvons ce faisant efficiente.