Intervention de Jean-Luc Davy

Réunion du jeudi 29 novembre 2018 à 10h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Jean-Luc Davy, président de l'Association des maires de Maine-et-Loire (AMF49) et du Syndicat intercommunal d'énergies de Maine-et-Loire (SIÉML) :

Nous sommes très heureux de participer à cette audition, afin de vous apporter notre témoignage et de vous faire part des actions menées dans le Maine-et-Loire.

Je suis président de l'Association des maires de Maine-et-Loire, département qui compte un peu plus de 800 000 habitants. Il s'organise autour de trois grandes agglomérations, Angers, Cholet et Saumur, avec un tissu rural maillé d'unités urbaines importantes. Il nous a semblé, voici quelques années, suite à une rencontre avec le préfet Vuibert et aux expériences menées dans les départements voisins, notamment la Vendée et l'Indre-et-Loire, qu'il serait intéressant que le syndicat intercommunal d'énergies du Maine-et-Loire se saisisse de la question de la mobilité électrique, avec un plan de déploiement couvrant l'ensemble du département. Ce chantier s'est traduit par la pose de la première borne en 2015 et s'est achevé début 2017.

Le réseau départemental d'infrastructures de recharge de véhicules électriques, baptisé SmiléMobi (Smilé étant l'anagramme de SIÉML), est aujourd'hui parfaitement équilibré et interopéré. Je précise que cette opération s'effectue en pleine concertation avec notre concessionnaire ENEDIS, dont je salue les représentants ici présents. Nous avons ainsi implanté dans le Maine-et-Loire 186 bornes de 18 kilovoltampères (kVA), dites « bornes accélérées », chacune munie de deux points de charge. Le réseau est ainsi assez homogène, avec la présence d'au moins une borne tous les vingt kilomètres, soit une borne au minimum sur chacun des 41 anciens cantons du département, en fonction de la densité urbaine. La ville d'Angers compte par exemple 18 bornes.

Ce premier plan 2016-2017 vient d'être complété fin 2017 avec l'implantation de dix bornes rapides, disposant de trois standards de prises : type 2, Combo et ChadeMo. Les 186 bornes accélérées impliquent que les automobilistes aient dans leur coffre le câble de recharge adapté, tandis que les bornes rapides sont, sur le modèle des stations-service, munies des trois câbles, selon le type de prise nécessaire.

Nous avons dès le départ décidé d'une tarification sur l'ensemble du service de recharge, considérant que l'investissement de deniers publics impliquait en retour une participation de l'utilisateur. Deux systèmes ont ainsi été conçus pour l'utilisation des bornes accélérées : d'une part, un badge RFID (Radio-frequency identification), avec un système d'abonnement souscrit auprès de notre concessionnaire sur cette application, Bouygues Énergies et Services, d'autre part, une application pour l'itinérance, sur smartphone, avec un paiement par carte bancaire. Pour les bornes rapides, a également été mis en place, outre le système RFID, un dispositif de paiement par carte bancaire. À titre d'exemple, une heure de connexion coûte un peu moins de 4 euros.

Ce réseau départemental est donc aujourd'hui relativement bien maillé, notamment grâce à l'implication du syndicat intercommunal d'énergies. Nous avons bien évidemment travaillé avec les syndicats voisins, au sein du pôle Énergie Pays de la Loire, réunissant les cinq autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE) de ce territoire. Nous avons établi dans ce cadre une convergence tarifaire, afin de proposer les mêmes tarifs sur les quelque 500 bornes réparties sur les cinq départements des Pays de la Loire. Nous travaillons bien évidemment sur la question de l'interopérabilité, qui est une réalité aujourd'hui.

Nous avons réalisé un marché englobant la totalité du dispositif, de la pose de la borne jusqu'à la maintenance, en passant par les systèmes de paiement. Bouygues Énergies et Services, qui a obtenu ce marché, a mis en place un réseau baptisé Alizé, étendu progressivement à des départements voisins, notamment l'Ille-et-Vilaine, la Vendée et la Mayenne.

Par ailleurs, nous avons contractualisé avec la plateforme GIREVE (Groupement pour l'itinérance des recharges électriques de véhicules), qui nous permet de travailler sur le développement de l'itinérance entrante et sortante. De nombreux autres opérateurs ont signé la charte d'itinérance : je pense notamment à CHARGEMAP, NEW MOTION, et aux syndicats départementaux d'énergie voisins. Nous disposons aussi de conventions pour l'itinérance sortante, ainsi que d'une convention avec KIWHI PASS. Nous essayons ainsi de travailler avec l'ensemble des partenaires présents sur la place publique.

Depuis deux ans, le bilan des charges enregistrées fait apparaître que les utilisateurs du Maine-et-Loire rechargent aussi dans les Landes, les Bouches-du-Rhône, etc. Nous enregistrons par ailleurs une augmentation constante des chargements via CHARGEMAP, qui représente 80 % de l'itinérance entrante.

Nous avons conscience d'être aujourd'hui à la croisée des chemins, puisque ce secteur d'activité est devenu très concurrentiel, alors qu'il se caractérisait, lorsque nous avons initié ce vaste chantier voici trois ans, par une véritable carence de l'initiative privée. Les acteurs présents proposent une offre très différenciée. SODETREL est développé principalement sur les aires d'autoroute, mais pas seulement, puisque l'une de ses bornes est implantée sur le parking de Beaucouzé, en périphérie d'Angers. Nous disposons ainsi de trois bornes SODETREL de 50 kVA dans le département, dont deux sur le réseau autoroutier. Le consortium de constructeurs allemands IONITY a construit une station de six superchargeurs de 100kVA Combo sur l'aire d'autoroute des Portes d'Angers, ce qui pose la question de la charge très importante induite sur le réseau électrique. TESLA, de son côté, prévoit un développement similaire quasiment au même endroit, à l'intersection des autoroutes A11 et A87, pour un ravitaillement réservé aux véhicules de cette marque. Enfin, les concessionnaires automobiles, tels que Renault ou Nissan, proposent généralement une offre de recharge, tout comme la grande distribution.

L'équilibre économique, qui était déjà difficile à appréhender lorsque nous étions seuls, est introuvable aujourd'hui, du fait de cette relative pression concurrentielle, ajoutée à divers autres facteurs. Le SIÉML ayant fait le choix de mettre en place un concours économique, par opposition à une délégation de service public, nous ne sommes pas à l'équilibre financier. Nous avons investi 2,3 millions d'euros pour déployer les 186 bornes accélérées et les 10 bornes rapides. Pour ce faire, nous avons bénéficié d'aides importantes de l'ADEME, à hauteur de 50 % du coût des bornes accélérées et de 30 % de celui des bornes rapides, ainsi que de la Région des Pays de la Loire. Notre budget est toutefois en déséquilibre, puisqu'au-delà de l'investissement, le budget d'exploitation est de 100 000 euros, avec un budget de communication important de 50 000 euros nets. Il faut savoir par ailleurs que les recettes d'exploitation ne dépasseront pas 30 000 euros en 2018.

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