Cette proposition de loi me laisse très dubitatif. Je m'interroge notamment sur la place de la ruralité dans ce qu'il faut bien appeler un « machin » tant la nature juridique de l'ANCT est « hybride », pour reprendre les termes du Conseil d'État lui-même. De quoi la ruralité a-t-elle besoin ? D'une ingénierie administrative et technique, de normes adaptées à sa spécificité – j'avais d'ailleurs déposé une proposition de loi en ce sens – et d'argent car nos territoires sont financièrement asséchés. Pourquoi, alors qu'il existe un ministère de la ville et un bureau urbain au Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), la ruralité n'est-elle pas mise en exergue dans cette agence nationale chargée de la cohésion des territoires ?
Je reviens sur sa nature juridique. On parle d'un établissement public de l'État de nature hybride, en faisant peut-être référence à la structure juridique de l'Office national de la forêt (ONF) ou de Pôle emploi. Mais cet organisme est à la lisière d'un Établissement public industriel et commercial (EPIC) et il n'est pas une autorité administrative indépendante. Il faudra bien déterminer sa nature juridique.
Par ailleurs, dès lors que les préfets seront les référents de proximité, on voit bien que cette agence sera un outil à la disposition de l'État dans le cadre de sa politique dite « de territoire ». En revanche, on voit moins l'articulation entre cette agence, le CGET, l'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA), qui disparaîtrait, l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), la Caisse des dépôts et consignations, Bpifrance, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME), l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), l'Agence du numérique, le programme « Action coeur de ville ». Le dispositif est donc très flou. Rien n'est dit non plus sur l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), qui définit des orientations en matière d'infrastructures, ni sur les mobilités. On ne sait donc pas comment le dispositif à venir sera articulé avec les grands programmes ferroviaires, routiers et aéroportuaires.
Enfin, qu'en est-il du coût de fonctionnement de la future agence ? Qui va payer ? Quels seront les salaires des agents, notamment celui du directeur général ? En outre, j'observe que la future agence sera composée de fonctionnaires d'État, lesquels ne sont pas forcément les mieux placés pour avoir une bonne vision de la réalité des territoires ruraux. J'aurais préféré qu'on inclue le privé et peut-être des cabinets d'expertise extérieure.
À ce stade, le groupe UDI, Agir et Indépendants est très mitigé sur la création et l'organisation de cette agence nationale.