Je sais que j'ai manqué à certains d'entre vous dans cet hémicycle, si bien que je suis revenu le plus rapidement possible…
Qu'est-ce qui caractérise un État de droit ? C'est le fait que nul ne peut être inquiété de manière arbitraire. C'est le principe de sûreté, qui fonde l'idée de justice. Or, monsieur le secrétaire d'État, vous nous dites qu'une personne ayant commis des agissements, violents ou autres, qui ne sont pas des actes – sinon, vous auriez utilisé ce terme – pourrait faire l'objet d'une interdiction de manifestation. Si on avait écrit le mot « acte », cela aurait été une tautologie. Casser une vitrine ou tabasser un flic est déjà un délit, encore heureux ! J'espère que les gens qui commettent de tels actes sont interpellés et déférés à la justice.
Vous inventez là une nouvelle conception juridique, qui diffère un peu de celle reposant sur les « raisons sérieuses de penser que ». Celle-ci n'était pas bien meilleure, mais elle était au moins connue du monde judiciaire. En fait, vous laissez entendre qu'on pourra interdire de manifester à des gens sur lesquels ne pèsent que des suppositions.
La présomption d'innocence, qui fonde la sûreté et l'État de droit, a déjà été chamboulée en matière de terrorisme et de criminalité organisée. Nous comprenons l'émotion qui a pu conduire à de telles modifications, même si nous étions là pour rappeler les principes de l'État de droit et de la République. Et vous étendez maintenant, dans une loi de circonstance, la remise en cause du principe de présomption d'innocence aux manifestations.