Monsieur Viry, vous souhaitez soumettre l'ouverture du revenu de base aux jeunes de 18 à 24 ans à des conditions particulières. Je comprends l'idée, mais vous vous contentez de renvoyer leur définition à un décret. Le dispositif mériterait d'être précisé : serait-ce le montant du revenu de base lui-même qui serait inférieur pour les jeunes ? Souhaitez-vous faire dépendre le bénéfice du revenu de base des ressources des parents, même si le jeune n'est plus rattaché à leur foyer fiscal ? Rappelons que la condition d'âge de 25 ans a été fixée au moment de la mise en place du revenu minimum d'insertion (RMI), dont on aurait d'ailleurs pu fêter les trente ans en décembre dernier. Or, au cours des trente dernières années, la structure des familles s'est trouvée considérablement modifiée, le nombre de jeunes en situation de précarité a fortement augmenté, les ruptures familiales sont plus nombreuses. Il importe donc d'interroger cette condition d'âge : elle avait peut-être un sens en 1988, mais n'en a certainement plus aujourd'hui.
Vous évoquez ensuite le coût du dispositif. C'est un vrai sujet. Je pourrais vous répondre qu'il faut justement mener l'expérimentation pour savoir quel sera le coût. Le montant que vous évoquez représente un coût brut, et non le coût net pour la collectivité. Dans l'hypothèse d'une généralisation, il faudrait intégrer, par exemple – j'en ai touché un mot tout à l'heure –, l'impact sur les recettes fiscales du détachement de ces jeunes du foyer fiscal de leurs parents, ce qui entraînerait pour ces derniers une hausse des impôts, ou encore l'impact sur le montant global des prestations familiales versées, lequel baisserait mécaniquement, sans oublier le transfert des bourses d'études, actuellement accordées par l'État et dont le poids sur le budget n'est pas négligeable. Enfin, pour arriver à connaître précisément le coût net du dispositif, il faudrait pouvoir apprécier les réactions comportementales extrêmement diverses, voire imprévisibles.
Il n'est donc pas possible d'afficher le coût avec certitude. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, mes chers collègues, lorsqu'on m'explique que notre proposition de loi vise le moyen ou le long terme, alors que le RUA sera appliqué beaucoup plus rapidement, j'en reste perplexe. En effet – je vous le dis comme je le pense –, s'il est applicable très rapidement, c'est qu'il n'y a pas de prise de risque – et donc pas d'ambition non plus. À l'inverse, s'il y a une véritable ambition, je ne vois pas comment on peut imaginer de mettre en oeuvre un revenu universel sans l'expérimenter au préalable. Mon avis sera donc défavorable à l'amendement AS4.