Il n'est pas question, aujourd'hui, de remettre en cause la fin de l'utilisation du glyphosate. Le monde agricole sait parfaitement que cette sortie est inéluctable. La décision est prise.
Je suis éleveur et viticulteur d'une circonscription agricole de Gironde et ancien conseiller d'entreprises à la chambre d'agriculture de 1990 à 2000. Les agriculteurs ont su faire évoluer leurs pratiques, en matière tant de santé publique que de respect de l'environnement. Ils ont assumé ces changements avec une grande lucidité, souvent au prix d'un endettement important de leurs entreprises. Ils se diversifient, s'adaptent et recherchent de nouvelles pratiques.
La remise en question du monde paysan est permanente : si le climat évolue, le marché, lui aussi, évolue, au plan tant national qu'international. L'agriculture peut être assimilée à une industrie lourde : les équipements sont coûteux et difficiles à rentabiliser. La faiblesse des revenus dégagés par les exploitations ne permettent pas de prendre à la légère les conséquences financières de nouveaux investissements. Selon la Mutualité sociale agricole, 19 % des exploitations sont déficitaires en 2016 et le revenu de 20 % des exploitants ne dépasse pas 4 315 euros par an.
Saluons avec vous, monsieur le ministre, la loi EGALIM, dont notre collègue Jean-Baptiste Moreau a été le rapporteur : son entrée en vigueur, encore récente, permettra d'améliorer les conditions de vie des agriculteurs. Je le répète, c'est dans trois ans qu'aura lieu la sortie du glyphosate. Ces trois ans sont nécessaires, vous l'avez souligné vous-même, madame la rapporteure.
On peut toujours, comme l'avait observé le Général de Gaulle, « sauter sur sa chaise comme un cabri en disant », non pas, en l'occurrence, « l'Europe, l'Europe, l'Europe », mais « une date, une date, une date », « mais cela n'aboutit à rien ». À quoi sert, en effet, de fixer une date sans se donner les moyens de la respecter et sans prendre d'engagements ?
Le Parlement, dans le projet de loi de finances pour 2019, a prévu des moyens pour l'expérimentation des fermes DEPHY et a augmenté la redevance pour pollution diffuse, afin d'accompagner le financement et le développement de l'agriculture biologique. Le Gouvernement a dégagé des moyens à la hauteur de nos responsabilités : nomination d'un préfet coordinateur et mise en place d'un centre de ressources piloté par les chambres d'agriculture et l'INRA. Les chambres, au travers de leurs réseaux de techniciens, sont engagées dans une mission-conseil de coconstruction et de vulgarisation des pratiques alternatives au glyphosate selon une approche territoriale.
Un suivi des quantités vendues et utilisées est instauré, afin de garantir la transparence des usages. Un nouvel examen par l'ANSES de l'ensemble des autorisations de mise sur le marché des produits contenant du glyphosate est demandé, avec une date butoir à trois ans. Un programme prioritaire de recherche sur la sortie du glyphosate est lancé par le ministère de l'enseignement et la recherche.