Cet article 2 est au coeur du texte et retient toute notre attention. Sur tous les bancs, nous sommes conscients que nous touchons d'une main tremblante à un droit fondamental : la liberté de manifester – elle est inscrite à l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ce qui n'est pas rien, et a été consacrée par le Conseil constitutionnel dans deux décisions rendues, de mémoire, en 1995 et en 2010. J'ajoute qu'il s'agit également d'un droit conventionnel. Nous touchons donc à quelque chose de très important, à l'occasion de manifestations dont nous déplorons tous le caractère délétère et dangereux.
Néanmoins, notre groupe est très réservé à l'idée que les préfets – en qui j'ai également toute confiance et pour qui j'éprouve une grande estime – puissent avoir la main sur une liberté fondamentale. Nous venons de discuter d'un texte sur la justice et nous considérons que le juge judiciaire peut tout à fait s'adapter aux exigences de l'ordre public et faire en sorte que les condamnations qui doivent être prononcées ou qui sont prononcées soient assorties d'une peine complémentaire d'interdiction de manifester, qu'elle soit recensée et que vous puissiez disposer de ces informations. À ce stade de notre réflexion, voilà où nous en sommes.
Je conclurai en notant que l'espace des libertés fondamentales se réduit de plus en plus du fait des mesures que nous avons prises, notamment avec l'état d'urgence. Cela n'a pas été facile, mais nous l'avons fait – comme vous l'avez dit très justement – non dans l'absolu, mais relativement à une exigence très forte de sauvegarde de l'ordre public dans un contexte de menace terroriste. En l'occurrence, l'analogie n'est pas possible.