Merci, Madame la rapporteure, de votre exposé oral sur cette proposition de loi qui, je dois bien le dire, arrive à un moment un peu étonnant dans la mesure où, on l'a rappelé, une mission d'information commune travaille sur ce sujet depuis septembre 2018, qui comprend d'ailleurs un membre du groupe La France insoumise. Nous avons mené des auditions et d'autres auront lieu d'ici à la fin de cette année, à tout le moins d'ici à l'été, où un rapport d'étape sera remis. Cette mission d'information commune travaillera ces trois prochaines années et est, je le rappelle, quelque chose d'unique : unique en France puisqu'il n'y a pas d'équivalent au Sénat, unique en Europe puisqu'aucun Parlement européen ne s'est saisi du sujet. Il n'y a qu'en France que des parlementaires ont choisi de s'en saisir ; nous aurions pu voter un amendement, ignorer le sujet, mais nous avons courageusement choisi de le prendre à bras-le-corps et de conduire un travail de fond avec les différents acteurs.
L'usage du glyphosate est interdit en France depuis le 1er janvier 2017 pour les collectivités. Lorsque j'étais maire de ma commune, j'avais même proscrit son usage ainsi que celui d'autres pesticides depuis 2015. Il est également interdit en France pour les particuliers depuis le 1er janvier 2019. Il est utile de le rappeler : on oublie trop souvent que les utilisateurs du glyphosate étaient surtout les particuliers, qui ne disposaient parfois pas de bonnes préconisations d'usage et de dosage, dans les jardins privés mais aussi publics, ce qui contribuait à l'accumulation du glyphosate dans les sols.
N'oublions pas non plus que le premier utilisateur, en tant que personne morale, du glyphosate en France, n'a rien à voir avec le monde agricole : c'est la SNCF… Compte tenu des moyens dont elle dispose, je ne doute pas qu'elle saura trouver une alternative ; j'imagine d'ailleurs que les conseils d'usage et d'application du glyphosate à la SNCF ne sont pas les mêmes que dans l'agriculture.
Mais quand on parle de glyphosate, on a surtout l'agriculture à l'esprit ; c'est normal puisque c'est sans doute là qu'il est le plus utilisé. L'usage du glyphosate diffère selon les activités agricoles ; dans certains cas, il est possible de s'en passer. Un maraîcher possédant un ou deux hectares de cultures peut plus facilement renoncer à cet herbicide qu'un agriculteur céréalier sur trente ou quarante hectares, à plus forte raison lorsqu'il pratique ce que l'on appelle l'agriculture de conservation des sols (ACS), qui vise à moins recourir au travail de la terre, à moins labourer, et à utiliser les sols comme stockage de CO2. C'est une technique qui assure la rotation des cultures de céréales et en même temps met en place des couverts végétaux comme engrais : ce sont ces couverts végétaux qui sont traités au glyphosate, à l'automne et non avant récolte. Rappelons que dans certains pays, notamment en Europe de l'Est et en Amérique du Sud, le délai de traitement avant récolte est bien plus court qu'en France. Parfois le glyphosate est appliqué quelques jours avant le début de la moisson afin de définir un créneau bien précis pour l'entreprise chargée de la moisson – dans ces structures agricoles, l'agriculteur n'est pas toujours propriétaire de la moissonneuse-batteuse.
Le temps ne me permet pas de vous poser de nombreuses questions, Madame la rapporteure. Vous avez fait état des traces de glyphosate dans les cours d'eau. Mais avez-vous fait la distinction entre l'AMPA (acide aminométhylphosphonique), qui est le métabolite du glyphosate, et les lessives et détergents qui s'y retrouvent également ?