« Que ton aliment soit ta seule médecine », disait Hippocrate.
Le père de la médecine avait déjà bien identifié l'impact de nos comportements nutritionnels sur notre santé.
Aujourd'hui, cette articulation entre alimentation et santé semble plus que jamais vérifiée.
Ces dernières décennies, le diabète, l'obésité, les maladies cardiovasculaires et les cancers se sont considérablement développés en raison de l'alimentation.
Des études récentes et les travaux de la commission d'enquête sur l'alimentation industrielle, dont j'étais rapporteure, ont démontré un lien entre la surconsommation d'aliments industriels et le risque de survenance de ces pathologies.
Ces aliments représentent aujourd'hui près des deux tiers des aliments consommés par les enfants et près de la moitié de ceux consommés par les adultes.
L'augmentation de cette consommation s'explique par l'évolution des pratiques alimentaires observée depuis une cinquantaine d'années.
La composition nutritionnelle de ces aliments doit donc nous interroger.
Pauvres en nutriments essentiels, ces produits sont bien souvent trop sucrés, trop salés et trop gras. Ils contiennent en outre des additifs dont les effets cocktail sont et resteront bien difficiles à évaluer.
Soulignons que ce phénomène de surconsommation d'aliments varie en fonction des catégories sociales : les catégories favorisées consomment plus de produits frais, tandis que les plus modestes consomment davantage d'aliments industriels, notamment en raison de leur faible coût.
L'alimentation est en effet devenue un marqueur social.
Quelle injustice que les personnes qui surconsomment des aliments d'origine industrielle – pour des raisons de moyens, de facilité, que sais-je encore – soient contraintes de consommer des produits de mauvaise qualité !
Oui, la sécurité alimentaire est essentielle. Ces dernières années, le renforcement de celle-ci s'est cependant opéré aux dépens de la composition nutritionnelle.
Aujourd'hui, les consommateurs sont de plus en plus exigeants et de plus en plus attentifs au contenu de leur assiette, ainsi qu'aux conséquences de leur alimentation sur leur santé.
L'alimentation est devenue un enjeu de santé publique majeur.
L'ordre du jour de notre assemblée appelle donc l'examen de la proposition de loi visant à protéger la population de la malbouffe déposée par M. Loïc Prud'homme.
Si nous nous réjouissons que ce débat fondamental ait lieu dans notre hémicycle, je déplore néanmoins que le terme malbouffe ait été employé dans son titre.
Stigmatiser uniquement les aliments industriels est une erreur : industriel n'est pas synonyme de mauvais, et beaucoup des acteurs concernés font des efforts.
Ne culpabilisons pas ceux qui consomment des aliments industriels, car certains y sont contraints !
Dans sa rédaction initiale, cette proposition de loi n'était, selon moi, pas assez aboutie, et elle était incompatible avec la complexité des réglementations nationale et européenne. L'article 1er portant sur les additifs en était un exemple manifeste, dans la mesure où il n'était pas applicable, eu égard aux principes de libre concurrence et de libre circulation prévus au niveau communautaire.
L'article 2, visant à réduire les teneurs en sel, en sucre et en acides gras saturés dans les aliments transformés, porte un objectif que je rejoins, mais il mérite encore des ajustements. Depuis la publication de mon rapport, je mène des travaux sur ce sujet pour aboutir à un dispositif réaliste et pragmatique, qui permette réellement d'améliorer la qualité nutritionnelle des aliments industriels. C'est pourquoi je rencontre différents acteurs : des scientifiques, mais aussi les industriels eux-mêmes, pour mieux comprendre leurs processus de fabrication, car c'est à eux qu'il incombera de faire les efforts nécessaires – il est en effet indispensable de considérer la faisabilité et l'application du dispositif qui devra être retenu.
Ne mentons pas aux Français, ne mentons pas aux consommateurs ! Concernant la publicité et le marketing alimentaire à destination des enfants, évoqués à l'article 3, j'espère que nos échanges d'aujourd'hui nous permettront d'avancer sur ce sujet.
Enfin, l'article 4 abordait un thème fondamental : l'éducation à l'alimentation auprès des enfants à l'école, une institution qui a un rôle central pour permettre à tous d'acquérir des habitudes alimentaires saines. Cependant, la rédaction de cet article m'apparaît trop restrictive. L'apprentissage à l'alimentation doit recouvrir plusieurs dimensions, à la fois nutritionnelle, environnementale et culturelle, sans oublier la pratique de l'activité physique, essentielle pour lutter contre la sédentarité chez les enfants.
Enfin, je regrette que le sujet de la recherche n'ait pas été abordé dans ce texte. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement d'appel visant à souligner la nécessité d'un meilleur soutien des pouvoirs publics, pour permettre la mise à disposition de données scientifiques, portant notamment sur la nutrition-santé, afin que tous les industriels puissent s'en saisir.
Je suis pour un débat constructif, qui nous permette d'appréhender le sujet de l'alimentation dans sa globalité.