Intervention de Jean-Michel Blanquer

Réunion du mercredi 23 janvier 2019 à 17h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse :

Je vous remercie pour l'ensemble de ces remarques et questions. On mesure en les écoutant l'ampleur des sujets, la passion, aussi, dans le meilleur sens du terme, qui existe autour d'eux. De manière posée, vous avez les uns et les autres dit à quel point les enjeux étaient considérables derrière chacun des points d'une telle loi.

Tout d'abord, je souscris à ce qu'ont dit les deux rapporteures. Mme Lang a porté son attention sur le fossé entre la petite enfance et l'école maternelle. C'est en effet un sujet très important. Nous avons encore des pas de géant à accomplir en la matière. Le présent projet de loi ne représente qu'un élément, mais un élément non négligeable qui doit nous conduire à réfléchir aussi sur notre vision du CAP petite enfance, sur notre vision, partagée avec les communes, de ce que sont les ATSEM, sur notre vision tout simplement de ce qui se passe de zéro à six ans pour qu'il n'y ait plus cette première césure qui, malheureusement, en précède d'autres dans notre système scolaire. Césure crèche-maternelle, maternelle-élémentaire, CM2-sixième, troisième-seconde, terminale-enseignement supérieur : autant de césures qui peuvent être des fossés trop grands pour les enfants. Cela doit nous inviter à créer des ponts, des liaisons, de la cohérence.

L'intervention de Mme Charvier montre qu'il faut insister sur plusieurs points lorsqu'on parle de l'attractivité du métier de professeur. Il y a certes la revalorisation salariale, qu'il est tout à fait normal d'évoquer, même si ce n'est pas l'objet de cette loi. Je dis bien volontiers qu'un sujet existe – il ne date pas d'hier mais d'au moins trois décennies – qui a conduit à la baisse du pouvoir d'achat des professeurs. Nous devons nous y atteler et c'est ce que nous faisons depuis plusieurs mois dans le dialogue social avec les professeurs. J'y attache une grande importance.

Il y a aussi la refonte de la formation des enseignants. Personne ne contestera que la situation n'est pas satisfaisante. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas des éléments de satisfaction, qu'il convient de maintenir, mais nous devons franchir un cran. Ceux qui ont toujours été les plus critiques sur la formation initiale des enseignants, sont les étudiants eux-mêmes, par exemple sur la surcharge en master 2, et il faut entendre cette critique. Cela suppose que nous soyons capables d'écrire un nouveau chapitre du roman collectif, si vous me permettez l'expression, en cohérence avec les chapitres précédents mais en sachant que des limites doivent être prises en considération.

M. Freschi pose la question stratégique de la manière dont le texte contribue à faire de la France une puissance éducative. J'y accorde beaucoup d'importance. C'est le Président de la République qui a utilisé cette expression de « puissance éducative ». Il est le premier à l'avoir fait, et c'est là le premier élément de sa définition de la France : d'abord puissance éducative, puis d'autres adjectifs suivent, puissance économique, industrielle, culturelle… C'est dire à quel point le sujet a une dimension internationale ; les deux enjeux, national et international, interagissent.

Le présent texte participe de cette vision, et ce de différentes façons. Tout d'abord, pour être une puissance éducative, il faut avoir une certaine solidité. Il faut prendre en compte nos forces et nos faiblesses. Nos forces, ne les négligeons jamais, elles existent et il ne faut pas les perdre. Si la France est, par exemple, attractive par ses lycées français à l'étranger, c'est parce qu'un certain modèle français de l'enseignement a toute sa valeur. Ne jetons jamais le bébé avec l'eau du bain quand nous parlons de notre système scolaire. Notre cartésianisme, notre capacité d'avoir des programmes ayant une certaine cohérence de la petite section jusqu'à la terminale, peuvent bien sûr être critiqués mais c'est un bien précieux à la française qu'il faut savoir consolider. Dans un monde de plus en plus complexe, cette clarté française, ce jardin à la française a, à côté de quelques défauts, ses mérites.

Il faut aussi que nous soyons meilleurs dans les classements internationaux. Cela va prendre du temps, cette loi doit y contribuer. Nous devrions constater, je l'espère, les premières améliorations dans le PIRLS 2021, alors que la génération actuellement en CP-CE1 arrivera en CM1 et sera testée. J'espère que cela montrera les premiers rebonds de l'élémentaire dans les compétences fondamentales. Nous attendons également le PISA 2019, sur lequel nous avons travaillé l'an dernier pour avoir le même genre de mobilisation du système que dans les autres pays, ce qui n'a pas toujours été le cas par le passé et a peut-être conduit parfois à nous sous-évaluer. Il faut qu'un certain prestige résulte de notre amélioration dans les classements internationaux.

Troisième élément de la puissance éducative : un discours international sur l'école. C'est celui qu'a tenu le Président de la République à Dakar en février dernier. La France a développé sa participation au Fonds mondial pour l'éducation dans le cadre d'une stratégie consistant notamment à contribuer au développement de l'Afrique en matière éducative, de sorte que les pays africains se développent de façon endogène et qualitative. Cela passe par les axes stratégiques que sont la formation des professeurs, la formation professionnelle et l'égalité filles-garçons, clairement fixés comme des priorités internationales et qui ont été repris par d'autres pays. Le G20 de novembre, en Argentine, a été l'occasion, avec le co-leadership de la France et en lien avec d'autres instances telles que l'UNESCO, de consacrer ces trois axes, qui deviennent ainsi importants dans l'agenda international.

S'agissant de la formation professionnelle, comment le monde répond-il à l'enjeu de l'emploi pour tous, notamment par des formations de niveau baccalauréat et bac plus deux correspondants au développement de la société du futur, avec les grands enjeux du numérique et de l'écologie ? Comment réussissons-nous à rendre ces stratégies cohérentes avec les moyens existants de la Banque mondiale et des différents fonds internationaux pour aider les pays le plus en difficulté ?

Il y a aussi les moyens d'agir internationalement. Je pense au Centre international d'études pédagogiques (CIEP), un opérateur français de grande qualité dont nous venons de signer le projet d'établissement. Il s'autofinance en grande partie grâce aux projets internationaux dont il est opérateur et participe à l'influence française.

Enfin, des mesures regardées par l'étranger contribuent également à cette puissance éducative. J'ai dit que l'instruction obligatoire en faisait partie, mais d'autres dispositions, parfois plus inattendues, ont fait l'objet d'attention ces derniers temps. Au premier rang, et cela peut surprendre, figure l'interdiction du téléphone portable au collège, observée par tous les grands médias internationaux et qui inspire d'autres pays. Ce n'est pas du tout perçu comme archaïque mais au contraire comme assez avant-gardiste.

L'expression « France puissance éducative » est donc très porteuse, d'autant qu'avoir une vision internationale rétroagit sur la capacité à disposer d'une conception nationale de qualité. Les observations que je ferai sur les établissements publics locaux d'enseignement international participe aussi de cette dimension.

S'agissant de l'école obligatoire dès l'âge de trois ans et des contenus de l'enseignement en école maternelle, il est évident que la loi a un effet d'entraînement dans d'autres domaines. L'engagement du Président de la République a été pris lors des Assises de l'école maternelle, qui nous servent désormais de point de repère pour le choix des outils pédagogiques, mais aussi pour les formations initiales et continues pour l'école maternelle. Nous irons probablement vers des certifications spécifiques, ce qui aura notamment un impact sur la formation initiale ainsi que sur la conception que l'on se fait des enjeux spécifiques de l'école maternelle.

Vous avez indiqué qu'en Finlande ou en Estonie, la scolarité n'était obligatoire qu'à l'âge de sept ans, ce qui ne les empêchait pas d'être en tête des classements internationaux. C'est très intéressant, certes. Mais, ainsi que je l'ai évoqué et que l'a souligné Mme Lang, ces pays mettent en oeuvre des politiques de la petite enfance cohérentes et l'organisation de la société y est par ailleurs différente.

J'ai été interrogé par plusieurs d'entre vous sur l'indépendance de l'Agence d'évaluation.

Pour ce qui concerne le CNESCO, il s'agit de créer une nouvelle chaire au CNAM. Tout l'acquis du CNESCO sera transféré vers cette nouvelle chaire et va s'amplifier, puisque le cadre académique sera plus favorable à l'épanouissement futur du CNESCO. Ce qui signifie des futures conférences du consensus, une indépendance toujours plus accrue, une capacité d'agir très forte, mais aussi la possibilité d'interagir dans un état d'esprit consacrant l'importance de la recherche scientifique de la dimension universitaire du CNAM. Cette maison nationale, présente sur l'ensemble du territoire, permettra en outre d'avoir une approche « déparisiannisée » des effets du travail du CNESCO, dont je salue le bilan. Je considère toutefois que la mission qu'il a accomplie jusqu'à présent correspond à une certaine approche du discours pouvant être tenu sur les politiques publiques, mais ne répond pas à l'objectif, d'ailleurs affirmé par le Président de la République, de disposer d'une véritable agence d'évaluation dont le but principal est d'évaluer chacune des écoles, chacun des collèges et lycées de France – ce que ne fait pas le CNESCO aujourd'hui. Si la future Agence ne devait avoir qu'un seul but, ce serait de superviser une méthodologie de l'évaluation.

En ce qui concerne son indépendance, je suis prêt à ce que nos discussions fassent évoluer la composition du conseil proposée jusqu'à présent. Afin de rassurer sur ce point, le nombre de personnes qualifiées pourrait ainsi être augmenté. L'évaluation a toujours impliqué une certaine indépendance et des éléments d'objectivation ainsi qu'une articulation avec le ministère de l'éducation nationale.

La France connaît le paradoxe d'être un des pays d'Europe les plus en retard en matière d'évaluation – et le travail du CNESCO n'y a rien changé – alors qu'elle possède de très forts atouts dans sa capacité d'évaluer. Nous disposons ainsi d'une excellente direction de l'évaluation et de la prospective, reconnue sur le plan international, dont la compétence statistique est très forte. Par ailleurs, notre inspection générale, très ancrée dans notre histoire, nous dote de moyens humains de qualité.

Je rappelle à cet égard que les inspections générales font l'objet d'une réforme très importante, dont bénéficiera de façon très positive la nouvelle agence. Il s'agit de la fusion des inspections générales existantes, l'IGEN (Inspection générale de l'éducation nationale) avec l'IGAENR (Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche), l'Inspection générale de la jeunesse et des sports (IGJS) et l'Inspection générale des bibliothèques (IGB). Ces quatre inspections n'en feront plus qu'une, ce qui favorisera une vision plus complète des enjeux scolaires et périscolaires pour l'enfance et la jeunesse. Cette Inspection générale sera en outre plus prestigieuse et plus puissante, capable d'être en appui de ce que nous ferons en matière d'évaluation.

À cette indépendance viendra s'ajouter la qualité des ressources humaines pour bien procéder à cette évaluation. La future Agence ne sera pas une nouvelle bureaucratie, une nouvelle institution comportant de nombreux agents. L'objectif est de disposer d'une bonne qualité méthodologique garantie par les quelques personnes qui la composeront ainsi que par le conseil. Ils pourront s'appuyer sur les compétences de la direction de l'évaluation et de la prospective, des Inspections générales et des Inspections régionales.

Nous voulons un système pratiquant l'autoévaluation, afin que chacun comprenne que l'évaluation n'est pas cette chose dramatique qui tombe d'en haut mais au contraire un levier que l'on s'approprie par le terrain. Des équipes, pas uniquement composées d'inspecteurs, compléteront ensuite cette autoévaluation dans les établissements. Ce travail permettra d'élaborer le projet éducatif pour cinq ans des écoles, collèges et lycées, en se fixant au cours de cette période des objectifs d'amélioration. Une nouvelle évaluation sera effectuée cinq ans plus tard. C'est ainsi que l'on appréciera les vertus du processus.

Le but n'est pas d'évaluer pour évaluer, mais pour aider et pour accompagner. En cela, je m'engage dans cette logique d'école de la confiance, car notre objectif, à travers l'évaluation, est de faire réussir chaque élève de France. Que chacun soit rassuré, il s'agit non pas d'établir des classements, mais de donner à chaque école, collège et lycée les moyens de son amélioration en lien notamment avec son rectorat et son inspection d'académie. Nous aurons de la sorte, à l'échelon national, une nouvelle vision de ce que nous réussissons collectivement ainsi que des voies et moyens d'amélioration.

Sur le handicap, je rappelle que cette loi doit effectivement consacrer certains enjeux de l'école inclusive. Nous n'avons volontairement rien écrit dans ce texte parce qu'une concertation avec les organisations concernées par les enjeux du handicap, lancée avec Sophie Cluzel au mois d'octobre dernier, livrera ses conclusions le 11 février prochain. Nous en tiendrons compte, aussi bien pour la définition du statut des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) que pour les enjeux de leur formation ou pour le parcours de l'élève.

Je sais qu'une proposition de loi portant sur ce sujet a été déposée et débattue en commission. Toutes tendances politiques confondues, nous avons une perche à saisir pour être dans la ligne tracée depuis au moins deux décennies. Il existe en effet un consensus politique sur les enjeux du handicap. Nous pouvons donc être d'accord sur les déploiements nécessaires et l'amélioration du statut. Le jeu est très ouvert. C'est ainsi que nous parviendrons à écrire dans la loi ce qui doit l'être, car ces sujets relèvent plus du domaine réglementaire que législatif. En tout cas, l'impulsion viendra de la loi et notre volonté sera précisée par nos débats. L'objectif, que nous partageons tous, est d'apporter, dès la rentrée 2019, des améliorations concrètes pour les personnels et les enfants.

Mme Essayan et plusieurs d'entre vous m'ont interrogé sur la compensation des surcoûts pour les communes. Je répète que, conformément à la Constitution, l'État compensera les surcoûts engagés qui s'apprécieront en comparant l'année 2019-2020 à l'année 2018-2019. Tout cela sera pérenne, c'est une garantie donnée par l'État. Ce sera aussi l'occasion de renforcer l'attention des préfets et des recteurs sur les enjeux d'investissement des communes dans le domaine du bâti scolaire, et de l'accessibilité pour les enfants handicapés, y compris dans les écoles maternelles.

À Mme Pau-Langevin, je veux préciser que cette loi ne s'appelle pas « loi Blanquer », mais « loi pour une école de la confiance » ; il n'y a aucune personnification à rechercher. Ce qui importe surtout c'est qu'elle n'est pas intervenue au début du quinquennat, mais dans un temps intermédiaire pour des sujets relevant du domaine législatif. Cela nous permet d'avoir du recul sur les points qui ont avancé depuis dix-huit mois et de donner un nouvel élan pour d'autres, tel celui que je viens d'aborder.

Vous avez évoqué l'excès de réforme dans le système éducatif : que celui qui n'a jamais péché me jette la première pierre ! Cette loi échappe à cette remarque, car tous les acteurs du monde éducatif ne se trouvent pas dans la même situation au regard de l'évolution du système. Ainsi, les professeurs de collège connaissent moins les effets de la réforme que les professeurs de lycée. À l'école primaire, les effets de la réforme sont plus visibles dans les réseaux d'éducation prioritaire que dans le reste du système. Ce n'est pas parce que dix mesures nouvelles sont prises dans le domaine de l'éducation que chaque acteur de l'Éducation nationale sera concerné. En revanche, les mesures ont un « effet système » entre elles. Ainsi, lorsque l'école française progressera au cours des prochaines années grâce aux leviers utilisés, les collèges seront bien entendu concernés, mais de manière seulement positive. J'ai le souci de la cohérence des réformes entre elles, et je veille à ce que les acteurs n'éprouvent pas un effet de trop-plein.

Vous avez rappelé, madame la députée, la mission flash que vous avez menée avec Anne Brugnera sur la déscolarisation. Vous ne l'ignorez pas, nous prenons pleinement en compte ces travaux. Ils nous aideront notamment à progresser sur le thème de l'identifiant. Ce sujet a progressé au cours de dix dernières années sous trois gouvernements successifs, et la réflexion doit se poursuivre dans la même direction. Je le souligne car il faut veiller à ne pas cultiver l'idée qu'il y a des zigzags systématiques. Certes, certains sujets appellent des rectifications ou le passage à l'étape suivante, comme je l'ai expliqué pour la formation des professeurs. Mais d'autres font l'objet de continuité, telle la lutte contre le décrochage scolaire. Le travail réalisé sur l'identifiant élève aura un impact très important.

Vous avez insisté enfin sur le changement de nom des ESPÉ en INSPÉ. Chaque lettre du nouvel intitulé compte, le « N » particulièrement renvoie à la dimension nationale de ces instituts. Bien sûr, ils demeureront présents dans chaque académie comme c'est le cas aujourd'hui, mais il est important qu'ils soient attachés à une logique nationale, car c'est la garantie d'un certain standard que nous devons à nos professeurs ainsi qu'à nos élèves à travers eux. Cela permet d'insister sur le fait qu'il s'agit d'instituts reliés à un enjeu professionnel, dans une dimension nationale.

Mme Descamps m'a interrogé sur l'instruction obligatoire et le contrôle de l'instruction en famille. Il est exact que la loi Gatel nous a conduits à muscler nos capacités dans les académies afin de réussir ce contrôle. Un inspecteur de l'éducation nationale sera dédié à cette mission dans chaque rectorat. En fonction des situations locales, des équipes pourront mener ce contrôle, qui doit au moins être annuel et de nature à apprécier la progression de l'enfant dans les étapes de sa scolarité. Cela permettra de nous assurer que cette instruction a bel et bien lieu en famille. J'ai ainsi été récemment conduit, avec le préfet des Bouches-du-Rhône, à fermer une école salafiste clandestine à Marseille, alors que les parents avaient affirmé que leurs enfants étaient instruits chez eux.

Vous avez évoqué la fonction pédagogique des assistants d'éducation. Un des points les plus importants de l'évolution de la formation des professeurs portera sur ce nouveau statut autorisé pour certains de ces assistants d'éducation. L'objectif est que, dès la deuxième année de leurs études supérieures, des étudiants puissent bénéficier de ce statut leur permettant d'effectuer quelques heures en établissement afin de se familiariser avec les réalités du monde scolaire et de tester leur vocation. Ils percevront un salaire de plus de 700 euros, cumulable avec une bourse, ce qui les rendra autonomes, et ils prendront progressivement des responsabilités. Pour caricaturer ce dispositif, d'aucuns prétendent qu'il s'agit de bénéficier de personnels à 250 euros, très jeunes et mal formés pour remplacer les professeurs. C'est faux ! C'est tout sauf ça : au contraire, ce seront de jeunes étudiants bien payés assumant au début des fonctions de surveillance habituellement confiées à des assistants d'éducation et qui, au fil de leur parcours, se verront confier des responsabilités de plus en plus importantes. Une fois en Master 1, comme c'est le cas pour les étudiants en stage, ils assumeront des fonctions pédagogiques sous la supervision des professeurs. Cette mesure permettra, je l'espère, d'augmenter le vivier, mais amènera aussi progressivement les intéressés vers le métier, car tout en conservant bien entendu le principe du concours, nous renforçons beaucoup la part du continuum. Cela nous renvoie aux propos de Mme la rapporteure sur la formation continuée au cours des premières années de l'exercice du métier.

À Mme Fiat, je voudrais dire que la confiance ne dépend pas du seul ministre : elle dépend de tout le monde. Ainsi nos commentaires participent-ils ou non du cercle vertueux de la confiance. Je ne prétends pas que tout le monde doit penser la même chose ou que l'on doit me faire une confiance absolue sur tout. Je vous demande simplement de vous inscrire dans une démarche de bonne foi : je crois en la vôtre, croyez en la mienne dans les objectifs que je présente. Si j'en juge par certains commentaires sur les réseaux sociaux, le chemin pour l'école de la confiance est encore long ! Chacun doit en être conscient, en cultivant toujours les interprétations négatives, nous contribuons à la faiblesse du prestige de notre système et alimentons des inquiétudes, qui parfois n'ont pas lieu d'être. Encore une fois, je crois à l'enclenchement d'une logique de confiance.

Comme je l'ai indiqué, je suis prêt à revenir sur la rédaction de l'article 1er afin d'éviter les malentendus. Essayons tous de jouer le jeu de la confiance dans la réécriture que nous allons faire de cet article.

Je vous remercie, par ailleurs, d'avoir soutenu l'instruction obligatoire à trois ans, qui figurait au programme de votre candidat à l'élection présidentielle. Nous pourrions peut-être trouver un accord sur ce sujet.

Mme Faucillon a évoqué une reprise en main forte par le ministère. Je me bornerai à assumer, en parfait accord avec le ministère de l'enseignement supérieur, de concevoir les futures INSPÉ comme des écoles professionnelles au sein des universités. Ce n'est pas une reprise en main : cela traduit notre volonté d'être plus logiques avec nous-mêmes. En effet, dès lors que l'on souhaite conjuguer excellence scientifique et pragmatisme, on arrive à des structures du type des INSPÉ.

Il a été fait référence à l'éducation prioritaire : la mission confiée à Pierre Mathiot et à Ariane Azéma sur la territorialisation étudie effectivement les cohérences nécessaires avec la loi. Oui, nous ferons évoluer l'éducation prioritaire. Oui, les cités éducatives seront en place à la rentrée prochaine. J'accomplis ce travail avec mon collègue Julien Denormandie pour que des moyens supplémentaires, notamment sur le plan social, dans une vision englobant l'école et le collège, permettent à ces cités éducatives d'agir sur les déterminants sociaux de la réussite scolaire.

M. Molac a exprimé des inquiétudes sur les risques de diversification du système que représentent les EPLEI : je retiendrai aussi ce raisonnement lorsque nous parlerons des langues régionales (Sourires), mais il faut effectivement être attentif à ce que ces institutions ne créent pas trop d'effets de divergence.

À Mme Géraldine Bannier, je confirme que l'expérimentation pourrait parfois concerner le service des enseignants. Sur le plan local, il est intéressant que des expérimentations « gagnant-gagnant » puissent être conduites pour les enseignants dans la vision du temps, cela dans le respect des normes.

À Mme Le Grip, qui m'a interrogé sur la lutte contre les violences scolaires, j'indique que je ferai une présentation au Conseil des ministres mercredi prochain. Le rapport du groupe de travail que j'ai constitué me sera remis dans les jours prochains. J'en rappelle les trois axes : sécurisation des abords, aide à la parentalité et responsabilisation des familles, enfin, structures pour polyexclus. Je souligne par ailleurs que les débats qui ont eu cours il y a une dizaine de jours étaient fondés sur un article de presse, et pas davantage. Chaque chose viendra en son temps.

Je remercie le député Roussel pour ses propos sur le CAPES informatique, qui est très important. L'écosystème français des high-techs est également essentiel. C'est à relier à mon propos sur la France, puissance éducative. En ce domaine, notre pays possède de fait tous les atouts nécessaires puisque son grand service public de l'éducation nationale, avec ses treize millions d'élèves, est en mesure d'actionner un effet de levier majeur lorsque ces entreprises se projettent sur le plan international.

À plusieurs reprises, j'ai été conduit à utiliser l'expression « Poitiers, capitale de l'éducation nationale » pour signifier que nous avons là des opérateurs ayant vocation à être en pointe sur les enjeux numériques, et à être des incubateurs d'expérimentation numérique. Je fais référence à CANOPÉ, mais aussi au CNED (Centre national d'enseignement à distance) et à l'ESENESR (École supérieure de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche), devenue depuis quelques jours l'Institut des hautes études de l'éducation et de la formation (IHEEF).

Je confirme donc qu'avec ce que nous avons fait en matière informatique, notamment à la faveur de la réforme du lycée et du CAPES informatique, cette loi contribue au développement des high-techs françaises.

Je confirme à Mme Rixain que je viens de recevoir les conclusions de la mission flash sur les enfants intellectuellement précoces, dont elle a été co-rapporteure. Je l'en remercie, car le sujet est très important, et j'y prêterai la plus grande attention.

Je rappelle à Mme la députée Dumas qu'à Mayotte, l'État, à titre dérogatoire, est compétent pour les infrastructures. Il n'y aura donc pas, pour les collectivités, de frais supplémentaires liés à l'instruction obligatoire. Je me suis rendu là-bas au moment de la rentrée scolaire, afin précisément d'estimer les besoins en matière d'investissement et de nouvelles ressources humaines.

À Mme Brugnera, je confirme que le nouveau statut d'EPLEI permettra de conserver les structures des établissements actuels. Toutefois, des mesures réglementaires devront être prises pour préciser les choses.

Madame Piron, la création de l'EPLEI constitue l'occasion de redessiner une vision cohérente des diverses formules internationales. Nous donnerons des garanties sur la justice sociale, préoccupation beaucoup exprimée aujourd'hui. C'est un engagement que je prends.

À cette occasion, je réponds positivement aux questions de Mme Racon-Bouzon portant sur le principe de l'accueil dès la maternelle des enfants de l'environnement de l'établissement. Cela est très souhaitable, et nous le ferons pour favoriser la mixité sociale.

Je veux dire que j'adhère à l'esprit de la question que Mme Anthoine m'a posée sur la réorganisation territoriale. Les précisions que je serai amené à donner dans les prochains jours montreront notre intérêt pour la proximité en tenant compte des forces et des faiblesses de la réforme régionale.

À Mme Colboc, j'indique que nous portons une attention particulière aux enfants des gens du voyage et que l'instruction obligatoire dès trois ans doit nous conduire à reprendre ce sujet de façon volontaire. Nous savons en effet que ces enfants sont très représentatifs de ceux qui ne vont pas à l'école maternelle et présentent un premier retard lors de leur arrivée au CP lorsque des formules plus ou moins bien adaptées leur sont proposées. La loi ne traite toutefois pas spécifiquement ce sujet, mais pourrait être l'occasion de constituer un groupe de travail qui lui serait consacré.

J'indique à Mme Cazarian que nous coordonnerons mieux les services sociaux des collectivités et de l'éducation nationale. Un vade-mecum est en cours d'élaboration par la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) en concertation avec les collectivités locales.

Au sujet de la scolarisation obligatoire à l'âge de trois ans, je confirme à Mme Agnès Thill que c'est bien l'année civile qui compte. C'est donc au mois de septembre de l'année des trois ans que les enfants sont scolarisés. Pour répondre à M. Molac, cela n'empêche toutefois pas une scolarisation à l'âge de deux ans mais cela ne relève pas de l'instruction obligatoire.

À Mme Cécile Rilhac, j'indique que nous reparlerons prochainement de la direction des écoles. En tout cas, le maître mot est celui de pragmatisme pour favoriser les formules partant de l'établissement pour évaluer quel type de direction est souhaitable territoire par territoire. Notre vision de cette question doit être adaptable aux enjeux de territoire, y compris en privilégiant une conception du sujet englobant l'école et le collège.

J'ai entendu ce qu'a dit Mme la députée Mörch à propos de l'expérience de l'école Jean Jaurès. D'autres questions ont porté sur la scalabilité des expérimentations. À la faveur de la loi, certaines d'entre elles devront arriver à maturité.

Mme Jacqueline Dubois m'a interrogé sur le bilan des Pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL). Il est trop tôt pour l'établir. Toutefois, les premiers retours sont positifs. Le but est de parvenir à une gestion au plus près du terrain des besoins en ressources humaines pour l'accompagnement des élèves handicapés. Cela fait partie des thèmes abordés par la concertation que j'ai précédemment évoquée.

La question de Mme Florence Provendier sur le déficit d'attention des écoliers nous renvoie à l'interdiction des téléphones portables et à ses premiers effets positifs, que j'ai pu le mesurer en visitant plusieurs établissements. Ainsi, dans un collège des Hautes-Alpes, les élèves participent davantage aux temps d'études « devoirs faits ». Par ailleurs, les expérimentations de philosophie et de méditation à l'école maternelle sont bienvenues. Tout ce qui va dans le sens d'une plus grande concentration est bénéfique alors que des difficultés sont constatées dans ce domaine dès le plus jeune âge. Il s'agit d'un phénomène social et sociétal préoccupant, et il nous revient de prendre de telles initiatives.

Je suis d'accord avec le député Bois qui a considéré que l'institution des EPLEI devait être l'occasion de pratiquer une gestion innovante des ressources humaines. Je le répète, ces établissements doivent être considérés comme des locomotives, non comme des bulles.

Je termine avec Mme Florence Granjus, qui a relayé les interrogations des lycéens, qui sont notre souci premier et notre raison d'être. La réforme du lycée, qui n'est pas spécifiquement concernée par ce texte, n'enferme pas les élèves dans des couloirs de façon irréversible : au contraire, elle facilite bien plus qu'auparavant les changements d'orientation. Là encore, il faut veiller à tenir un discours de confiance. La réforme permet une offre accrue de choix et de combinaisons de disciplines, et crée aussi beaucoup plus de réversibilité et de passerelles. Elle permet aussi aux lycéens de murir leur choix entre les mois de janvier et juin de façon bien plus anticipée que précédemment.

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