Intervention de Florence Lassarade

Réunion du jeudi 17 janvier 2019 à 9h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Florence Lassarade, sénatrice :

Je réagirai d'abord à ce que vient de dire M. Chapouthier. En tant que pédiatre, spécialiste des prématurés, lorsque j'ai commencé mes études et ma pratique, on nous expliquait effectivement que le prématuré n'avait aucune sensibilité, et les actes, qui étaient choquants pour moi, jeune interne en pédiatrie, étaient faits sans anesthésie. Heureusement les choses évoluent. D'ailleurs, c'est en évoluant en ce sens qu'on a pu aussi se préoccuper de sensibilités et de douleurs animales. Je pense qu'on peut faire le parallèle entre les progrès en médecine humaine et les progrès en expérimentation animale. Actuellement, le prématuré a un environnement extrêmement rassurant qui tient compte de la possibilité de ressentir la douleur.

Les questions du public et des internautes se recoupent entre elles, ainsi qu'avec certaines questions posées par mes collègues parlementaires. Sur la comparaison européenne, on note qu'en France, le traitement des animaux est plus sévère que dans d'autres pays : 17 % des animaux en France subissent des actes sévères contre 7 % en Allemagne, 6 % au Royaume-Uni.

On revient également sur les animaux utilisés dans les parcours éducatifs, en rappelant le chiffre de 35 000 animaux en France, et des chiffres bien inférieurs dans nos pays voisins. Pourquoi une telle situation spécifique en France ? On l'a déjà abordé.

Voici quelques autres questions :

1 Y a-t-il un manque de moyens attribués à l'université pour utiliser des méthodes alternatives ?

2 Dans le public et parmi les internautes, on s'inquiète de la publication des statistiques françaises, tardives et souvent non rétrospectives. Elles ne diminuent pas depuis quelques années. N'est-on pas arrivé à la limite des effets de la directive européenne de 2010 ? Il n'y a pas de statistiques sur les animaux utilisés sans que des résultats intéressants en ressortent. Les chercheurs sont-ils évalués sur l'efficacité des protocoles pour éviter le gaspillage d'animaux ?

3 Dans le public, la notion de responsabilité apparaît. On demande s'il y a un type de responsabilité engagée à l'égard de chercheurs qui n'obtiennent pas de résultats ou qui effectuent des tests sur les animaux.

4 À propos des critères pour évaluer la souffrance et la formation, comment définir le degré d'une intervention légère, modérée ou sévère ? Existe-t-il un moyen objectif pour l'expérimentateur de décider si l'expérience est douloureuse ou non pour l'animal ? Ne faut-il pas aller au-delà de la souffrance, puisque les animaux sont également sujets à un mal-être, comme indiqué dans l'expertise à laquelle M. Bertrand Deputte a contribué ?

5 Les comités d'éthique et la Charte nationale d'éthique : comment les comités sont-ils composés ? Est-il envisageable de faire évoluer la Charte nationale en attendant que la directive européenne évolue ? La Charte est un engagement moral, mais en cas de non-respect, le signataire peut-il être poursuivi ? Y a-t-il un rapport d'activité de la Commission nationale de l'expérimentation animale qui permettrait au grand public de voir concrètement ses actions ?

6 La formation des personnels animaliers : est-il possible de prendre son poste avant d'avoir suivi des formations ? On a vu qu'a priori, la réponse est non. À titre personnel, je m'interroge sur les trois jours de formation évoqués par période de six ans. N'est-ce pas un peu réduit par rapport aux formations des médecins par exemple, qui sont sensiblement plus longues ? Existe-t-il une formation spécifique en algologie et une formation au comportement des animaux ?

7 Y a-t-il une possibilité de restreindre l'utilisation des primates à la recherche sur les maladies graves ?

8 La frontière entre expérimentation et observation : comment ce sujet apparaît-il dans les textes ?

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