Intervention de Bruno Millienne

Séance en hémicycle du jeudi 7 février 2019 à 9h30
Débat sur la montagne d'or — Débat

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBruno Millienne :

À l'initiative de Gabriel Serville et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, nous sommes invités aujourd'hui à débattre d'une affaire distante de quelques milliers de kilomètres de la capitale ; une affaire à laquelle la représentation nationale ne saurait rester indifférente. La Montagne d'or, c'est l'histoire d'un territoire où nombre d'indicateurs témoignent de la forte précarité économique dans laquelle les près de 288 000 âmes qui y ont élu domicile sont plongées : taux d'illettrisme à 20 %, taux de chômage à 21,5 %. C'est l'histoire d'un territoire aux sous-sols riches en minerais précieux qui font la convoitise de compagnies minières étrangères. C'est l'histoire d'une population locale à laquelle ces mêmes compagnies promettent monts et merveilles, pourvu qu'on les laisse s'adonner à l'exploitation des ressources naturelles de leurs sols.

En dépit de ces promesses et de l'aspiration légitime de nos amis guyanais à mieux vivre, ils se sont dits opposés, à 69 %, au projet de la Montagne d'or à l'occasion d'un sondage IFOP. L'histoire de la Montagne d'or, ils n'en veulent tout simplement pas. Pourquoi ? Parce qu'ils ont jugé que le prix à payer était bien trop important au regard des bénéfices qu'ils pourraient en retirer.

Ce prix à payer, quel est-il ? Outre les hectares de déforestation, c'est le risque grave que l'on fait peser sur l'environnement du fait du recours massif au cyanure pour extraire l'or en Guyane. Certes, l'industrie minière recourt à ce procédé depuis 1888 et des progrès notables ont été réalisés depuis. Mais revenons un instant sur deux événements marquants qui ont eu lieu dans les années 2000. Le premier, c'est celui de Baia Mare, en Roumanie : le 30 janvier 2000, la rupture d'un barrage minier a pour conséquence ce qu'on a appelé le pire désastre écologique depuis Tchernobyl, des tonnes de cyanure se déversant dans la Tisza et le Danube. Le second a eu lieu récemment et il est dans toutes les mémoires : le 25 janvier 2019, à Brumadinho, au Brésil, la rupture d'un barrage a entraîné le déversement dans la nature de tonnes de déchets miniers. Tragédies humaines et environnementales, ces événements nous rappellent combien le chemin est long avant que nous ne parvenions à concilier parfaitement développement économique et impératifs écologiques.

Et pourtant, il est une voie qui semble à toute autre préférable : celle de la précaution. D'autres s'y sont déjà engagés, à l'instar de l'Allemagne en 2002 ou encore de la République tchèque, du Costa Rica, de la Turquie ou de la Hongrie, qui ont été les premiers à proscrire l'utilisation du cyanure dans l'industrie minière. Quelles que soient les contraintes prévues au niveau européen, elles ne seront jamais aussi efficaces qu'une interdiction pure et simple, assortie de la poursuite des travaux de recherche et développement visant à parfaire les technologies d'extraction en tenant compte de l'impératif écologique. Comme le Président de la République l'a encore déclaré récemment, on ne peut se permettre de lancer un projet ne répondant pas aux standards environnementaux. Car là est bien la priorité : l'environnement !

La question que nous avons à traiter aujourd'hui est celle de l'intérêt général contre les intérêts particuliers : nous devons déterminer ce que le premier nous commande de faire quand les seconds le négligent. Le groupe Mouvement démocrate et apparentés n'est pas opposé par principe à tout projet d'exploitation minière. Il a en revanche estimé qu'il n'était pas concevable que ces exploitations soient menées au détriment de la nature, de la biodiversité et de sa préservation, dans l'intérêt exclusif d'une minorité.

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