Enfin, toute cette organisation est d'autant plus forte qu'elle s'adosse sur une base industrielle et technologique de premier rang mondial, et sans équivalent en Europe. Cela commence par la recherche amont, domaine dans lequel l'ONERA est reconnue pour son excellence.
De même, la France compte trois grands industriels du secteur spatial : Thales Alenia Space, Airbus Defence & Space et Ariane Group, qui possèdent une dimension européenne tout en ayant la plus grande part de leur activité en France. En tout, cela représente 16 000 emplois et 4,6 milliards d'euros de chiffre d'affaires en France.
Pourtant, ce n'est pas de notre base industrielle et technologique spatiale qu'est venu le grand tournant industriel du secteur dans les dernières années : ce que l'on appelle le New Space. Je ne m'étendrais pas, ici, sur l'analyse de ce mouvement technologique et industriel. Retenons qu'il a une apparence : des milliardaires américains et des fonds d'investissement qui se tournent vers le secteur spatial pour diversifier leur activité et prétendent relancer la conquête spatiale. Ainsi, par exemple, M. Jeff Bezos, fondateur d'Amazon et première fortune du monde, veut ouvrir l'espace au tourisme ; M. Elon Musk, créateur de Paypal et de Tesla puis de Space X, veut coloniser Mars. Le New Space, cependant, a une réalité : l'application de méthodes industrielles nouvelles pour assembler et utiliser des briques technologiques qui, en soi, n'ont rien de technologies de rupture. Et ce, précisons-le, avec le soutien des autorités publiques américaines : c'est la NASA qui a fourni à Space X les briques du moteur réutilisable qui fait le succès de son lanceur Falcon 9, et les prix facturés par Space X au gouvernement américain pour ses lancements peuvent légitimement être vus comme une subvention à peine déguisée.
Dans la mouvance de ces charismatiques acteurs et de leurs ambitieux projets de conquête spatiale, est née aux États-Unis une vague d'innovation dans le secteur spatial, avec les apports du numérique et des techniques de fabrication en série à un secteur industriel qui fonctionnait jusqu'alors en artisanat high-tech. Inévitablement, ce mouvement a pour effet de rebattre les cartes dans le secteur spatial. Pour nos industriels français, c'est une concurrence nouvelle ; non qu'ils se soient endormis sur leurs lauriers, si l'on peut dire, mais force est de constater qu'ils se trouvent pour certains en difficulté.