En réponse à la question sur les paradoxes de la communication, notre travail est à l'image de celui de Sisyphe : à peine avons-nous réussi qu'il nous faut le reprendre. C'est l'honneur de l'établissement public, et sa mission. Chaque fois que nos stocks sont bons, ils vont redescendre, et il faudra les reconstituer. Par ailleurs, je vous remercie, madame Wonner, de participer à ces activités et de soutenir les donneurs.
Je crois qu'il faut sûrement mieux informer dans les écoles sur le don du sang. Cela se fait un peu, peut-être pas assez, surtout dans les petites classes. Nous nous sommes demandé si l'âge minimal pour donner son sang pourrait être abaissé à seize ans. Je n'en suis pas sûr. Toujours est-il que, quand on donne son sang, c'est l'occasion, notamment quand on est jeune, de s'interroger sur ses habitudes, sur ce que l'on a fait ou pas, de se demander si l'on peut donner son sang. C'est une chose qui pourrait servir à l'éducation sanitaire.
Concernant le modèle économique, nous devons tenir compte de la réalité d'une collecte qui se fait sur le terrain, là où sont les donneurs et les associations. Jusqu'où, et de quelle manière, organisons-nous les fonctions support et les fonctions managériales ? Faisons attention à ne pas devenir comme ces organisations où les fonctions support envahissent un peu tout… Essayons de regrouper les fonctions managériales au niveau régional pour privilégier les moyens de la collecte et de la sécurisation. Un exemple : il y avait quatorze plateaux de qualification biologique des dons, et mon prédécesseur a engagé une réforme, que j'ai terminée, de sorte qu'il y a aujourd'hui quatre plateaux seulement, qui traitent chacun 2 500 dons environ par jour, de façon bien plus sécurisée qu'avant. La question est donc de savoir ce qui doit être fait au plan local et ce qui doit être piloté au niveau régional.
Sur nos campagnes de communication, nous n'avons en effet pas assez de mesures d'impact. Vous nous parliez de la campagne dans laquelle nous avions fait un clin d'oeil aux candidats : comme nous n'avons pas d'argent, nous essayons d'être malins… Nous devons nous faire connaître ; j'ai des amis médecins qui me disent s'adresser à la « banque du sang » ! Ils ne savent pas qu'elle s'appelle l'EFS… Et nous devons aussi faire venir les gens. Il y a donc une double obligation, et les campagnes de fin juin ont été efficaces car nous avons réussi à augmenter les stocks. Nous réfléchissons aux moyens de mesurer cette efficacité. Nous avons déjà de gros partenariats avec les universités et les écoles, et nous voyons que les élèves qui ont plus de dix-huit ans et les étudiants viennent massivement donner leur sang. C'est, en plus, très sympa, car ils viennent à sept ou huit et mettent une très bonne ambiance dans le centre et pendant la collation.
J'ai été interrogé sur l'élargissement possible des cibles de donneurs, notamment les HSH. Ma position institutionnelle, en tant que président de l'EFS, est qu'il n'y a jamais assez de donneurs. Je suis donc, par définition, pour l'élargissement des cibles. Mais en même temps, cette décision ne m'appartient pas. Le contraire ne serait pas très satisfaisant en termes d'organisation de la sécurité de la santé transfusionnelle, car les décisions d'ouverture ou de remise en cause d'un ajournement nécessitent un travail épidémiologique, d'analyse, de sociologie, qui fait que ce n'est pas à moi de décider.
Prenons l'exemple de l'ouverture du don du sang aux HSH. Est-ce que le don du sang des HSH est plus risqué ? Cette question est mal posée : la vraie question est de savoir si, avant de donner son sang, une personne a eu des pratiques sexuelles à risque, quelle que soit sa sexualité. Le délai de douze mois a été retenu car nous avons constaté que, dans les pays qui sont passés d'une interdiction permanente à une interdiction pendant douze mois, aucun accroissement du risque n'a été constaté. C'est parce que des études ont été faites sur ce sujet que la direction générale de la santé et la ministre ont décidé de ce délai de douze mois, qui est considéré comme un palier susceptible d'être encore abaissé. À cette fin, des études sont en cours pour savoir si, à six mois seulement, voire à quatre mois, comme cela se pratique dans certains pays, le risque augmente.
Ce n'est pas à moi de prendre cette décision, et il faut qu'elle soit bien étayée scientifiquement, de façon très forte. Je le rappelle, le droit est celui des malades à avoir les produits les plus sécurisés possibles. On ne donne pas son sang pour se faire plaisir, mais parce que l'on va prendre en charge le soin de quelqu'un. Il faut donc que le don soit le plus sécurisé possible, et je n'ai aucun a priori sur ces sujets. Essayons d'allier une ouverture importante – 4 % de la population, cela ne suffit pas – avec la sécurité que l'on doit aux patients qui ont besoin de ces produits sanguins.
Sur le modèle éthique, non seulement ce modèle est fort et ancré, mais nous le partageons avec beaucoup de membres de l'Union européenne. Sur le sujet des globules rouges et de la collecte de sang total, nous ne sommes pas loin d'avoir un large accord au niveau de l'Europe, même si je suis fier de dire que la France est sûrement la plus exigeante sur le sujet.