Intervention de Paul-André Colombani

Séance en hémicycle du jeudi 21 février 2019 à 15h00
Interdiction du glyphosate — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPaul-André Colombani :

L'ensemble des chaînes alimentaires est bouleversée. Outre les effets sur l'environnement et sur la biodiversité – et en dépit des controverses scientifiques alimentée par les études fournies par les grandes firmes – , il est acquis que le glyphosate a des effets néfastes sur la santé humaine. Et les études scientifiques alertent sur les pathologies qui peuvent apparaître, à la suite d'une exposition prolongée.

Cela a été dit, l'Organisation mondiale de la santé a déclaré, en 2015, le glyphosate comme « probablement cancérogène ». L'expertise collective de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale intitulée « Pesticides : Effets sur la santé », publiée en 2013, fait état d'associations positives entre l'exposition professionnelle à des pesticides et la maladie de Parkinson, le cancer de la prostate et différents cancers hématopoïétiques. Une nouvelle étude, publiée dans le Journal of the National Cancer Institute, souligne la dangerosité de l'exposition au glyphosate, qui accroîtrait de 41 % le risque de lymphome non-hodgkinien, un cancer de la peau. La lutte contre le glyphosate emporte donc une importante dimension de santé publique. En tant que médecin, je ne peux qu'être sensible à ces éléments.

A la suite de ces découvertes, les pouvoirs publics se sont emparés de la question de son interdiction. Ce fut le cas, tout d'abord, à l'échelon européen. Après de longs mois de tractations, entre la Commission, le Parlement et les États membres, ces derniers ont voté, le 27 novembre 2017, la proposition de la Commission de renouveler l'autorisation du glyphosate pour cinq ans, après que l'Autorité européenne de sécurité des aliments a refusé de classer le glyphosate parmi les agents cancérigènes.

Nous savons que cette décision a été permise par un renversement de la position de l'Allemagne et qu'elle a été prise contre l'avis de la France, laquelle militait pour une interdiction plus rapide. La République française doit, d'ailleurs, continuer à oeuvrer pour que l'autorisation du glyphosate ne soit pas prorogée dans l'Union européenne au-delà de 2022. Le même jour, le 27 novembre, le Président de la République avait réagi en déclarant : « J'ai demandé au Gouvernement de prendre les dispositions nécessaires pour que l'utilisation du glyphosate soit interdite dès que des alternatives auront été trouvées, et au plus tard dans les trois ans. »

La présente proposition de loi traduit donc, législativement, et de manière habile, l'engagement du chef de l'État. Mais nous nous souvenons, aussi, des débats parlementaires sur la loi EGALIM, au cours desquels le Gouvernement et la majorité ont refusé d'inscrire cet engagement présidentiel dans la loi. En juin dernier, le Premier ministre actait ce recul, en prévoyant « la fin des principaux usages du glyphosate d'ici 3 ans et de tous les usages d'ici cinq ans, en organisant cette transition avec les agriculteurs. » Cette position fut confirmée par le Président de la République, à Bourg-de-Péage, en janvier dernier.

D'aucuns considèrent pourtant – et telle est ma position personnelle – qu'il convient, impérativement, d'interdire le glyphosate dans trois ans. J'y vois deux raisons principales.

D'une part, dans un état de droit, ce qui n'est pas interdit est autorisé. Et j'estime que les agriculteurs n'ont pas à choisir entre leur santé et leur survie économique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.