Madame la présidente, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, je suis très honoré de vous présenter, aux côtés d'Agnès Buzyn, le premier projet de loi de financement de la sécurité sociale de la législature. Je vais apporter certains éléments complémentaires.
Je m'arrêterai d'abord sur la contribution de l'ensemble des branches au rétablissement des comptes publics.
Pour la huitième année consécutive, l'ONDAM est tenu, avec 4,1 milliards d'économies ; en matière de gestion administrative des caisses, les dépenses sont maîtrisées. En 2017, et sans doute en 2018, si l'on suit l'avis du Haut Conseil de finances publiques et le consensus des économistes, l'amélioration de la conjoncture économique se traduira par une hausse du produit des cotisations sociales, assises sur une masse salariale qui devrait augmenter de 3,3 % en 2017 et de 3,1 % en 2018.
Le déficit de l'assurance maladie revient à 4,1 milliards d'euros, soit une amélioration de 700 millions d'euros en un an. C'est le meilleur résultat depuis 2001. La branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) est excédentaire de plus d'un milliard d'euros. L'équilibre de la branche vieillesse du régime général continue de s'améliorer ; elle est excédentaire de plus d'1,3 milliard d'euros. Enfin, la branche famille devient, pour la première fois depuis dix ans, excédentaire à plus de 300 millions d'euros. Par ailleurs, le déficit du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) se stabilise en 2017.
En 2018, l'effort de maîtrise de la dépense est amplifié. Nous établissons une stratégie pour plusieurs années, et nous souhaitons un désendettement social de grande ampleur.
La baisse de l'endettement se poursuit. Depuis 2015, le montant total de la dette sociale régresse. Ce mouvement s'est accéléré en 2017 : au 31 décembre, la caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) aura remboursé en une seule année quelque 15 milliards, ce qui porterait le montant total de la dette amortie à la fin de l'année 2017 à 139,5 milliards d'euros, soit environ la moitié de la dette totale accumulée.
Compte tenu du déficit du régime général et du FSV prévu pour 2017, qui s'élève à 5,2 milliards d'euros, cette opération représente un désendettement net pour la sécurité sociale de plus de 10 milliards d'euros. Dans la trajectoire pluriannuelle que nous vous présentons aujourd'hui, ce désendettement se poursuivra pour permettre le remboursement complet de la dette sociale en 2024.
La loi de programmation des finances publiques prévoit la remise au Gouvernement, avant le 31 mars 2018, d'un rapport sur les relations financières entre l'État et la sécurité sociale, dans le contexte du retour à l'équilibre de celle-ci alors même que le budget de l'État présente un déficit important.
Au-delà, je souligne que le PLFSS complète le PLF. Leur philosophie est la même et le débat doit les embrasser tous deux.
Mme la ministre a parlé de la suppression du régime social des indépendants, je n'y reviens donc pas.
Le soutien du pouvoir d'achat passe d'abord par la baisse des cotisations sociales, financée par une hausse de la CSG. Ce sont près de 3 milliards d'euros qui seront ainsi redistribués en 2018 au profit des actifs. Le gain pour un salarié au SMIC sera l'année prochaine de 160 euros environ ; la CSG augmentera tandis que les cotisations sociales diminueront, et cela en deux temps. En année pleine, le gain de pouvoir d'achat sera de 263 euros par an en 2019 pour une personne seule rémunérée au SMIC.
Le soutien aux entrepreneurs passe principalement par la transformation du CICE en baisse de charges. Cela rend le CICE moins incertain. En 2019, pour la première fois dans notre histoire, nous serons à zéro charge au niveau du SMIC. C'est un avantage important pour les entreprises qui embauchent, et une demande très forte de leur part. Cette mesure touche aussi le monde de l'économie sociale et solidaire et le monde associatif.
Il faut aussi souligner l'élargissement de l'aide au chômeur créant ou reprenant une entreprise (ACCRE) aux indépendants en 2019. Le Premier ministre l'a annoncé lors d'un déplacement à Dijon, et cette mesure figure dans le projet de loi que nous vous présentons.
Je voudrais revenir avec vous sur les mesures qui concernent la CSG, afin que nous soyons tous d'accord sur les chiffres et que le débat soit politique.
Souvent, les tableaux qui vous sont présentés utilisent le revenu fiscal de référence (RFR), qui figure sur la feuille d'impôt ; mais ce n'est pas tout à fait la même chose que le revenu net, à 10 % ou 15 % près. C'est un premier point auquel il faut porter attention.
De plus, la hausse de 1,7 point de la CSG sera entièrement déductible de l'assiette utilisée pour le calcul de l'impôt sur le revenu. C'est un point important. Un abattement est en outre appliqué aux personnes de plus de 65 ans.
Il y a donc deux seuils pour le déclenchement de l'augmentation de CSG. En parlant en revenu net par mois, référence habituelle de nos électeurs, un retraité âgé de moins de 65 ans touchant une pension inférieure à 1 289 euros par mois ne sera pas concerné par l'augmentation ; s'il a plus de 65 ans, le seuil sera de 1 394 euros. Pour une personne seule, si l'on revient au RFR, les seuils seront après la revalorisation du 1er janvier 14 404 euros ; pour un couple, 22 096 euros ; pour un couple avec un enfant, 25 942 euros.
Par ailleurs, la commission des finances vient de voter le dégrèvement de la taxe d'habitation (TH) pour 80 % des ménages sur trois ans, inscrit dans le PLF. Un contribuable touchant 2 500 euros nets par mois verra sa taxe d'habitation diminuer d'un tiers dès l'an prochain.
Les retraités âgés de plus de 65 ans qui gagnent moins de 1 394 euros ne paieront pas l'augmentation de la CSG, et un grand nombre d'entre eux cesseront de payer la TH. Tous ceux qui gagnent plus de 1 394 euros et moins de 2 500 euros verront leur TH diminuer largement. Mais, Effectivement, ceux qui gagnent plus de 2 500 euros par mois devront continuer de payer la TH et paieront une CSG très légèrement plus importante.
Cela posé, notre débat pourra être philosophique. Pour financer notre modèle de protection sociale, nous substituons la CSG – qui pèse sur l'ensemble des revenus, y compris ceux du capital – à des cotisations sociales assises exclusivement sur le travail. Ce mouvement est complété, du côté des dépenses, par une universalisation, avec un accès au régime de droit commun de populations spécifiques – étudiants pour l'assurance maladie, démissionnaires et indépendants pour l'assurance chômage.
Il s'agit d'une évolution très profonde, voulue par le Gouvernement et le Président de la République : nous passons d'un modèle assurantiel, dit « bismarckien », fondé sur les cotisations sociales et les statuts, à un modèle dit « beveridgien », universel, fondé sur l'impôt. C'est sur ces bases que commence ces jours-ci la discussion, avec les partenaires sociaux, de la réforme de l'assurance chômage.
Le PLFSS jette les bases de cette transformation, dont Mmes Buzyn et Pénicaud débattront au cours des prochains mois avec les partenaires sociaux.