Intervention de Jean-Pierre Cubertafon

Séance en hémicycle du mardi 19 février 2019 à 21h30
Citoyen sauveteur — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Cubertafon :

La discussion de la présente proposition de loi est l'occasion de mettre en avant une réalité grave et insuffisamment connue, celle des décès à la suite d'un arrêt cardiaque inopiné. Chaque année, entre 40 000 et 50 000 personnes meurent d'un arrêt cardiaque ; c'est la cause de 9 % des décès. Un chiffre doit nous alerter davantage encore : le taux de survie. Il est particulièrement faible en France, de l'ordre de 5 %, alors qu'il est proche de 20 %, voire de 30 %, chez nos voisins anglo-saxons ou scandinaves. Cet écart est choquant.

Notre système de secours d'urgence fonctionne bien, avec des professionnels de grande qualité, à qui je tiens à rendre hommage, pour leur courage et leur dévouement. En France, certains l'ont dit précédemment, les secours mettent en moyenne treize minutes à se rendre sur les lieux d'un accident. C'est peu, mais, en cas d'arrêt cardiaque, les premières minutes sont cruciales : au-delà de trois minutes sans massage cardiaque, les lésions cérébrales sont généralement irréversibles ; au-delà de dix minutes, les chances de survie sont quasi nulles.

Quel est donc le chaînon intermédiaire ? Il s'agit de nous tous, citoyens, qui devons prodiguer les gestes de premiers secours en attendant l'arrivée des professionnels. Or le constat est alarmant : d'après le rapport Pelloux-Faure, « le taux de formation de la population française est parmi les plus bas du monde ». D'après une étude de l'IFOP, 46 % des Français déclarent avoir suivi une formation ou une initiation aux premiers secours. Selon d'autres estimations, ce chiffre serait plutôt de 30 % environ. Dans les pays scandinaves, c'est plus de 90 % de la population qui est formée aux premiers secours. Il est urgent que notre pays rattrape son retard.

Il importe de souligner les efforts accomplis au cours des dernières années. Depuis 2007, le grand public est autorisé à utiliser les défibrillateurs automatisés externes – DAE – , et environ 180 000 appareils de ce type ont été déployés. En outre, une loi récente, de juin 2018, a renforcé l'obligation, pour certains établissements recevant du public, de s'équiper d'un DAE « visible et facile d'accès ». Cette obligation entre progressivement en vigueur et sera pleinement effective le 1er janvier 2022.

Concernant l'offre de formation, le module GQS – gestes qui sauvent – a été introduit en 2017 au côté de la formation PSC1 – prévention et secours civiques de niveau 1. Il est plus léger – il dure deux heures – et, surtout, gratuit. De plus, les obligations de formation en milieu scolaire ont été renforcées. Enfin, il faut souligner que de nouveaux outils se développent, notamment des applications mobiles qui permettent de géolocaliser des personnes, préalablement inscrites, capables de réaliser les gestes de premiers secours et de porter assistance dans l'attente des secours.

Ces avancées sont réelles, mais il faut désormais aller plus loin. C'est pourquoi je tiens à remercier nos collègues de La République en marche, en particulier Jean-Charles Colas-Roy, qui est à l'initiative de la proposition de loi, ainsi que tous les députés qui ont travaillé sur ce texte. Il permet de mettre ce sujet sur le devant de la scène et comporte de nouvelles dispositions permettant de lutter contre l'arrêt cardiaque et de sensibiliser davantage la population aux gestes qui sauvent.

Les auteurs de la proposition de loi se sont fixé des objectifs ambitieux : sensibiliser 80 % de la population aux gestes qui sauvent et relever le taux de survie à plus de 10 % d'ici à dix ans. Je pense toutefois que ces objectifs sont réalistes et qu'il est de notre devoir de tout mettre en oeuvre pour les atteindre. C'est l'objet de la proposition de loi, qui devra être accompagnée d'un important plan d'action et de mesures d'ordre réglementaire.

La création du statut de citoyen sauveteur dans le code de la sécurité civile me paraît répondre à une attente de la population. Tous les formateurs vous le diront, une des premières questions posées par les bénéficiaires de la formation a trait à l'engagement de leur responsabilité en cas de mauvaise manipulation, et aux risques encourus. Bien que les citoyens portant assistance soient d'ores et déjà protégés, la création de ce statut permettra de clarifier les choses.

Le deuxième axe de cette proposition de loi est de renforcer la sensibilisation aux gestes qui sauvent, à plusieurs moments de la vie. Il importe en effet que les personnes formées bénéficient de rappels réguliers concernant ces gestes. La première sensibilisation se fait à l'école. La notion de « continuum éducatif » entre le premier et le second degré, qui a été introduite en commission des lois, me paraît tout à fait appropriée. Il est nécessaire que les élèves soient sensibilisés à plusieurs moments de leur scolarité, avec des approches différentes en fonction de leur âge, et il me semble qu'il est possible de commencer, dès la maternelle, l'apprentissage des bons réflexes.

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