Je remercie Mme la rapporteure pour son rapport qui met en évidence les différentes positions des États-membres et le besoin de crédibiliser la parole scientifique des experts à ce niveau. Les accusations de conflits d'intérêts de l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avec le groupe industriel Monsanto ont mis à mal la parole scientifique. Ce scandale montre que nous avons besoin d'une agence véritablement indépendante, sur le modèle de l'ANSES en France, qui assure un contrôle strict des produits. Notre santé mérite la transparence ; c'est pourquoi nous avons besoin d'études réellement indépendantes et coordonnées au niveau européen.
La parole de la France est essentielle. Grâce à la détermination et à l'engagement du Président de la République, nous avons réussi à réduire à cinq ans au lieu de quinze la période de renouvellement de l'autorisation du glyphosate au niveau européen, mais nous devons encore convaincre nos voisins d'aller plus loin. Une coordination est indispensable pour apporter une réponse globale à la réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques. C'est ce que nous demandons dans le cadre de la mission d'information commune sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate, présidée par notre collègue M. Julien Dive et dont je suis le corapporteur avec M. Jean-Luc Fugit, membre de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Pour rappel, les travaux de cette mission d'information ont débuté le 27 septembre 2018 avec l'audition conjointe des ministres MM. Didier Guillaume et François de Rugy. La mission a notamment auditionné le président de l'INRA, des représentants de l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (IRSTEA), le président de l'association des chambres d'agriculture et M. le préfet Pierre-Étienne Bisch, nommé en décembre 2018 coordinateur interministériel de cette mission et du plan de réduction d'utilisation des produits phytopharmaceutiques, dit plan Écophyto 2 +.
Depuis le début de la législature, nous n'avons pas toujours été d'accord sur la réponse adéquate à apporter. Nous avons fait un choix courageux : ne pas inscrire dans la loi l'interdiction du glyphosate. C'est précisément le contraire de ce que propose le texte que nous examinons aujourd'hui. L'interdiction du glyphosate est actée, le Président de la République M. Emmanuel Macron a pris l'engagement d'arrêter l'utilisation du glyphosate d'ici à trois ans ; il est hors de question de revenir dessus.
La solution ne sera pas nécessairement une autre molécule. C'est d'abord par un changement de pratiques culturales que nous sortirons du glyphosate, mais ce changement ne peut pas se faire du jour au lendemain, nous ne pouvons pas imposer un tel bouleversement à une profession en souffrance, dont le tiers des membres gagnent moins de 350 euros par mois. C'est ensemble, main dans la main avec les paysans, que nous allons avancer.
Concrètement, notre majorité a déjà pris les devants avec des mesures fortes depuis le début de la législature sur la réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et la transition de notre agriculture, avec notamment, dans le cadre du projet de loi EGALIM, la séparation de la vente et du conseil des produits phytopharmaceutiques, l'interdiction des remises, rabais et ristournes sur la vente des produits, l'objectif de 15 % de surface agricole utile dédiée à l'agriculture biologique et l'objectif de 20 % de produits bio parmi 50 % de produits locaux et sous signe officiel de qualité dans la restauration collective.
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019, nous avons engagé davantage de moyens en faveur de l'expérimentation des fermes DEPHY qui permettent la réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques, l'augmentation des taux de la redevance pour pollutions diffuses (RPD) qui permettra de financer le développement de l'agriculture biologique. Nous avons notamment augmenté cette taxe de 50 % pour le glyphosate.
Quatre ministères sont mobilisés pour sortir du glyphosate : le ministère de la transition écologique et solidaire, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, le ministère des solidarités et de la santé, et le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Le Gouvernement s'est donné des moyens à la hauteur de nos responsabilités et a pris plusieurs engagements pour accompagner la stratégie de sortie du glyphosate : nomination d'un préfet coordinateur ; mise en place d'un centre de ressources piloté par l'Assemblée permanente des Chambres d'agriculture (APCA), l'Association de coordination technique agricole (ACTA) et l'INRA, accessible à l'ensemble de la profession agricole dédié aux alternatives au glyphosate et qui vise à proposer des solutions concrètes aux agriculteurs selon une approche territoriale ; renforcement des mesures d'accompagnement pour diffuser les solutions et trouver des alternatives ; suivi des quantités vendues et utilisées afin de faire la transparence sur les usages, et nouvel examen par l'ANSES de l'ensemble des autorisations de mise sur le marché des produits contenant du glyphosate avec une date butoir à trois ans. Un programme prioritaire de recherche sur la sortie du glyphosate est en train d'être mis en place par le ministère de l'enseignement et la recherche. Tout le monde sera mis à contribution pour sortir du glyphosate, les régions, l'Agence française pour la biodiversité (AFB), les agences de l'eau, les collectivités territoriales et les groupes de professionnels agricoles.
Au nom du principe de précaution, il faut interdire le glyphosate et nous le ferons tous ensemble, de manière coordonnée, en bonne intelligence. Ce sont les paysans qui sont les principaux exposés. Madame la rapporteure, vous jugez vous-même dans votre rapport que le délai de trois ans est suffisant pour accompagner les agriculteurs dans la transition agro-écologique et trouver des alternatives au glyphosate pour les 10 % d'usage restants. Nous aussi, députés de la majorité, en sommes persuadés. Dans trois ans, nous aurons trouvé des solutions pour la très grande majorité des cultures. Dans trois ans, nous interdirons le glyphosate ; nous n'avons pas besoin d'une loi idéologique pour cela.