Effectivement, la recherche est un élément fondamental de notre activité. Notre métier est la médecine transfusionnelle, et pour en préparer l'avenir, nous sommes obligés de mobiliser des moyens importants. Dans le contrat d'objectifs et de performance, qui est toujours très ambitieux, l'objectif était de consacrer 2 % de nos ressources à la recherche. Les contraintes budgétaires ont fait que l'effort propre de l'EFS atteint aujourd'hui 1,6 %.
La recherche à l'EFS est un sujet important, à propos duquel je dialogue en permanence avec la présidente du conseil scientifique de l'EFS. Elle a pour objet de préparer les activités transfusionnelles de demain. Ainsi, peut-on, à partir de cellules-souches, créer des cellules sanguines ? A priori, oui, mais ce ne sera pas pour demain, mais plutôt pour après-demain. Autrement dit, il va falloir continuer à collecter.
Le deuxième axe de recherche est d'améliorer notre connaissance concrète de la naissance et du comportement des cellules sanguines dans le corps. C'est important dans les cas d'allo-immunisation, lorsque des personnes qui reçoivent beaucoup de produits développent des phénomènes de rejet.
S'agissant du troisième thème de recherche, je suis très fier d'en parler aujourd'hui, puisque nous avons publié ces travaux. Nous avons amélioré fortement nos outils de détection, et réussi à mettre en place, c'est une première mondiale, un test qui permet de découvrir, y compris en phase asymptomatique, que des gens étaient possiblement atteints par la maladie de Creutzfeldt-Jakob. Ces gens développent la maladie dix ans après !
Nous faisons aussi de la recherche clinique, notamment pour savoir comment se comportent les plaquettes dans le corps humain.
Enfin, et c'est un enjeu important sur lequel il y a des questions de financement, nous sommes en train de préparer la médecine de demain : médecine personnalisée ou régénératrice, avec des médicaments un petit peu bizarres, que l'on appelle médicaments de thérapie innovante. Il s'agit de prendre des cellules et de les traiter de manière particulière avant de les réimplanter chez quelqu'un, par exemple pour réparer un muscle cardiaque ou un oeil.
Nous devons, cela dit, toujours rester attentifs à certains points.
Tout d'abord, la recherche que nous faisons au sein de l'établissement fait-elle partie de notre coeur de métier ? Pour les chercheurs, le coeur de métier est quelque chose d'assez large, mais j'ai la responsabilité du pilotage, et je dois m'en assurer.
Il y a un deuxième élément sur lequel je pense que nous devons avancer plus rapidement, et c'est pourquoi nous travaillons avec l'Agence de la biomédecine pour comprendre les mécanismes du don. Cela impose de faire appel beaucoup plus que nous ne l'avons fait jusqu'alors à des spécialités sociales et psychosociales. Nos collègues québécois, par exemple, en savent beaucoup plus que nous sur le sujet. C'est d'autant plus important que nous sommes parfois confrontés à des communautés dans lesquelles on utilise quotidiennement l'expression : « Nous sommes frères de sang », ne serait-ce que parce qu'on y pratique l'échange du sang. Or, c'est le contraire du modèle éthique, dans lequel le don de sang est anonyme, volontaire et gratuit. Nous devons avancer pour débloquer les noeuds qui peuvent exister dans certaines populations.
Concernant l'arsenal juridique sur la traçabilité, je rappelle que je ne suis que le président du conseil d'administration de l'EFS, ce qui est par ailleurs heureux : j'applique des décisions ou des réglementations, mais je ne les prends pas moi-même. La seule chose que je puisse dire de façon extrêmement sûre, c'est que toutes les poches de sang, tous les produits sanguins collectés et distribués en France – plaquettes, globules rouges, plasma thérapeutique – bénéficient d'une traçabilité complète. En sortant un tout petit peu de ma responsabilité, j'ajoute que dans le plasma master file, qui regroupe les règles que se donnent les producteurs de plasma, on trouve la traçabilité. La question est de savoir comment tout cela est contrôlé.