Lors de votre arrivée rue de Grenelle, monsieur le ministre, nous avions cru comprendre que l'école n'avait pas besoin, à chaque alternance politique, d'une nouvelle loi et qu'il n'y aurait pas, par conséquent, de loi Blanquer. Je constate que cette position a évolué… Or il faut tenir compte de ce que la communauté éducative est parfois lassée de devoir s'adapter à un nouveau changement, quand elle vient à peine de comprendre une réforme !
Ce projet s'inscrit bien dans les principes fondamentaux que vous défendez, puisqu'il s'agit d'une école de la confiance. Pour autant, dès l'article 1er, l'établissement du lien de confiance, essentiel entre les élèves, les familles et le service public, est mis en rapport avec l'exemplarité des professeurs. C'est placer la barre un peu haut ! Les professeurs, comme nous tous, sont humains. L'étude d'impact, apparemment, ne traduit pas votre volonté puisqu'elle met l'accent sur les propos tenus par les enseignants. Il serait donc important que la précision soit apportée dans les termes de la loi.
Le projet, pour l'essentiel, vise à rendre l'instruction obligatoire dès l'âge de 3 ans, à renforcer le contrôle effectué sur l'instruction à domicile, à réformer les écoles supérieures du professorat et de l'éducation, à formaliser les établissements publics locaux d'enseignement international, à confier aux assistants d'éducation des fonctions pédagogiques, à instaurer un nouveau découpage national pour les rectorats et à créer un nouveau conseil d'évaluation de l'école.
La scolarisation obligatoire dès 3 ans est pour nous positive, mais elle ne constitue pas un changement essentiel, puisque 98,9 % des enfants de 3 ans sont déjà scolarisés et qu'une partie de ceux qui ne le sont pas sont soit issus de familles isolées, soit en situation de handicap. Sur cette dernière question, le texte, malheureusement, ne contient pas grand-chose. Pour un certain nombre d'organisations syndicales, cette question importe moins d'ailleurs que la précarisation du corps enseignant, les conditions d'apprentissage des élèves confrontés à des réductions de postes ou encore la suppression des emplois aidés.
S'agissant de la déscolarisation, vous avez rappelé la mission flash que j'ai menée avec Anne Brugnera. Le fait qu'un certain nombre d'enfants échappent aux radars de l'État ou des services sociaux est en effet préoccupant, et les mesures de contrôle renforcées que vous avez prévues sont utiles. Nous avions préconisé de renforcer les outils permettant de savoir qui sont ces enfants qui ne sont pas scolarisés et qu'un identifiant leur soit attribué, permettant des enquêtes.
Monsieur le ministre, nous partageons l'intérêt du texte pour l'expérimentation et l'évaluation, mais nous comprenons mal le sort réservé au CNESCO, organe indépendant d'évaluation des programmes. Nous avions compris qu'il serait remplacé par un Conseil national d'évaluation du système scolaire, complètement intégré à la hiérarchie de l'éducation nationale, ce qui nous semblait ne pas correspondre aux préconisations de la Cour des comptes, qui recommandait, au contraire, de mieux distinguer les directions qui agissent de celles qui évaluent. Les précisions que vous venez d'apporter montrent qu'à côté du conseil d'évaluation pour l'école, le CNESCO deviendra une chaire au CNAM. Pourriez-vous nous apporter un éclairage supplémentaire ?
Par ailleurs, les ESPÉ seront remplacées par des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation : pourriez-vous expliquer ce que recouvre cette précision sémantique ?
Le groupe Socialistes et apparentés prendra sa part dans la discussion, pour enrichir le texte et l'infléchir dans le sens d'une meilleure justice sociale.