« la confiance n'exclut pas le contrôle ». C'est pour cette raison que nous avons mis en place une mission d'information commune sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate, présidée par Julien Dive, et dont Jean-Luc Fugit et moi-même sommes les corapporteurs. Je salue l'assiduité de Loïc Prud'homme, qui est présent à chaque audition, et son implication totale dans les travaux de la mission.
Je rappelle que les travaux de cette mission d'information ont débuté le 27 septembre 2018. Après l'audition conjointe des ministres Didier Guillaume et François de Rugy, la mission a notamment entendu le président de l'INRA, des représentants de l'Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture, IRSTEA, le président de l'Association des chambres d'agriculture de France APCA ainsi que le préfet Bisch, qui a été nommé en novembre coordinateur interministériel du plan de sortie du glyphosate et du plan de réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques. Le préfet est également chargé d'évaluer l'accompagnement nécessaire à la sortie du glyphosate : c'est lui qui coordonne l'ensemble des actions ministérielles et qui préside aux destinées de la task force.
La mission que nous menons a pour but de contrôler et d'évaluer sur trois ans la stratégie de sortie du glyphosate et la mise en place du plan Écophyto II +. J'invite tous ceux qui sont intéressés par ce sujet à assister à ces auditions, notamment à la prochaine qui aura lieu le 7 mars, celle de Brune Poirson qui a beaucoup oeuvré pour convaincre nos partenaires européens de ne pas renouveler l'autorisation du glyphosate au-delà de cinq ans au lieu des quinze ans souhaités par la plupart des pays européens.
Je vous demande, mes chers collègues, de prendre un peu de hauteur et de vous mettre à la place des autres pays européens : en 2017, la France, grand pays agricole, est la première à militer pour un renouvellement de l'autorisation limité à cinq ans au lieu de quinze. Elle parvient ensuite à convaincre sept partenaires européens de voter contre le renouvellement, c'est-à-dire à faire, au niveau européen, ce que vous demandez aujourd'hui par cette proposition de loi ! Les représentants de la France ont eu le courage de défendre une position audacieuse là où se place la vraie difficulté : sortir ensemble du glyphosate.
Vous êtes-vous demandé ce qu'en pensent les autres pays du monde, notamment ceux d'Amérique latine ? Leurs pratiques sont considérablement plus dangereuses que les nôtres : ils aspergent leurs cultures d'OGM avec du glyphosate quand, en France, nous ne l'utilisons qu'en interculture. Nous travaillons avec l'INRA et l'ACTA à restreindre encore davantage l'utilisation du glyphosate pour aboutir progressivement à la cessation de tous les usages de la molécule.
Notre méthode est à des années-lumière des pratiques agricoles mondiales que je condamne fermement. Nous sommes à la pointe des techniques et de l'ambition. Je suis fier que ce soit le chemin tracé par la France et vous vous en féliciterez vous aussi dans trois ans.
Je remercie Mme la rapporteure pour son travail, qui met en évidence les différentes positions des États membres et le besoin de crédibiliser la parole scientifique des experts. Les accusations de conflits d'intérêts de l'Autorité européenne de sécurité des aliments avec le groupe industriel Monsanto ont mis à mal la parole scientifique. Ce scandale montre que nous avons besoin d'une agence véritablement indépendante, sur le modèle de l'ANSES française, qui assure un contrôle strict des produits sur le plan européen. Notre santé mérite la transparence : c'est pourquoi nous avons besoin d'études réellement indépendantes et coordonnées.
La parole de la France est essentielle : grâce à la détermination et à l'engagement du Président de la République, nous avons réussi à réduire à cinq ans au lieu de quinze la période de renouvellement de l'autorisation du glyphosate sur le plan européen, mais nous devons encore convaincre nos voisins d'aller plus loin. Une coordination est indispensable pour apporter une réponse globale à la réduction de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques.
Au nom du principe de précaution, il faut interdire le glyphosate, et nous le ferons, tous ensemble, de manière coordonnée et en bonne intelligence. Ce sont les paysans qui sont les principaux exposés et les premières victimes. Depuis 2012, tous ceux qui, parmi eux, manipulent des produits phytosanitaires doivent se munir d'équipements de protection normés pour l'ensemble des produits phytosanitaires. Les pulvérisateurs sont contrôlés tous les quatre ans, chaque agriculteur doit tenir un carnet sanitaire dans lequel il enregistre ses pratiques, les produits et les quantités utilisés.
La loi de la jungle ne s'applique donc nullement en la matière : l'utilisation des produits phytosanitaires est déjà très strictement encadrée et contrôlée. Depuis le 1er janvier 2017, leur utilisation, dont celle du glyphosate, est interdite pour les collectivités publiques, et depuis le 1er janvier 2019 pour les particuliers. La transition est donc en cours. D'ici à trois ans, ce sera chose faite pour la très grande majorité des cultures, nous en sommes convaincus.
Si nous voyons que l'utilisation ne diminue pas et que la prise de conscience ne se fait pas, nous ne nous interdirons pas d'inscrire, à terme, l'interdiction du glyphosate dans la loi. Ce temps n'est toutefois pas encore venu, et c'est pour cela que nous proposons cette motion de renvoi en commission.