Cet article prévoit la création d'un délit passible d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende, pour le fait de dissimuler volontairement son visage afin de « participer ou d'être en mesure de participer » à des troubles à l'ordre public. Si je me réjouis qu'il soit plus précis aujourd'hui que dans la proposition de loi d'origine, je reste dubitative par rapport à cette mesure, que je trouve disproportionnée.
D'une part, notre code pénal permet déjà de punir la dissimulation illicite du visage à l'occasion de manifestations sur la voie publique. Comme cela a été rappelé, celle-ci est passible d'une contravention de cinquième classe, allant jusqu'à 1 500 euros d'amende et 3 000 euros en cas de récidive. Pour cela, cette dissimulation doit être volontaire, dans le but d'empêcher l'identification, lorsque des atteintes à l'ordre public sont à craindre.
D'autre part, on voit bien qu'il n'est pas si aisé d'établir qu'une personne dissimule son visage volontairement, pour commettre des violences. C'est d'ailleurs ce que soulignent les syndicats de police. Pour la seule manifestation des gilets jaunes du 1er décembre, 10 000 grenades ont été tirées, dont près de 8 000 grenades lacrymogènes, soit autant que pendant toute une semaine à Notre-Dame-des-Landes. On ne peut donc que comprendre que certains manifestants se couvrent le visage.
Lorsqu'on vous entend, monsieur le secrétaire d'État, affirmer lors de votre audition que les personnes dissimulant leur visage le font forcément pour commettre des violences, on se dit que vous n'avez pas manifesté depuis longtemps.
Je comprends et je soutiens votre volonté de mettre un terme aux violences inadmissibles perpétrées par des groupes tels que les black blocs, mais il faut préférer des solutions pratiques pour permettre notamment aux forces de l'ordre d'interpeller plus facilement les personnes violentes, par exemple s'assurer qu'elles disposent d'effectifs satisfaisants et bien entendu privilégier les flagrants délits. Commençons peut-être par-là !